Accordéon : Chapeau gibus. Il se replie et s'allonge comme l'instrument de ce nom.
dimanche 12 février 2017
samedi 11 février 2017
Une historiette de Béatrice
jeudi 9 février 2017
Carnet permanent du livre
ArD et le Tenancier, ici, inaugurent une nouvelle page qui
réapparaîtra
au gré de ses ajouts. Il s’agit ici d’une recension de sites qui
évoquent les techniques du livre. On enjoint nos lecteurs à nous
suggérer (dans les
commentaires) tout lien menant vers la typographie, la codicologie, la
bibliophilie, etc. Chaque ajout (après vérification) sera l’occasion
d’une remise en avant de ce billet qui le sera de toute façon
périodiquement,
histoire de ne pas le perdre de vue...
Derniers ajouts : La part de l'ange & Pointypo (typographie), Reliure et autres explication à Trôo (Reliure)
Derniers ajouts : La part de l'ange & Pointypo (typographie), Reliure et autres explication à Trôo (Reliure)
CODICOLOGIE
— CODICOLOGIA
Essentiellement tourné vers le manuscrit ancien. Comprend un glossaire.
ORTHOTYPOGRAPHIE
— ORTHOTYPOGRAPHIE
Lexique des règles typographiques françaises.
RELIURE
— RELIURE ET AUTRES EXPLICATIONs À TRÔO
Journal de bord d'une artisan-relieur.
TYPOGRAPHIE
— LES BIBLIOTHÈQUES DE L'ÂGE DU PLOMB
Regroupe des catalogues de fonderies et des ouvrages traitant de la typographie.
— LA PART DE L'ANGE
Autour du graphisme et de la typographie.
— POINTYPO
Actualité de la typographie et du graphisme.
Merci de signaler les liens morts
Ronde de nuit
Lundi
Propre
sur lui, rillettes sous le bras, c'est le matin. Ça sent le sabot de
frein qui chauffe, qui chauffe, le crescendo du moteur électrique, le ding ding
du départ, le claquement des portières. Le banc en bois à cette couleur
blonde d'un été perpétuel dans les souterrains. La rame Sprague avec
quelques à-coups s'enfonce dans la bouche du tunnel.
Chapitre ICela avait commencé un matin de juillet. Le soleil s'était levé tôt dans la brume matinale, et les pavés humides fumaient déjà un peu. L'air, dans les rues, était stagnant, sans vie, et sentait le renfermé. Il venait de faire un mois épuisant, un mois de chaleur intense, de cieux arides et de vents chauds, chargés de poussières.(James Hadley Chase : Pas d'orchidées pour Miss Blandish)
Retour
le soir, hâve, derrière la vitre au verre soufflé légèrement déformé
dans les coins. Somnolence... le voisin sent le rance.
Mardi
Bruit
de raclement de la tirette juste à hauteur des oreilles, sur le banc au
dossier bas, couleur prune, "plaisir d'offrir, joie de recevoir" :
bruit de graviers dans la boite en fer blanc de Pastilles des Vosges. La
rame arrive avec une voix de basse qui se transforme en un sombre
hululement au moment du freinage.
Chapitre premierEn amorçant la descente de Bicêtre, j'ai levé le pied, pas mécontent. A ma vue, les lueurs de la place d'Italie scintillaient déjà.
De 120 l'aiguille du compteur a décliné vers les allures honnêtes, pour se fixer à 80, vitesse qui peut à quatre plombes du mat' s'admettre chez un homme pressé, et risque rarement d'induire le motard désœuvré en tentation de courette.
(Albert Simonin : Grisbi or not grisbi)
Le
soir, sous les yeux, à une quinzaine de centimètre des yeux, un France
Soir comme un mur : photos, manchettes, strips, faits-divers. Les frères
Aranci arrêtés, héroïne, ou alors Paul Leca, la Bégum, l'air des
bijoux. Terminus. Sirène.
Mercredi
Sol noir avec des reflets de mica, carrelage oblong blanc biseauté. Cabane du chef de station au centre du quai.
On
lève les yeux : "Aux utiles de cul", les places numérotées, oui...
Arrêt au milieu du tunnel, contre une bande rouge qui marque les limites
d'un canton sur cette portion de ligne. Du moins le pense-t-on.
ISommeil du petit jour ; le plus profond.
Perdue au fond du lit à couette, elle mit du temps à émerger. On tambourinait et on l'appelait.
- Annette !... Annette, réveille-toi !
La voix de sa mère. Et, de nouveau le tambour contre la porte de sapin.
- Oui !
Elle alluma à la poire du lit, se leva, ouvrit.
- Les gendarmes, dit la mère.
- Quoi ?
- Ils sont en bas. Il veulent te parler, à toi.
- A moi ? Qu'est-ce qu'il y a ?
