jeudi 31 juillet 2014

Les rébus de Frédéric II et de Voltaire

Encore nos jeux estivaux :
On le sait, Voltaire fut l'hôte de Frédéric II. Les deux hommes étaient férus de jeux de mots, d'énigmes et de rébus, amusements très en vogue à l'époque dans toutes les cours d'Europe. A votre tour, pourrez-vous déchiffrer celui-ci, très simple, que l'empereur adressa au philosophe ?

P

6 heures
A
6

100

Et saurez vous ensuite déchiffrer la réponse de Voltaire ?
G a
Merci de donner la décomposition du rébus avant de restituer la phrase dans vos commentaires.

mardi 29 juillet 2014

Le Sérum du docteur Pest





Cette nouvelle du Tenancier vient d'être publiée et il espère bien que quelques uns d’entre vous l'apprécieront. Pour ceux qui en demanderaient encore, on vous signale l’existence d’une bibliographie quasi exhaustive ici.

Yves Letort 
Le Sérum du docteur Pest
  Édition numérique à commander sur le site de

Images non contractuelles


Cette élégante adaptation fut publiée sur le blog Feuilles d'automne en juin 2008. Si nous avons changé un peu notre profession de foi avec notre blog actuel, les propos restent néanmoins valides pour une grande part. De toute façon, le Tenancier persiste à ne pas se trouver ressemblant.
(On peut cliquer sur les images pour les agrandir)

samedi 26 juillet 2014

Tu n’as qu’à te comporter comme un casseur et camper où bon te semble. Ne te prends pour personne et plus volontiers pour un autre, de manière à ce que l’on continue de te chercher. Dis-le à George qui préfère les bons.


"Si vous voulez que je vous parle de Gian Maria Volonte, ça va être une autre histoire. Gian Maria Volonte est un acteur d’instinct. Il est sans doute un grand acteur de théâtre en Italie et, probablement, il est même un grand acteur shakespearien, mais il est un personnage absolument impossible, en ce sens qu’il ne m’a donné à aucun moment le sentiment d’avoir affaire à un professionnel. Il ne savait pas se placer dans la lumière et ne comprenait pas qu’un centimètre à gauche ou un centimètre à droite, ce n’était pas la même chose. J’avais beau lui dire : « Regardez Delon, regardez Montand, voyez comment ils accrochent la lumière impeccablement, etc. » Il paraissait ne rien comprendre. Je crois que son activité  politique (il est gauchiste et le dit assez) n’a rien fait pour nous rapprocher. J’ai appliqué tout le temps cette espèce de loi « anti-casseur », dont on parle beaucoup en ce moment en France, alors que lui, c’est un casseur. Il était très fier d’avoir campé à l’Odéon pendant les jours « glorieux » de mai-juin 1968 ; moi, personnellement, je n’ai pas campé à l’Odéon… Il paraît que quand il avait une week-end de libre il sautait dans l’avion pour aller le passer en Italie. Ça c’est du supernationalisme, c’est moi qui vous le dis. Un jour, je lui ai dit : «  Vous ne pouvez pas rêver d’être un acteur international aussi longtemps que vous mettrez au-dessus de tout, comme vous le faites, votre qualité d’Italien, chose qui n’a pas plus d’importance que d’être français… » Or, tout ce qui est italien pour lui est sacré et merveilleux et ce qui est français est ridicule. Un jour je me souviens de l’avoir vu sourire alors que nous étions en train de mettre en place une scène de transparence. « Pourquoi souriez-vous ? » lui ai-je demandé intrigué. « Parce que… m’a-t-il répondu, vous avez vu Banditi a Milano ! tout a été tourné en direct pendant qu’on roulait… » « Ah ! Bon ! Mais y avait-il des scènes de nuit comme ça ? Étiez-vous en voiture pendant qu’on filmait une scène de nuit qui devait être vue à travers les vitres ? » « Ah ! Non ! » Et il a semblé comprendre que nous ne faisions pas de transparences dans le but de l’amuser. Un personnage curieux. Très fatigant. Je vous promets que je ne referai plus de film avec Gian Maria Volonte. "
 
