Il ne s’agit pas ici de composer un récapitulatif complet
d’une série qui a compté 76 volumes, mais de communiquer le plaisir même pas
coupable éprouvé à leur lecture. Serge Kovask est un officier de l’ONI, service
de contre-espionnage de la Navy,
embarqué dans des enquêtes qui concerne tout d’abord la Défense, mais qui va
devenir de roman en roman l'acteur d'un réquisitoire contre l’impérialisme. Très vite, on
peut même dire immédiatement, le personnage du Commander sort de la typologie
de l’exécutant fascistoïde et phallocrate à la SAS. Même si G.-J. Arnaud ne
déploie pas d’arc narratif autour de ce personnage, son évolution devient
éloquente dès le milieu des années 1960, qui le voit passer d’une position
vaguement « démocrate » nostalgique de Kennedy à une démission de la marine américaine pour servir la
cause du droit et de la justice internationale. Là où certains folliculaires (à
Libération, par exemple, où
l’inculture vis-à-vis des littératures populaires devient proverbiale)
s’étonnent de voir le tâcheron de SAS présenter une soi-disant pertinence pour
ce qui concerne les affaires internationales, Arnaud, lui, démontre que l’on
peut trouver des sources ailleurs que dans les officines et raconter des
histoires puisées dans le Monde
diplomatique ou dans des sources plus ragoutantes que les colonnes de
Minute. Produit de la guerre froide,
les collections d’espionnage où évoluent ces personnages assez manichéens —
Serge Kovask, alias le Commander, n’y échappe pas — s’estompent dès les années 1980. Créé en 1961 et abandonné en 1986, le Commander, aidé du splendide
personnage de Cesca Peppini alias la Mamma, aura lutté aussi bien contre les
latifundistes du Nordeste, parcouru clandestinement le Chili pendant le coup
d’État, évoqué l’Opération Condor, ou bien contré les faucons du Vietnam.
Mission accomplie, par un écrivain probe et crédible qui a disparu récemment et
qui vaut bien plus que la condescendance de certains hommages qui démontre
l’ignardise de ses signataires. Encore faut-il pour y remédier, lire G.-J.
Arnaud. Ce à quoi s'adonne votre Tenancier de temps à autre.
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dimanche 5 juillet 2020
vendredi 23 mai 2014
Un lancer d'espions
Croyez-le ou non, votre Tenancier a toujours considéré la
collection Espionnage au Fleuve Noir comme une série crépusculaire. Sans doute
cela est dû au fond noir des couvertures des débuts de la collection mais également au fait que
cet univers avait toujours des corrélations intimes avec la nuit ou bien avec
des univers en faillite. Bien évidemment, nous sommes loin des ouvrages de Le
Carré et la lecture de ces livres ne nécessitent pas trop de ressources en
intellect. Du reste, si l’on trouve pas mal d’ouvrages particuliers sur les
collections policières ou de SF, on serait en peine de trouver une bibliographie
un peu fouillée sur l'espionnage. Certes, votre Tenancier n’as nullement vocation à l’universalité
et on pourra lui opposer tel source ou tel publication rien que pour le
contrarier, certes… Mais augurez donc avec moi qu’on ne croule pas sous la
quantité. Nous détenons une étude, un ouvrage général pour lequel on s’est
empressé de distraire quelques sesterces, il s’agit de L’idéologie dans le roman d’espionnage, d’Érik Neveu. Si le dieu
Janus nous protège comme il faut, p’têt ben qu’on aura le temps de vous en
causer un de ces jours.
L’évocation de cet ouvrage n’est pas innocente ici. L’idéologie du roman d’espionnage au Fleuve Noir ne se distingue pas par sa nuance ni sa défense absolue d’un idéal libertaire, loin de là. On sort de ces lectures avec plus de convictions impérialistes que des idées démocratiques et les droits de l’homme y sont plutôt une vue de l’esprit. Quant à la place de la femme dans ce genre de littérature, chacun de nous a eu dans les mains les ignobles petites saloperies estampillées SAS (publiées par la concurrence, chez Plon) dont l’auteur fut d’ailleurs encensé récemment dans les colonnes de Libération. A toute cette littérature consternante pour ce qui concerne la dignité même de ceux qui la lisent sans le recul nécessaire, il fallait opposer un auteur quelque peu reposant : G.-J. Arnaud.
On se propose dans les temps à venir de chroniquer de temps à autre une série qui faisait partie de la collection Espionnage au Fleuve Noir et dont le héros, Serge Kovask, alias Le Commander, constitue une sorte de bain de fraîcheur dans le machisme et la violence ordinaire. A travers cette petites chronique, on se propose de suivre l’évolution, importante, du personnage et également de rendre hommage à un auteur populaire méconnu du grand public et dont on estime la production à plus de 350 titres.
L’évocation de cet ouvrage n’est pas innocente ici. L’idéologie du roman d’espionnage au Fleuve Noir ne se distingue pas par sa nuance ni sa défense absolue d’un idéal libertaire, loin de là. On sort de ces lectures avec plus de convictions impérialistes que des idées démocratiques et les droits de l’homme y sont plutôt une vue de l’esprit. Quant à la place de la femme dans ce genre de littérature, chacun de nous a eu dans les mains les ignobles petites saloperies estampillées SAS (publiées par la concurrence, chez Plon) dont l’auteur fut d’ailleurs encensé récemment dans les colonnes de Libération. A toute cette littérature consternante pour ce qui concerne la dignité même de ceux qui la lisent sans le recul nécessaire, il fallait opposer un auteur quelque peu reposant : G.-J. Arnaud.
On se propose dans les temps à venir de chroniquer de temps à autre une série qui faisait partie de la collection Espionnage au Fleuve Noir et dont le héros, Serge Kovask, alias Le Commander, constitue une sorte de bain de fraîcheur dans le machisme et la violence ordinaire. A travers cette petites chronique, on se propose de suivre l’évolution, importante, du personnage et également de rendre hommage à un auteur populaire méconnu du grand public et dont on estime la production à plus de 350 titres.
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