- Je ne sais pas. Il est peut-être arrivé quelque chose à André.
Coup de bélier dans les veines. Annette passa machinalement sa robe de chambre... Les planches du parquet de sapin rouge craquaient à chaque pas et, dans ce chalet en location, tout sentait la résine, la fumée de bois et l'encaustique.
(Jean Amila : Noces de soufre)
Le
retour. On regarde cette grande blonde un peu chevaline. On fait ses
plans pour l'aborder. On rêve de lui ramasser son sac bousculé jusqu'au
sol par un virage un peu trop rapide de la rame. Mais on n'ose même pas
lui céder sa place...
Jeudi
Dubo
Dubon Dubonnet - Dubo Dubon Dubonnet - Dubo Dubon Dubonnet - Dubo Dubon
Dubonnet - Dubo Dubon Dubonnet - Dubo Dubon Dubonnet - Dubo Dubon
Dubonnet - Ça, c'est Paris !
Chapitre premierHank comptait l'argent empilé devant lui. Le gros paquet. Cent cinquante billets tout neufs de dix dollars. Il dévisagea Jackson d'un oeil jaune et froid.
- Tu m'en donnes quinze piles, c'est bien d'accord ?
Il tenait à mettre les choses au point. les affaires sont les affaires;
C'était un individu de petite taille, soigné de sa personne, brun de peau, le teint brouillé, le cheveu rare et aplati. Très "homme d'affaires".
- Exact, répondit Jackson. Quinze cent dollars.
Très "homme d'affaires", lui aussi.
(Chester Himes : La reine des pommes)
Soir.
Fini. La semaine s'arrête ici, au milieu de gosses et de leurs parents.
C'est jeudi. C'est jeudi soir. Demain il part une semaine au pays. Il
ne sait pas encore ce qu'il va emporter à lire dans le train.
La rame
s'arrête : Porte Champerret, la nuit, les réverbères jaunes et le
crachat noir de l'échappement d'un autobus à plate-forme à la hauteur de
la bouche de métro...
(Billet paru sur le blog Feuilles d'automne en mars 2009)
mercredi 8 février 2017
Académicien
Académicien : Littérateur
surranné. — Injure inventée par les romantiques échevelés de 1830 qui
avaient pour principaux adversaires les membres de l'Académie français
restés fidèles au genre classique. On ne se doute plus aujourd'hui de
la fureur grotesque qui animait les deux partis. V. Mâchoire.
Et cet exemple, des plus curieux, donnera une idée des luttes dans lesquelles on se jetait à la tête le mot d'académicien. Nous le prenons dans une brochure d'Alexandre Duval, académicien et chef du parti qui rendait M. Victor Hugo responsables des passions romantiques.
« Ce que je rapporte ici, je l'ai vu, de mes propres yeux vu. A certaines représentations, on se trouvait environné d'hommes effryants dont le regard scritateur épiait votre opinion, et si, par malheur, votre figure indiquait l'ennui ou le dégoût, ils vous attaquaient par l'étiquette d'épicier, mot injurieux selon eux, qui signifie dans leur argot, stupide, outrageusement bête ; mais si vos cheveux étaient blanchis par le temps, alors vous étiez des académiciens, des perruques, des fossiles, contre lesquels on vociférait des cris de fureur et de mort. Je vous assure, monsieur, qu'il n'uy a rien d'exagéré dans ce tableau d'une première représentation romantique. Tout Paris vous en attestera la vérité » (De la littérature dramatique, lette à M. Victor Hugo, par Alexandre Duval, Paris, 33.)
Et cet exemple, des plus curieux, donnera une idée des luttes dans lesquelles on se jetait à la tête le mot d'académicien. Nous le prenons dans une brochure d'Alexandre Duval, académicien et chef du parti qui rendait M. Victor Hugo responsables des passions romantiques.
« Ce que je rapporte ici, je l'ai vu, de mes propres yeux vu. A certaines représentations, on se trouvait environné d'hommes effryants dont le regard scritateur épiait votre opinion, et si, par malheur, votre figure indiquait l'ennui ou le dégoût, ils vous attaquaient par l'étiquette d'épicier, mot injurieux selon eux, qui signifie dans leur argot, stupide, outrageusement bête ; mais si vos cheveux étaient blanchis par le temps, alors vous étiez des académiciens, des perruques, des fossiles, contre lesquels on vociférait des cris de fureur et de mort. Je vous assure, monsieur, qu'il n'uy a rien d'exagéré dans ce tableau d'une première représentation romantique. Tout Paris vous en attestera la vérité » (De la littérature dramatique, lette à M. Victor Hugo, par Alexandre Duval, Paris, 33.)