Rui Nogueira : Le cinéma selon Melville — Seghers, 1974

Pacson

Pacson ou Paqueson : Paquet.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

vendredi 25 juillet 2014

jeudi 24 juillet 2014

Le salon littéraire

Pour continuer nos jeux de vacances, voici des mots croisés. Ils ont été préparés par Tristan Bernard et ont été publiés en recueil en 1925 chez Bernard Grasset. Votre Tenancier a le bonheur de posséder un exemplaire dont les grilles ont été remplies en très grande partie par un heureux prédécesseur, remplissage utile lorsqu'on constate que l'ouvrage ne comporte aucune solution. En effet, ces mots croisés firent l'objet d'un concours dont la résolution passa par voie de presse. Le Tenancier vous convie à chercher de votre côté, il remplira la grille à mesure de vos trouvailles indiquées dans les commentaires... Pour plus de clarté, on a changé la numérotation arabe des horizontales pour des chiffres romains, ce qui n'est pas le cas dans l'édition originale. Comme d'habitude, on fait appel à  votre sens de l'honneur pour ne pas aller vérifier ici ou là la solution.

LE SALON LITTÉRAIRE

Il n'est peut-être pas mauvais, pour venir à bout de celui-là, d'avoir fréquenté quelque peu le fils d'un tapissier.


1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12
I A
S E L
E
R A A B
II B A S S E
L A E R T E
III O S
C O V I E L L E
IV
S
A N I S
I O
E
V P O U R C E A U G N A C
VI E U
B E N
S I
G
VII T R
A
S C I E U R S
VIII A D A G E
I N U L E E
IX L I G N E
V E X E E S
X E
I A
D E S

E
XI
J O S S E

P E S E

HORIZONTALEMENT

I. — Esprit (3).Ville hongroise (4).
II. — Chanteur (5).  — Père d'un roublard (6).
III. — Nous en avons tous (2). — Valet d'un parvenu (8).
IV. — Ombellifère (4). — Ruminant célèbre, qui fit une forte randonnée (2).
V. — Que l'on fait passer pour fou (12).
VI. — Auxiliaire (2). — Fils d'arabe (3). — Affirme en riposte (2).
VII. — Initiales d'un peintre et d'un philosophe qui portaient les mêmes nom et prénom (2). — Débitent du bois (7).
VIII. — Dicton (5). — Composée (6).
IX. — Prince célèbre par son esprit et par ses mémoires (5). — Pas contentes (6).
X. — Le Kaizer acquiesce (2). — Petits cubes (3).
XI. — Marchand de bijoux dont le nom est obligatoirement précédé de Monsieur (5). — Mesure (4).

VERTICALEMENT

1. — Sur la Baltique (3). — Chacune des divisions de la rosette ambulacraire de l'oursin (6).
2. — Étouffé (8).
3. — Le pape (2). — Spéculation (4).
4. — Tint un salon littéraire (11).
5. — Prénom masculin (6). — Deux fois la même voyelle (2).
6. — Appel (5). — Préposition souvent enviée (2).
7. — Prénom (5). — Assaisonne (4).
8. — Diphtongue (2). — Locaux industriels (6).
9. — Pieux (9).
10. — Ville belge (5). — Trois lettre de pilule (3).
11. — Termine un nom de sel (3). — Acceptées (7).
12. — Manifestation ovine (2). — Termine un nom breton (2). — Possessif (3).

Ci-dessous le cartonnage de l'édition Grasset 

Nabot

Nabot : Petit homme de la taille d'un nain. Syn. : Haut comme mes fesses.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

mardi 22 juillet 2014

Charade

Mon premier est une salade
Mon deuxième est une salade
Mon troisième est une salade
Mon quatrième est une salade
Mon cinquième est une salade
Mon sixième est une salade
Mon septième est une salade
Mon huitième est une salade

Et mon tout est un célèbre écrivain anglais

(Message habituel : essayez donc de trouver par vous même, hein...)

