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mardi 7 février 2023

Une histoire de constellation


Si vous ne le savez pas vraiment, vous avez dû la subodorer : votre Tenancier s’absente maintenant souvent du blogue parce qu’il écrit par ailleurs et que quatre heures de tensions dans la journée aboutissent à l’épuisement. Guère facile ensuite de vous causer sans se forcer et risquer ainsi de générer du déplaisir. Ai-je envie de m’adresser à vous de mauvaise grâce ? Non.
Les semaines passées ont été consacrées à la dernière main (on verra que le terme est choisi, à la parution de l’ouvrage) à un roman qui était fort mal parti. On reparlera sans doute un jour de la suffisance et des avertissements divers qui ont accompagné la conception et les révisions avant la survenue de sauveteurs. L’une des incidentes de ce récit use du firmament et des constellations comme moteur de l’action ; étrange coïncidence, alors, que de recevoir en cadeau (truffé chaque fois de surprises merveilleuses) d’une amie, ignorante du roman qui se trame, l’essai de William Marx : Des étoiles nouvelles, quand la littérature découvre le monde. Ces hasards fascinent toujours et procurent une illusion magique qui abonde dans notre sens : nous avons raison, puisque les événements nous le confirment, sans que nous les sollicitions de trop. On a commencé à feuilleter le livre et l’on tombe sur le dernier paragraphe :
« À défaut, il n’est possible que de tracer des constellations toujours plus diverses et d’imaginer comment leur dessin se poursuivrait au-delà de l’horizon visible, au-delà du passé historique, au-delà des contraintes trop aisément contestables des faits et du récit de vainqueurs. Alors peut-être se découvriront d’autres étoiles nouvelles, accessibles seulement à l’esprit »

Propos finaux presque anodins s’ils ne venaient en contrepoint exact de la situation développée dans le roman à paraître. Parvenue à ce paragraphe conclusif il nous reste à remonter le cours de l’exposé, ainsi qu’agissent les personnages du récit, intrigués par une constellation. On s’y apprête avec gourmandise en temporisant un peu, toutefois, non par peur de la déception, mais pour prolonger la jouissance.
 

mardi 21 juin 2022

Se dérober

Il arrive un moment, lorsque l’on écrit, où l’on se pose la question de la pertinence de son propos. En quoi ce que l’on couche sur le papier apporte-t-il quelque chose d’utile à soi et aux autres ? Si l'interrogation semble superflue pour ce qui concerne la littérature de divertissement assumée comme telle, on se trouve tôt ou tard confronté à « la quête de sens » et même, au bout du compte, au bord du renoncement, laisser tomber devenant un pis-aller plutôt que d’affronter les contradictions entre la volonté d’élever le débat suscité par ses propres écrits et les limites de chacun. Bien entendu, l’idée affleure de façon périodique et ne s’enterre jamais vraiment, peu importe l’argutie utilisée. On en a vu, comme Alain Nadaud, écrire pour signaler qu’ils arrêtaient d’écrire, paradoxe apparent, mais qui dévoilait un renoncement aux territoires de la fiction et également la soumission du texte a autrui… et puis la lassitude de l’auteur face à l’indifférence critique, et à celle des éditeurs qui ne se payent guère d’audace (on songe toujours à Nadaud et à ses vitupérations contre un système de commercialisation qui vaut autant pour la littérature que pour les savonnettes). On peut encore se trouver peu d’allant pour partir en guerre contre soi, se faire violence, se contenter de produire à l'identique. Est-ce bien la solution ? Mais ne vaut-il pas mieux s’essayer à progresser au-delà de on assise ? Bien sûr… celui qui n’a pas compris cela, que fait-il, à écrire encore ? Ces moments de crises restent profitables à partir du moment où on les dépasse. Ils ne sont pas perçus de façon claire par l’entourage et les lecteurs, à cause de la décantation, de la latence et de l’adaptation vers d’autres paradigmes d’écritures. Il arrive aussi que l’on échoue à cette prétention, mais au moins l’on a tenté de se rédimer de son laisser-aller, même si en apparence, les productions restent identiques encore un temps aux yeux du lecteur. La crise peut se révéler abrupte dès lors que l’on décide de s’éloigner d’un genre que beaucoup aiment rencogner dans un « imaginaire » si trompeur que les stéréotypes y abondent plus souvent qu’à leur tour. La nécessité de larguer les amarres se pose. Elle ne mène pas à une renonciation, mais à une réflexion, sur le sens de ce que l’on produit et sur les menus tourments que cela occasionne : tempête dans un verre d’eau ! On sait bien où cela aboutit, c'est-à-dire à demeurer à la même place aux yeux des autres et puis à constater qu’au bout du compte on s’est agité pour pas grand-chose. On retrouve des ornières identiques. Mais, au moins, l’on a ressenti l’envie de se dérober, comme parfois les personnages que l’on fait naître dans certains récits. Reste le sentiment confus de ces velléités, qui rejailliront, qui sait, un peu plus tard…