dimanche 5 février 2017
10/18 — William S. Burroughs : Les cités de la nuit écarlate
William S. Burroughs
Les cités de la nuit écarlate
Traduit de l'américain par Philippe Mikriammos
n° 1622
Paris, Union Générale d'Édition
Coll. 10/18
Volume sextuple
408 pages (416 pages)
Dépôt légal : mars 1984
Achevé d'imprimer : mars 1984
ISBN : 2-264-00594-7
(Contribution du Tenancier)
Index
Les cités de la nuit écarlate
Traduit de l'américain par Philippe Mikriammos
n° 1622
Paris, Union Générale d'Édition
Coll. 10/18
Volume sextuple
408 pages (416 pages)
Dépôt légal : mars 1984
Achevé d'imprimer : mars 1984
ISBN : 2-264-00594-7
(Contribution du Tenancier)
Index
vendredi 3 février 2017
« Cette catégorie de lecteurs a été fabriquée récemment par les éditeurs »
Si vous deviez
présenter ce livre à un adolescent d’aujourd’hui, que lui diriez-vous ?
Un adolescent ? En littérature je ne connais pas d’adolescent. Cette catégorie de lecteurs a été fabriquée récemment par les éditeurs. Conrad n’écrivait pas pour les adolescents, il écrivait pour tous ceux qui sauraient le lire. Celui qui quitte les livres pour enfants entre dans la littérature. Il y a une initiation, dans Au cœur des ténèbres, une initiation à la présence du Mal. Ce voyage peut se faire à treize ans comme à quatre-vingt-dix. Et si l’adolescence est le passage à l’âge adulte, alors elle n’a qu’un seul intérêt, c’est précisément d’osciller entre ce qui l’attend, le monde auquel elle va devoir prendre part, et le monde qu’elle vient de quitter, celui des livres pour enfants. Il y a une seule réalité, une seul — c’est la rencontre avec l’horrible ambiguïté de Kurtz qui nous dit : faites-moi justice.
Interview : Mathias Énard, pourquoi aimez-vous Au cœur des ténèbres.
(in : Joseph Conrad — Au cœur des ténèbres — Garnier-Flammarion)
Un adolescent ? En littérature je ne connais pas d’adolescent. Cette catégorie de lecteurs a été fabriquée récemment par les éditeurs. Conrad n’écrivait pas pour les adolescents, il écrivait pour tous ceux qui sauraient le lire. Celui qui quitte les livres pour enfants entre dans la littérature. Il y a une initiation, dans Au cœur des ténèbres, une initiation à la présence du Mal. Ce voyage peut se faire à treize ans comme à quatre-vingt-dix. Et si l’adolescence est le passage à l’âge adulte, alors elle n’a qu’un seul intérêt, c’est précisément d’osciller entre ce qui l’attend, le monde auquel elle va devoir prendre part, et le monde qu’elle vient de quitter, celui des livres pour enfants. Il y a une seule réalité, une seul — c’est la rencontre avec l’horrible ambiguïté de Kurtz qui nous dit : faites-moi justice.
Interview : Mathias Énard, pourquoi aimez-vous Au cœur des ténèbres.
(in : Joseph Conrad — Au cœur des ténèbres — Garnier-Flammarion)
mercredi 1 février 2017
Absorption
Absorption : Repas offert à la promotion ancienne de l'École polytechnique par la promotion nouvelle. On y absorbe assez de choses pour justifier le nom de la solennelité. — « L'absorption, c'est la réunion annuelle dans laquelle anciens, conscrits et antiques
fraternisent aux lueurs du punch et aux glouglous du vin de Champagne.
Elle a eu lieu le jour de la rentrée des anciens. » (G. Maillard, 66.)
mardi 31 janvier 2017
Une distraction au début de la nuit
La mémoire d'un libraire est souvent encombrée de choses inutiles.
Ce sont les charmes du métier.
Ainsi, celle du Tenancier est parfois hantée par certains titres de livres ou de nouvelles, qu'il n'a pas forcément pris la peine de lire, d'ailleurs. Saveur particulière qui s'apparente au distique, au haïku, poésie brève, saveur qui mène à imaginer parfois tout autre chose que ce qui est énoncé dans le récit. Et souvent, lorsque la rencontre s'effectue, l'on ressent comme une sorte de trahison quand ce n'est pas la plupart du temps de la déception. Quelquefois, il y a d'heureuses surprises.
Voici un bout de la comptine du Tenancier - il en garde d'autres dans un autre écrin car il n'en a pas encore épuisé les étranges saveurs :
— Les jambes d'Émilienne ne mènent à rien
— Qui livre son mystère meurt sans joie
— Violoncelle qui résiste
— Tous les morceaux de la rive du fleuve
— Donnez-moi le temps
Ce billet publié en mars 2009 sur le blog Feuilles d'automne est l'occasion de vous demander quels sont les titres qui composent votre comptine personnelle.