Petite remarque autour du Glossaire qui nous servira d'introduction

Il y a peu, dans une autre vie, c'est-à-dire dans le blog que votre Tenancier publiait avant celui-ci, il lui fut reproché d’utiliser de l’imagerie maoïste comme éléments de ses publications. Certaines personnes qui ne s’étaient jamais manifestées jusque là témoignèrent d’une indignation dont on ne pouvait certes ignorer la vertu mais qui tombait un peu à côté, étant donné qu’on ignorait — volontairement ? — le kitsch de ces représentations. Or, si le Tenancier vous paraît parfois un peu trop sérieux, il fait ce qu’il peut pour considérer ces simagrées avec distance, si ce n’est avec humour. Ainsi, n’étant pas maoïste pour un sous, le Tenancier s’amusait. Avec Le retour du Tenancier (bonsoir, quel blog !) il est fort à parier que des reproches assez semblables risquent de revenir avec le glossaire qui est notre rubrique permanente. En effet et même si jusqu’à maintenant nous ne l’avons pas constaté, certains argots ont un contenu sexiste, raciste et homophobe. Devrait-on pour autant les passer sous silence ? Ignorer des choses ou des faits ne revient pas à les détruire. Il est assez pénible de devoir se justifier, même par anticipation de notre curiosité. Et passer un mot sous silence est la défaite de la pensée, l'abdication de l'intelligence. Ces mots sont autant d’empreinte d’un milieu et  de ses habitus et les exposer n’implique pas une adhésion à ses codes sociaux ou à ses préjugés. C’est un peu comme l’imagerie maoïste, voyez-vous, c’est désuet et idiot, c'est kitsch. Nous prions donc ceux qui seraient tentés de « tuer » le messager et non de se moquer du message de passer leur chemin. Ce blog n’est pas pour eux.

mardi 15 juillet 2014

Le polar selon Bertolt

Un bon auteur de romans policiers ne gaspillera pas trop son talent et ne se creusera pas trop les méninges à inventer de nouveaux caractères ou exploiter de nouveaux mobiles. Ce n’est pas cela qui compte. Celui qui, constatant que dix pour cent de tous les crimes ont lieu dans un presbytère, s’exclame : « Toujours la même histoire ! », celui-là ne comprend rien aux romans policiers. Tant il est vrai qu’au théâtre il s’exclame : Toujours la même histoire ! », à peine le rideau s’est-il levé. L’originalité n’est pas là. Bien au contraire, ce sont les variations sur des thèmes plus ou moins conventionnels qui constituent une des caractéristiques fondamentales du roman policier et qui confèrent une esthétique à ce genre […]
Le code du roman policier anglais est le plus riche et le plus sévère. Il se plaît dans les règles les plus rigides qui sont codifiés dans d’excellents essais. les Américains ont des règles assurément moins strictes et, du point de vue anglais, ils ont tort de trop courir après l’originalité. Leurs assassinats se commettent à la chaîne et revêtent un caractère épidémique.
 
Bertolt Brecht, Écrits sur l’art et la littérature, extrait cité dans : « Le roman criminel » par, S. Benvenuti, G. Rizzoni et M. Lebrun. (L’Atalante, 1982)

Maboul, Maboule

Maboul, Maboule : Fou. Faire des signes de maboul.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

lundi 14 juillet 2014

Enigme

Allez zou, encore une énigme. Celle-ci est de Boileau :

Du repos des humains, implacable ennemie,
J'ai rendu mille amants envieux de mon sort ;
Je me repais de sang et je trouve ma vie
Dans les bras de celui qui recherche ma mort.

Autant que possible essayez de trouver la réponse par vous-même. Le Tenancier compte sur votre imagination.

dimanche 13 juillet 2014

Une petite mort de Don Quichotte

Existe-t-il un « cimetière des éléphants » pour les livres ? Où vont-ils, tous ces volumes outragés par le temps et le manque de soin, quel est leur destin ? Que fait-on de tous ceux que l’on s’est refusé à acheter ou à conserver dans sa bibliothèque ?
Poubelle ?
Cheminée ?
Broyeuse ?
Que cette éventualité échoit au tout venant du roman de gare ou à l’écrit politique, rien que de très anodin. Après tout, ce ne sont que des produits à obsolescence rapide. Non, je veux parler des livres véritables, source de joie, de plaisir et de culture, enfin, vous savez, ces trucs, là, qui font réfléchir…
Oui, enfin, vous voyez, quoi.

Cette question, je me la suis posée fréquemment jusqu’à ce que je sois directement concerné. En effet, j’achète des livres par lots, j’achète également des bibliothèques et l’on y maîtrise nettement moins le contenu de ce que l’on acquiert parfois. Ainsi, chaque achat comporte son lot de « drouille », de livres indésirables, invendables, laids… je vous laisse compléter. Et puis, il y a les crève-cœur, les livres incomplets, détruits, bancals. Ce ne sont pas forcément des chefs-d’œuvre de la bibliophilie, seulement des objets devenus émouvants.

