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mardi 6 septembre 2016

Robida, l'Exposition universelle de 1900 et la Gazette du Vieux Paris


Il n’aura peut être pas échappé aux rescapés qui fréquentent encore ce blog la petite série bibliographique autour de la Gazette du Vieux Paris publiée ici même, chronique bien laconique puisqu’on s’est contenté de présenter le premier plat de chacun de ces fascicules. Seul le titre donnait une indication du contenu, et seul le « tag » en fin de billet vendait la mèche en délivrant le nom de Robida. Il est temps ici d’en dire plus, et d’en dire beaucoup… L’Exposition universelle de 1900 à Paris est l’occasion pour Albert Robida, célèbre illustrateur et humoriste, de réaliser un projet qui semble lui tenir à cœur : reproduire le vieux Paris sur l’île de la Cité. Cette idée éclot à l'occasion de l'Exposition universelle... Toute une portion de la Seine lui est consacrée, très exactement sur le quai Debilly (actuellement : avenue de New York), entre la passerelle Debilly et le pont de l’Alma. Cette reconstitution pittoresque mérite qu’on y regarde de plus près :
« Sur le quai Debilly, en partie sur la berge et en partie sur la Seine, entre le pont de l’Alma et la passerelle des Armées de terre et de mer se déroulent sur près de 300 mètres d’étendue les constructions du Vieux paris. Situé en face des palais divers du Champ-de-Mars, il présente au regard une longue file de monuments et d’édifices, projetant dans le ciel et reflétant dans la Seine des tours, des tourelles, des clochers et des clochetons étagés par-dessus les toits. Le Vieux Paris est une véritable petite ville, couvrant un espace de 6 000 mètres, divisée en trois quartiers principaux, sillonnés de rues et coupés de places, et présentant une sorte de synthèse pittoresque, vivante et grouillante, non d’une époque déterminée, mais de la vie d’autrefois, depuis la fin du XVe siècle jusqu’à la fin du XVIIIe.
[…]
Le Vieux Paris, qui compte parmi les attractions de l’Exposition universelle, est dû à l’initiative d’un écrivain et d’un artiste très connu, M. Robida, qui en a dessiné les plans. Il a eu pour collaborateurs dans son œuvre les architectes MM. L. Benouville, Beitz, Vilain, Gombert, Klinka, de Vlastimil, l’architecte paysagiste M. Martinet, et un grand nombre d’artistes : MM. Leemans, Lecourt, Cardona, Béra, Richard, Mme Émilie Robida, etc. M. Robida à publié sur le Vieux Paris une suite de planches in-folio, avec une notice (1900) »
( Le Vieux Paris, par H. Castets, in : « L’Exposition Universelle de 1900 », (p. 387) ) — Revue encyclopédique 1900.)
Quelques attraction ponctuent la visite, un compte-rendu d’époque (même source que précédemment) nous donne quelques indications :
« En dehors du Vieux Paris, au quai Debilly, les berges de la Seine sont vierges d’attractions. Il y a bien les sous-sols des palais des puissances étrangères, rue des Nations (quai d’Orsay), mais ce sont surtout prétextes à boire, et, jusqu’à nouvel avis, les spectacles qu’on y produit ne sont pas d’un art très relevé.
Reste le Vieux Paris, dont le programme forme, à lui seul, une des exhibitions les plus importantes de l’Exposition.
Le Vieux Paris a été conçu par MM. Arthur Heulhard et Robida. Tous deux l’ont réalisé, et on peut dire que depuis longtemps les constructions du quai Debilly, si malaisées à l’origine et d’extérieur si pittoresque, n’ont cessé de piquer la curiosité publique.
Prix d’entrée : 1 fr. dans la journée ; 2 fr. dans la soirée. Le vendredi : 2 fr. et 4 fr.. le dimanche 0 fr. 50 et 1 fr.
Mais, pas d’illusions : les expositions et spectacles divers qu’on peut voir dans l’enceinte du Vieux Paris, ne s’ouvrent que moyennant de nouvelles finances. »
( Les Attractions : Berges de Seine, par L. Vernols, in : « L’Exposition Universelle de 1900 », (p. 387) Revue encyclopédique 1900.)
On le constate, l’entreprise est colossale, elle rencontre un joli succès. Non content de mener à bien ce projet, Robida renchérit par la publication des planches évoquées ci-dessus. Elles ne concernent pas directement l'attraction du Vieux Paris et couvrent une période plus large puisque nous débutons la série par l’époque gallo-romaine — pour notre plus grand regret d’ailleurs, car nous aurions bien voulu voir la verve de Robida s’exercer sur la Préhistoire — jusqu’à Bonaparte. Là aussi, les collaborations abondent et on rencontre nombre d’écrivains « arrivés » (beaucoup occupent largement le catalogue Lemerre…) qui se prêtent parfois avec humour et malice à l’évocation du Paris de l’ancien temps. La liste des collaborateurs ci-dessous suffit à nous convaincre :

http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/04/gazette-du-vieux-paris-n-1-numero-gallo.html
1. Numéro gallo-romain