Ce sont les charmes du métier.
Ainsi, celle du Tenancier est parfois hantée par certains titres de livres ou de nouvelles, qu'il n'a pas forcément pris la peine de lire, d'ailleurs. Saveur particulière qui s'apparente au distique, au haïku, poésie brève, saveur qui mène à imaginer parfois tout autre chose que ce qui est énoncé dans le récit. Et souvent, lorsque la rencontre s'effectue, l'on ressent comme une sorte de trahison quand ce n'est pas la plupart du temps de la déception. Quelquefois, il y a d'heureuses surprises.
Voici un bout de la comptine du Tenancier - il en garde d'autres dans un autre écrin car il n'en a pas encore épuisé les étranges saveurs :
— Les jambes d'Émilienne ne mènent à rien
— Qui livre son mystère meurt sans joie
— Violoncelle qui résiste
— Tous les morceaux de la rive du fleuve
— Donnez-moi le temps
Ce billet publié en mars 2009 sur le blog Feuilles d'automne est l'occasion de vous demander quels sont les titres qui composent votre comptine personnelle.
samedi 28 janvier 2017
Un quart d'heure de typographie
[...] « Il accepte de donner à Manuel, non des conseils, mais des indications élémentaires sur la manière dont il faut s’y prendre pour imprimer des livres. La leçon ne dure pas plus d’un quart d’heure. Il débite très vite quelques généralités sur le plomb et l’offset, qualifiant le premier de noble et de tyrannique, le second de cochonnerie de l’avenir. Il montre ses casses, plonge les mains dans les tiroirs et joue avec les caractères : il parle de l’œil et de la graisse. Manuel ne sait pas encore, mais il va apprendre, ce qu’est le plaisir, parfois même le trouble charnel que procure le contact du plomb, son poids, sa douceur, quand il se réchauffe comme un corps vivant et pourtant résistant sous la paume : quand son toucher, insensiblement, devient caresse. FG lui montre des formes, prêtes au tirage, des lignes de linotypie, qu’il a fait composer à façon pour des livres trop importants dont il ne pouvait assurer seul la composition. Manuel ne sait pas encore, mais il va apprendre, ce qu’est une linotype, cette énorme machine à écrire aux touches innombrables larges comme des dominos, cet orgue de l’écriture où le plomb en fusion circule comme l’air dans les tuyaux de l’instrument de musique pour tomber en lignes brûlantes dans un bruit bref et déchirant d’arc électrique. Il ne sait pas encore que le bon linotypiste, comme l’organiste, connaît des moments de maîtrise et de plénitude, une jouissance incommunicable, qui l’élèvent au-dessus du commun et le rendent, pour le reste, fermé, indulgent et souverain. FG lui explique le registre et la mise, le clichage et le galvano, et les différents types de machines, les presses à plat, à cylindre et à retiration, les formats de papier et pourquoi il y a des demi-jésus et des doubles-raisins ; c’est tout juste s’il ne lui récite pas les dangers du saturnisme.
Pour finir, il lui lance un catalogue d’imprimeur, comme il existe des milliers, un de ces cahiers de spécimens et où l’on trouve, répétées à chaque page, dans tous les caractères, les corps et les graisses disponibles, la même phrase insipide et tronquée, ainsi qu’un bref mémento des signes de correction dont, pour la majorité, on ne se sert jamais.
— Avec ce qu’il y a là-dedans, vous en saurez largement assez. Rappelez-vous qu’il n’y a que trois familles de caractères, et pour faire des livres vous n’aurez à en utiliser que deux, les elzévirs et les didots, tout le reste en est plus ou moins dérivé. De toute manière, vous serez bien forcé de prendre les polices que vous trouverez chez votre imprimeur. Il y a peu de caractères vraiment laids, il n’y a que des caractères qui ne vont pas ensemble. Et aussi quelques caractères prétentieux. Rappelez-vous encore que pour les titres, comme pour les affiches, vous aurez à vous défendre de tous les imbéciles que l’on rencontre dans ce métier : ce n’est pas parce que c’est écrit gros que ça se voit.
» Maintenant, vous en savez autant que moi. Tout le reste est affaire de bon sens personnel, d’habitude et, bien entendu, d’étude attentive des devis des imprimeurs. Vous me les montrerez.
Son sourire tourne à la jubilation farceuse. Muni de ses bonnes paroles, comme d’une bénédiction, Manuel, décontenancé, se retrouve une fois de plus dans le froid de la rue déserte. Aucun de ses conseils ne lui sera d’une quelconque utilité pratique. Mais c’est pourtant à cet instant-là que Manuel devient éditeur. Trois mois plus tard, au printemps commençant, il apporte à FG un exemplaire de son premier livre.
— Je croyais, dit FG, que vous vouliez éditer de la poésie. »
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