Une de mes rencontres les plus désolées avec ce genre de livres a pris la forme de deux volumes d’une édition ancienne de Don Quichotte. Chaque fois que je les regarde, je ressens un vague sentiment de culpabilité, une gêne dont j’ai du mal à me défendre. Ces livres errent d’ailleurs dans une zone de non-droit, entre ma bibliothèque (qui est dans mon bureau) et le tas d’ouvrages, derrière moi, en attente de catalogage.

Ce sont deux petits in-12° qui ont été dépouillés de leur cuir, il n’y a plus que leurs aies pour les recouvrir, deux morceaux de carton, impudiques, mouillés et tachés, mais encore tenus par des nerfs apparents, encore serrés fermes comme des cordages de navire. Peut-être est-ce cela qui partira en dernier, comme un squelette, une épine dorsale. Un des volumes a perdu un cahier, les deux n’ont plus de page de titre, le papier a bruni, est taché et mouillé à certains endroits également. Ce sont deux épaves d’une petite escadre qui naviguait autrefois vaillamment dans les rayons d’un honnête homme. Combien y en avait-il à l’origine ? Cinq, six tomes ? Ici, ce sont les tomes IV et V. Ultime outrage, on a collé des petites vignettes chromolithographiées sur le contreplat d’un des volumes. Une indication du Brunet (Manuel du libraire) laisse supposer que cette édition date de la fin du XVIIe siècle ou bien du début du XVIIIe.

Que de regrets, que de regrets...


Mais que veulent me dire ces ouvrages, quelle est la signification profonde de leur présence à mes côtés ?
Quel est leur message ?
En fin de compte, je l’ai peut être trouvé dans une gravure du cinquième tome…



Ce billet a été publié la première sur le blog Feuilles d'automne en juin 2008

Kasbah

Kasbah : Maison.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

Vanne pourrie

Eût-il été encore vivant, William Styron aurait certainement averti les athlètes des conditions climatiques des derniers J.O. d'hiver, lui qui a tant glosé sur le froid de Sotchi.

George W.F. Weaver

samedi 12 juillet 2014

Les nouvelles servitudes volontaires



Exposé d'Annie Le Brun au Colloque sur Jacques Hassoun qui s'est déroulé à l'Ecole Normale Supérieure de Paris en mars 2009

Pas d'affolement, tout est sous contrôle...

La société industrielle récente n’a pas réduit, elle a plutôt multiplié les fonctions parasitaires et aliénées (destinées à la société en tant que tout, si ce n’est à l’individu). La publicité, les relations publiques, l’endoctrinement, le gaspillage organisé ne sont plus désormais des dépenses improductives, ils font partie des coûts productifs de base. Pour produire efficacement cette sorte de gaspillage socialement nécessaire, il faut recourir à une rationalisation constante, il faut utiliser systématiquement les techniques et les sciences avancées. Par conséquent, la société industrielle politiquement manipulée a presque toujours comme sous-produit un niveau de vie croissant, une fois qu’il a surmonté un certain retard. La productivité croissante du travail crée une surproduction grandissante (qui est accaparée et distribuée soit par une instance privée soit par une instance publique) laquelle permet à son tour une consommation grandissante — et cela bien que la productivité tende à se diversifier. Cette configuration, aussi longtemps qu’elle durera, fera baisser la valeur d’usage de la liberté ; à quoi bon insister sur l’autodétermination tant que la vie régentée est la vie confortable et même la « bonne » vie. C’est sur cette base rationnelle et matérielle que s’unifient les opposés, que devient possible un comportement politique unidimensionnel. Sur cette base, les forces politiques transcendantes qui sont à l’intérieur de la société sont bloqués et le changement qualitatif ne semble possible que s’il vient du dehors.
Refuser l’État de Bien-Être en invoquant des idées abstraites de liberté est une attitude peu convaincante. La perte des libertés économiques et politiques qui constituaient l’aboutissement des deux siècles précédents, peut sembler un dommage négligeable dans un État capable de rendre la vie administrée sûre et confortable. Si les individus sont satisfaits, s’ils sont heureux grâce aux marchandises et aux services que l’administration met à leur disposition, pourquoi chercheraient-ils à obtenir des institutions différentes, une production différente de marchandises et de services ? Et si les individus qui sont au préalable conditionnés dans ce sens, s’attendent à trouver, parmi les marchandises satisfaisantes, des pensées, des sentiments et des aspirations, pourquoi désireraient-ils penser, sentir et imaginer par eux-mêmes ? Bien entendu, ces marchandises matérielles et culturelles qu’on leur offre, peuvent être mauvaises, vides et sans intérêt — mais le Geist et la connaissance ne fournissent aucun argument contre la satisfaction de besoins. 