Jules Verne : L'origine de Paris
Henri Lavedan : Les arènes de Lutèce
Edmond Haraucourt : Lutèce


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/04/gazette-du-vieux-paris-n-2-numero.html
2. Numéro mérovingien

— Jules Claretie : Facétie mérovingienne
— Jules Verne : Paris capitale
— Henri de Bornier : Le Soufflet
— Adolphe Brisson : La Chanson de Dagobert
Anonyme : Portrait d'Attilla


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/05/gazette-du-vieux-paris-n3-numero.html
3. Numéro carolingien

— François Coppée : Le fils des armures
Auguste Dorchain : Paris en 887
Eginhard : Portrait de Charlemagne
Grosclaude : La Saint Charlemagne


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/05/gazette-du-vieux-paris-n-4-numero-saint.html
4. Numéro « Saint-Louis »

— Émile Bergerat : Le chêne de Saint-Louis
— José Maria de Hérédia : Les Croisés
— Pierre Loti : Au pays des Croisés
— Sergines : La légende de la Sainte-Chapelle


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/05/gazette-du-vieux-paris-n-5-numero-xive.html
5. Numéro « XIVe siècle »

— Albert Robida : L'Affaire de la Tour de Nesle


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/05/gazette-du-vieux-paris-n-6-numero.html
6. Numéro « Jeanne d'Arc »

— Jules Lemaître : Sans titre
— Jean Aicard : La bergère de Domrémy
— Joseph Fabre : La délivrance d'Orléans
— François Coppée : Le procès et le supplice de Jeanne


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/05/gazette-du-vieux-paris-n-7-numero.html
7. Numéro « Rabelais »

— Armand Silvestre : Sans titre
— Anatole France : La maison de Rabelais
— Jean Richepin : Ballade
— Henri Lavedan : La Parisienne sous François 1er



http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/07/gazette-du-vieux-paris-n-8-numero-henry.html
8. Numéro « Henry IV »

— Sully : Portraict du Roy
— Émile Faguet : Henry IV et d'Aubigné
— Sergines : Le Vert-galant
— Henry IV : Madrigal-chanson
— Georges d'Esparbès : Le siège de Paris
— Jules Claretie : Au tombeau de Gabrielle
— André Theuriet : L'esprit et le cœur du Roy
— Auguste Deslinières : Indulgence d'un confesseur envers son pénitent
Anonyme : La vraye recette de la poule au pot


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/07/gazette-du-vieux-paris-n-9-numero.html
9. Numéro « Théophraste Renaudot & Richelieu »

— Adolphe Brisson : Théophraste Renaudot
— Henry Lavedan : La parisienne au tems de Louis XIII
— Gustave Larroumet : Le Cardinal de Richelieu
— Gabriel Hanotaux : Paris en 1614


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/07/gazette-du-vieux-paris-n-10-numero.html
10. Numéro « Molière & Louis XIV »

— Ferdinand Brunetière : La jeunesse de Molière
— Émile Bergerat : Molierolaterie
— Émile Faguet : La jeunesse de Louis XIV
— Albert Vandal : Louis IV vengé par Molière


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/08/gazette-du-vieux-paris-n-11-numero.html
11. Numéro « Régence & Louis XV »

— Henri Lavedan : Un souper sous la Régence
— Georges d'Esparbès : La Charge fleurie
— Jules Claretie : Les protégés de la Pompadour
— Sergines : Le Vocabulaire de Madame Du Barry


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/08/gazette-du-vieux-paris-n-12-numero.html
12. Numéro « Louis XVI »

— Séverine : Le jeton de la Reine
— L. de Fourcaud : Plaisirs de reine
— Gustave Larroumet : À Versailles
— Victor Margueritte : La Ménagerie
— Victor Margueritte : Les Trois Fontaines
— Adolphe Brisson : Roman d'amour


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/08/gazette-du-vieux-paris-n-13-numero.html
13. Numéro « révolutionnaire »

— Anatole France : Physionomie de Marat
— Henry Fouquier : Les femmes et la Révolution
— Edmond Haraucourt : La guillotine
— Jules Lemaître : Les hommes de la Révolution
— Victorien Sardou : Les hommes de la Révolution
— Émile Bergerat : Les hommes de la Révolution


http://zetenancierisbaque.blogspot.fr/2016/08/gazette-du-vieux-paris-n-14-numero.html
14. Numéro « bonapartiste »

— Paul Deschanel : Bonaparte amoureux
— Gustave Larroumet : Critique de Joséphine
— Émile Faguet : Défense de Joséphine
— Maurice Barrès : Un professeur d'énergie
— Edmond Haraucourt : L'oiseau de France



(Vous pouvez cliquer sur les images pour avoir plus de détails...)