Herbert Marcuse : L'homme unidimensionnel (1964)

Habiller un mec

Habiller un mec : C'est prendre en flagrant délit un malfaiteur. (Argot de la Police municipale)

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

vendredi 11 juillet 2014

Les perles de l'Amérique (1)

Parfois, et même assez fréquemment en vérité, l'Otto que je suis aime aller à baguenauder dans divers pays, histoire de découvrir leurs attraits supposés ou réels. Il y a peu, en mai dernier pour être précis, ce sont les Etats-Unis que j'ai explorés. Un long et beau voyage. Mais, pour venir encombrer les pages de notre cher Tenancier, je ne raconterai pas ma vie, je vous épargnerai le "road trip" entre Chicago et Austin, le festival de rock psychédélique ou les aspects factices d'Hollywood. Parce que l'un des plus beaux moments de ce voyage a eu rapport avec les livres. À ma grande surprise : mes amis à Los Angeles nous avaient proposé (à ma douce et à moi) de visiter le Huntington Garden. Un endroit absolument fabuleux, avec des jardins japonais, chinois, des bonsaïs, d'immenses étendues boisées ou fleuries et, surtout un incroyable jardin (plus de dix hectares, quand même…) de cactées, de toutes les couleurs, formes, tailles, un endroit totalement hors du temps, comme un paysage extra-terrestre.
 

1
A l'abri d'un kiosque du jardin chinois,
une musicienne joue un air traditionnel

2

La surprise, j'y viens, c'est qu'au beau milieu de cet immense parc se dresse l'une des bibliothèques les plus fascinantes qu'il m'ait été donné de visiter. (photo n°4).
En lui-même, le bâtiment n'a rien d'impressionnant, ni de l'extérieur, ni à l'intérieur (photo n°5). Mais ce sont les ouvrages exposés qui coupent le souffle, alors que, pourtant, seule une centaine des plus de neuf millions de volumes (!) que contient la bibliothèque sont exposés au regard du public. Mais quels volumes !


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Dans une première salle se trouvent des ouvrages "classiques", en premier lieu une bible de Gutenberg (photo n°6), une édition de 1521 du Passional Christi und Antichristi de Martin Luther (photo n°7), une édition du début du XVe siècle du Livre des heures (photo n°8), une originale des œuvres de William Shakespeare (photo n°9), un manuscrit de Jack London (photo n°10) (qui côtoyait du reste un "tas de cendres" du même : un manuscrit qu'il avait mis dans le coffre d'une banque parce qu'il craignait les incendies qui détruisaient régulièrement les maisons en bois du coin où il vivait – et c'est la banque qui a brûlé…) et de multiples autres volumes pour la plupart dotés d'enluminures somptueuses (photo n°11) (j'ai "intelligemment" oublié de noter le titre de ce livre…).


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Une seconde salle est pour sa part réservée aux ouvrages scientifiques et médicaux au fil des siècles. On peut ainsi y voir une édition de 1279 du Grand livre de Ptolémée (photo n°12), une originale de 1609 de l'Astronomia Nova de Johannes Kepler (photo n°13), un Arabum medicorum principis d'Avicenne de 1595 (photo n°14)… Et un immense espace est réservé à Charles Darwin, où figurent plusieurs dizaines d'éditions différentes de son Origine des espèces (photo n°15).


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Le plus ahurissant, dans toute cette richesse culturelle et historique, c'est dans un vague couloir dirigeant vers la sortie qu'on le trouve : alors que tous les autres ouvrages sont protégés sous verre, trône dans ce passage un volume de l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, feuilletable à loisir ! (photo n°16) Certes, comme me l'a fait remarquer à juste titre notre cher Tenancier, cette encyclopédie n'est pas rarissime et un livre doit "vivre". Mais quand même ! Un ouvrage de 1765 dont tout un chacun peut tourner les pages à volonté, ça ne se voit pas partout. Et c'est plutôt émouvant.
Et l'endroit est absolument à voir pour qui se rend à Los Angeles. Absolument !
 