Le numéro consacré à la Tour de Nesle est certainement le plus recherché par les amateurs car s’y déploie toute la verve de Robida, forcé dans les autres fascicules à quelques illustrations contraintes…
Chaque numéro comporte une présentation, un papier et une typographie différents, le paroxysme du raffinement se trouvant, à notre avis, dans le numéro « Jeanne d’Arc », avec sa calligraphie gothique et son papier simili parchemin. D’autres papiers, teintés  ou non, présentent des textures et des grains différents. Le format est à peu près de 22 cm sur 30,5 cm (c'est-à-dire 44 x 30,5 cm, plié en deux, ce qui fait quatre pages). Le descriptif de la plupart des libraires annoncent un format in-folio, chose admissible à condition que les feuilles n’aient pas été rognées. L’hétérogénéité des papiers, et donc des moulins fournisseurs, laisse à penser à des formats originels en effet différents, les bords de chaque fascicule étant rognés de façon nette. Néanmoins on peut supposer des formats similaires, à quelques centimètres près. Pour ce qui concerne le type d’impression, on se déclare hors du coup. Et si un amateur éclairé passe par ici, nous lui réservons toute la place qu’il veut pour nous corriger et nous amender (A-t-on affaire, par exemple à de la lithographie, de la xylogravure ?). Les quatorze fascicules se retrouvent ordinairement dans un étui (que nous ne possédons pas et donc que nous ne pouvons honnêtement décrire) et une notice (que nous ne possédons pas non plus). Chaque numéro paraissait tous les quinze jours.


Laissons la parole à Christine Luce qui participe au très intéressant blog L’Amicale des amateurs de nids à poussière et qui a évoqué dans un recueil l’existence de la Gazette du Vieux Paris :
« Enfin, Au Grand Coq [Donc, au sein de l'attraction du Vieux Paris, (note du Tenancier)], la maison de Renaudot, Albert Robida a installé l'ultime pièce de son puzzle temporel, la Gazette du Vieux Paris, publiée par l'éditeur Baschet, ou plus précisément par les Annales Politiques et Littéraires, et vendue à l'enseigne des Trois Écritoires. C'est de ce bureau que seront publiés les quatorze bulletins de la gazette spéciale, une rétrospective autant dans la forme que dans le fond puisque chacun emprunte une écriture différente depuis le manuscrit jusqu'à l'impression moderne mais également des types de papier varié, adapté au siècle que les textes représentent. Non content de produire une aventure du papier et de la littérature, ces quatorze numéros, que l'acheteur heureux pourra contenir dans un fourreau « antique », sont rédigés avec les talents de célèbres écrivains. François Coppée, Edmond Haraucourt, Maurice Barrès, Pierre Loti, etc. mais aussi Jules Verne, qui y rédigent des imitations et des calembredaines enluminées, illustrées à la plume ou gravées sur bois par Albert Robida et son fils Frédéric. Le journal paraît tous les quinze jours et présente aussi le programme quotidien des théâtres, concerts et attractions. »
(1900 - Albert Robida à l’Exposition Universelle, par Christine Luce, in : « Paris, une physionomie », dir. Alexandre Mare — Les Moutons électriques (2013)
Notons là une erreur vénielle : il n’y a nulle rubrique pour insérer dans ces parutions le programme quotidien des attractions, etc. À tout le moins, on y trouve une réclame pour les Annales politiques et littéraires et mentions brèves de quelques attractions (et cela sur deux ou trois numéros, seulement). C’est que la place manque !
On a peu parlé du contenu. Il est anecdotique, à plusieurs sens. Si les auteurs présents n’ont livré aucun texte essentiel, cela reste néanmoins dans le ton de leur production habituelle, un Coppée demeurant toujours plus rasoir que la bonhomie désormais compassée d’un Anatole France. L’évocation historique et l’anecdote y ont large part. Encore une fois, on s’arrêtera au cinquième fascicule consacré au XIVe siècle et où Robida évoque l’Affaire de la Tour de Nesle sous l’angle (déjà !) de la presse à scandale. Rien que pour cela (mais le passionné de Verne qu’est le Tenancier y trouve son bonheur également) ces quatorze fascicules méritent que l’amateur se les procure. Suivant l’état on peut les obtenir à un prix oscillant entre 100 et 300 €.  Bien sûr, c’est un coup de sonde superficiel sur le net, et vous pouvez avoir de la chance…
(Merci à Christine Luce de nous avoir communiqué son texte !)