Otto Naumme
 
NB : le lecteur pardonnera la piètre qualité des photos, prises sans flash dans un souci de respecter ces ouvrages. Et non traitées avec un logiciel de retouche, parce que je suis un flemmard.

Gabarit

Gabarit : Mesure. Cette femme-là, c'est mon gabarit.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

mercredi 9 juillet 2014

Quand culture rime avec censure (Mise à jour)

Pourquoi s’embêter à rédiger soi-même un billet sur l’éviction brutale d’Alain Veinstein de son émission sur France Culture alors que George WF Weaver, sur son blog en avait fait un qui résumait parfaitement la situation ? Le voici in extenso avec sa permission, précédé d’un appel à pétition dont George est également à l'origine...

Mise à jour du 9 juillet : Si l'émission n'a pas été diffusée sur les ondes de France Culture, sa direction a néanmoins choisi de la mettre à la disposition de l'auditeur sur son site avec une "justification" de la part de celle-ci. Vous pouvez donc l'écouter ici.

Auditeurs de France Culture depuis plusieurs années, nous sommes de plus en plus consternés par la baisse régulière du niveau de cette chaîne, qui ne produit quasiment plus de culture radiophonique ni ne s'attache à recueillir les témoignages de grands acteurs de la culture du siècle présent ou passé mais se borne, au mieux, à faire la promotion de spectacles culturels ou d'ouvrages littéraires liés à l'actualité, en réduisant l’essentiel de ses programmes à de simple entretiens dépourvus d'intérêt autre que conjoncturel.
L'un des derniers artisans de l'âge d'or de France Culture (des années soixante-dix à la fin des années quatre-vingt-dix), qui n'avait pas peu contribué à forger l'esprit vivifiant et créatif de cette époque, vient d'être "remercié" sans ménagements par la direction de France Culture : il s'agit d'Alain Veinstein, encore producteur de l'émission "Du jour au lendemain" (minuit-minuit trente en semaine), qui en 2009 s'était déjà vu sèchement signifier la suppression de sa tranche 22h-minuit, "Surpris par la nuit" (anciennement "Nuits magnétiques", depuis 1979).
Certes, "Du jour au lendemain" est une émission consacrée à l'actualité littéraire, mais ce n'est jamais celle des têtes de gondoles, et surtout la manière inimitable dont Alain Veinstein conduit ses entretiens — tout en suggestions feutrées et n'hésitant pas à laisser grande part aux silences productifs de l'interlocuteur — en fait un exercice de création de haute voltige à part entière.
Prenant acte de cette décision unilatérale, justifiée selon la direction de la chaîne par la nécessité de laisser la place aux jeunes générations, Alain Veinstein avait décidé de conduire seul sa dernière émission, dans la nuit du 4 au 5 juillet 2014.  
Las ! Une heure avant la diffusion, un mail du directeur de la station, Olivier Poivre d'Arvor, a averti le producteur que son enregistrement ne serait pas diffusé — et de fait il fut remplacé par la rediffusion d'un numéro consacré au prix Goncourt 2013, sans aucun égard ni prévention à l'endroit des auditeurs déjà prévenus de cette émission testamentaire.  
Sans nous faire trop d'illusions sur l'éventuelle réintégration d'Alain Veinstein dans l'équipe de producteurs de la chaîne, nous réclamons à tout le moins la diffusion de cette dernière émission, qui pour l'instant se trouve accablée, ultime outrage, sous le boisseau d'une chose qui ne porte qu'un nom : "Censure".

Pour la pétition, suivez ce lien ci-après :


Signer la pétition : Contre la suppression de Du jour au lendemain, le limogeage d'Alain Veinstein, et les dérives de...

On a appris avec pas mal de dépit voici une dizaine de jours, par un entrefilet dans Télérama, que l'un des derniers piliers historiques de France Culture, un de ceux qui avaient contribué à forger l'esprit des années d'or de la chaîne (1975-1999), Alain Veinstein, était limogé sans ménagement : l'émission Du jour au lendemain  qu'il avait enfantée voici presque trente ans, en septembre 1985, ne sera pas reconduite à la rentrée 2014.
Pourquoi ?
La direction avait d'abord avancé des raisons d'âge — Veinstein approche les 72 ans, l'âge de la momification, non ? et sans doute sur le point de sucrer les fraises — mais en fait, non (sans doute s'est-on rappelé que Juppé compte se présenter en 2017 ?), question de budget : contraction l'an prochain.
Bon sang mais c'est bien sûr ! d'autant que deux micros dans un studio avec un technicien aux manettes, c'est sans doute l'émission la plus coûteuse de cette chaîne qui ne regarde pas à la dépense lorsqu'il s'agit d'envoyer des journalistes à l'autre bout du monde pour des émissions spéciales !
Coup de pute sur le gâteau : Veinstein, apprenant cette poignarderie à la Iago, modifie la programmation de l'émission de la nuit du 4 au 5 juillet — qui sera donc la dernière — pour proposer un ultime opus, seul pour la deuxième fois en 29 ans (la première, c'était ici, magnifique hapax).
Mais il a commis l'erreur d'annoncer la chose dans un billet de présentation de l'émission, ceux de la haute ont fait dans leur froc et nous ont balancé en lieu et place une banale rediffusion rassurante, sans bien évidemment rien annoncer aux auditeurs plus attentifs qu'attentistes — « Rien à branler de ces connards d'oreilleux ! », doit-on se dire dans les sphères de la Maison Ronde…
Allez boum ! Censure directe, à sec avec du sable !
Bon, pfff…, encore une histoire lamentable qui témoigne de la beauté fulgurante de notre époque ; rien à ajouter en fait à ce qu'a déjà bien mieux dit l'ami Fañch sur son excellent blogue (et l'on peut aussi se rapporter à ce fil de discussion).

Mais fouchtra ! il va sacrément me manquer, ce passage du jour au lendemain, et ces « Mmmh » qui suggéraient tout !
——————

En complément, l'article d'Amaury da Cunha paru dans Le Monde daté 6-7 juillet 2014 :

C'était un rendez-vous nocturne, incontournable pour les amateurs de littérature, de radio, de silences et de confidences. A minuit, sur France Culture, du lundi au vendredi, depuis 1985, Alain Veinstein incarnait la voix intime de l'intervieweur dans son émission « Du jour au lendemain ». Petite musique de jazz en préambule, lecture d'un extrait de l'auteur invité, l'échange pouvait commencer. Vendredi 4 juillet, cette aventure s'est achevée. Avec une voix suave et mélancolique, Alain Veinstein, homme de radio, mais aussi poète, prenait son temps. Pas question de précipiter ou de provoquer artificiellement les choses. Dans son studio feutré de la Maison de Radio France, il a reçu 6 800 écrivains, des plus notables (Marguerite Duras, Pascal Quignard…) aux plus confidentiels. Parce qu'il inspirait la confiance et l'amitié, il a réussi à convaincre les plus secrets d'entre eux – comme Louis-René des Forêts – à s'entretenir avec lui. Car, dans ce face-à-face, il ne se posait jamais en critique dépositaire d'une quelconque autorité littéraire. Il restait à l'écoute, à distance ; sans jamais vouloir prendre le dessus sur l'échange. «A la radio, l'exigence se partage entre l'autre et soi. On n'imagine pas le trapéziste sans le porteur », écrivait-il récemment sur Twitter. Quant à sa technique d'intervieweur, elle reposait sur des questions qui plaçaient toujours l'écriture sur le fil de la vie, mais aussi sur des silences, comme des « amorces de réponses », selon les mots de son ami Yves Bonnefoy. Fin juin, la direction de France Culture a décidé de mettre fin à l'émission pour des raisons de restrictions budgétaires. « Ce fut un coup brutal, mais je m'y attendais, explique Alain Veinstein. L'an dernier, on m'avait déjà souligné mon âge. Encore un an, monsieur le bourreau, avais-je demandé ! » Pour sa dernière émission, à 71 ans, Alain Veinstein avait choisi d'être seul, face à lui-même. Comme s'il reprenait la parole après l'avoir donnée aux autres pendant toutes ces années. Vendredi, à minuit, dans une émission préenregistrée, on aurait dû entendre les derniers moments de « Du jour au lendemain », rebaptisé pour la circonstance en «  Du jour sans lendemain ». Pendant les trente-cinq minutes de cet enregistrement, Alain Veinstein se lançait dans un étrange et émouvant monologue : fustigeant la violence du monde de la radio, tout en rendant hommage à ces grands moments de conversations enregistrées.
« Censure rare à la radio » C'est un homme brisé qui s'est exprimé, soudain privé de ce rendez-vous de minuit qu'il avait fini par identifier à sa propre vie. Mais, une heure avant la diffusion de cette émission, Alain Veinstein a reçu un mail d'Olivier Poivre d'Arvor, le directeur de France Culture, lui expliquant qu'elle n'aurait finalement pas lieu : « Nous avons écouté l'émission de ce soir, et nous avons décidé de ne pas la diffuser. (…) Outre qu'elle ne correspond en rien à l'objet de ton émission, elle ne te rend pas hommage. Trente-cinq minutes de récits subjectifs, et de discussions internes ne regardent en rien l'auditeur. » Pour Alain Veinstein, stupéfait, cette décision est un choc supplémentaire : « Une telle censure est rarissime à la radio, confie-t-il. Je n'ai rien fait de mal, je n'ai fait que tirer un trait sur vingt-neuf années d'émissions. »

Et un extrait de la dépêche AFP du 5 juillet :

France Culture a fait valoir que la radio « s'était entendue avec Alain Veinstein sur l'arrêt de son émission depuis plus d'un an » et que « ce dernier avait accepté le principe d'un nouveau rendez-vous annuel de 40 émissions pour la grille d'été » de 2015. « Nous en étions à convenir des modalités de cette nouvelle collaboration quand Alain Veinstein a choisi de rompre le contrat et de transformer la dernière émission de Du jour au lendemain — censée accueillir un écrivain — en un monologue de 35 minutes sur sa propre situation professionnelle », ajoute la station. « Une radio de service public n'est ni une antenne privée, ni le lieu de plaidoyer pro-domo, et ce pas plus pour Alain Veinstein que pour aucun d'entre nous (...). Assurer le renouvellement des générations à l'antenne, c'est aussi conforter l'avenir de France Culture », poursuit-elle.
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Pour ceux qui veulent réécouter les émissions d'Alain Veinstein, incitons le lecteur à se transformer en auditeur attentif en consultant
cette adresse...

Les assiettes de Picasso

Continuons notre jeu estival.
Puisque certains de nos lecteurs sont adeptes de la contrepèterie, nous allons simplement demander à qui appartient cette citation :

Je préfère subir les assauts des pique-assiettes que les assiettes de Picasso.

Le Tenancier n'est pas loin de partager cet avis...

Une historiette de Béatrice


La dame avec sa tenue griffée et sa bague « mon revenu annuel » passe 20 minutes à me détailler les défauts du livre ancien qui l’intéresse. Ah la la quel dommage, le relieur va me coûter plus cher que le livre. Et oui madame.
Je reste ferme, avec le sourire.
Ses 15€ elle me les a réglés avec son reste de monnaie, en comptant à voix haute, il me manque un euro, pièces jaunes, il me manque 20 cents.
Pas de cadeau, et mon plus beau sourire. Je suis de bonne humeur.

 Cette historiette a été publiée pour la première fois en septembre 2011 sur le blog Feuilles d'automne

Eau à ressort

Eau à ressort : Siphon à l'eau de Seltz.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

lundi 7 juillet 2014

Enigme

Puisque ce sont les vacances, on ressort les jeux.
Et comme nous sommes en quelque sorte un salon aimable fréquenté par de gentes personnes, nous allons verser dans la distraction d'ancien régime, comme les énigmes.
Celle-ci est de Voltaire :
Cinq voyelles, une consonne
En français composent mon nom
Et je porte sur ma personne
De quoi l'écrire sans crayon.
Bien évidemment, elle est fort réputée et le Tenancier demande à ceux qui la connaissent de réfréner leur ardeur jusqu'à demain soir pour en donner la clef...

samedi 5 juillet 2014

Une historiette de George

Une petite dame assez mal fagotée me demande :
— « Dites voir, combien vous achetez le genre de livres que vous avez là, sur les étagères juste derrière vous ? parce que j'en ai tout un tas chez moi et il faut que je fasse de la place.
— Ah, vous parlez de la Bibliothèque de La Pléiade ? Eh bien, ça dépend de l'état et des auteurs : disons qu'en général, c'est entre dix et quinze euros pièce.
— Parfait, dans ce cas je reviendrai demain vous en apporter. »

Le lendemain, en effet, la dame revient, traînant un caddie de marché empli à ras-bord… de «Sélection du Reader's Digest» cartonnés.