dimanche 14 septembre 2025

Jeu


Démontrons une nouvelle fois qu’un certain cinéma dans les sixties se piquait de littérature (on l’a vu avec Visconti l’autre fois), alors que la bourgeoisie actuelle nous atterre par la viduité de ses rayonnages à travers ses productions cinématographiques. La question est simple : d’où sort ce photogramme d’un livre tenu quelques secondes auparavant par une comédienne pour laquelle nous aurions conversé avec le diable afin d’obtenir toutes les audiences auprès d'elle (surtout dans ce film !), et même plus si affinités. Hélas, de toute façon, votre Tenancier « arrive trop tard », ce qu’il se dit continuellement tant au regard de l'Histoire que certaines de ses visées érotiques.

vendredi 12 septembre 2025

Une historiette de Béatrice

— Bonjour, vous avez 2 ou 3 euros pour dépanner ? dit l'haleine surchargée d'alcool et surmontée d'un regard de poisson agonisant.
— Non monsieur, désolée.
— On peut creveeeeeeer ! crie-t-il en sortant.
Depuis une dizaine de jours, le même sketch. Exactement le même, j'ai des témoins.

jeudi 11 septembre 2025

L'odeur du mouchoir

Le Tenancier continue de s’adonner aux publications confidentielles. L’avantage réside dans le fait qu’il ennuie peu de personnes, sachant que le tirage est de 13 exemplaires et qu’à une ou deux exceptions près, ils sont destinés aux récipiendaires habituels. Diable, on a donc encore réduit l’impression. Bientôt, l’on ne fabriquera plus que du « monotype » ou du livre pauvre que l’on gardera pour soi.
Ces dernier temps, votre serviteur a été victime d’une crève qui a attaqué ses voies respiratoires, occasion idéale pour être raccord avec le présent opuscule. En effet, dans les deux cas, le Tenancier parle du nez. 


À treize exemplaires sur Marais.

mercredi 10 septembre 2025

Une historiette de Floréal

Dans les bus parisiens il y a des petits écrans horizontaux sur lesquels défilent des informations concernant le trajet, le moment du départ, etc. Hier, sur la ligne 27, défilait la recommandation suivante : « Signalez-nous tout comportement anormal. »
Autour de moi, une douzaine de personnes assises, toutes le nez et le regard plongés sur leurs téléphones mobiles. Sauf une jeune femme en train de lire un livre.
Je suis allé la signaler au chauffeur.
Le blogue de Floréal, c'est ici.

mardi 9 septembre 2025

Tableaux d'une exposition

Le blogue des éditions Flatland vient de publier un texte de votre serviteur autour de la création et l’illustration d’une de ses premières nouvelles, publiée il y a 25 ans. On y trouve l’occasion de découvrir les dessins préparatoires qui ont alimenté les vingt-cinq illustrations de ce récit très bref, édité désormais dans le recueil Fins de siècle (2024). On y rencontre le grand talent de Fabrice Le Minier.
Le blogue des éditions Flatland
Le site de l'auteur

lundi 1 septembre 2025

Le Rouge et le Noir...

À une devanture de librairie, j’ai aperçu Le Rouge et le Noir de Stendhal. L’envie m’a pris de relire cet admirable livre et je l’ai acheté. Comme le libraire avait une bonne tête, je lui ai demandé :
— Vous n’auriez pas du même auteur, Pair et impair ou bien Manque et passe ?
Et le commerçant, avec un aplomb infernal m’a répondu :
— Pas pour le moment, monsieur, mais si vous le désirez, je peux vous le faire venir.
Alphonse Allais

dimanche 31 août 2025

Averto

Le blog était en sommeil tout cet été. La faute incombe à l’impéritie du Tenancier, mais également à quelques contraintes qui le rendent moins disponible ces derniers temps. Tout de même, on va se livrer à quelques efforts, même si l’on ne garantit pas une présence assidue. On s’en voudrait de laisser ce coin en déshérence trop longtemps.

lundi 30 juin 2025

L'extracteur

En 2024, paraissait un recueil de nouvelle dystopique de votre Tenancier intitulé Charles & moi (Allez voir , histoire d'en savoir plus). L'extracteur prolonge d'une certaine manière les autres nouvelles, même si, après tout, l'on peut se demander si l'on traite du même univers... Le Tenancier n'a pas d'opinion sur le sujet. Il s'en remet au lecteur. Fabrice Le Minier illustre le texte, on aime. Pour vous procurer ce numéro 17, de la revue L'Ampoule, c'est ici. (Qu'on pardonne le ton laconique, mais il fait chaud dans la pièce de travail du Tenancier).

jeudi 26 juin 2025

Le don de Marcel Kzriboudjian


Eh oui, le Tenancier continue d'être publié dans Lard-Frit et il aime ça ! On se convertira pour une fois dans ce récit au culte du superhéros, en espérant que la nouvelle enthousiasmera les moguls hollywoodiens  et que le soussigné pourra enfin se goberger dans l'insouciance !
On aura remarqué que le même n'aura pas été bavard ces derniers temps, ce qui n'est pas le résultat d'une désaffection (Comment pourrais-je vous faire ça ?), mais d'un emploi du temps tendu. Promis, on fera des effort pour revenir rapidement.
Pour vous procurer cet émouvant numéro 11, allez donc .

dimanche 25 mai 2025

Mort d'un fabricant de posters

Le Tenancier apprend la mort de Sebastião Salgado et à cette occasion qu’il avait « donné des leçons d’humanisme » au festival photo de La Gacilly en compagnie de Sylvain Tesson. De notre côté, on déplore qu’il n’y eut point Yann Arthus-Bertrand (un habitué, pourtant) pour se joindre à ce concert de faux-derches et de faiseurs, dans ce tapinage touristique à ciel ouvert.
On incitera le lecteur de ce blogue à lire le texte de Dominique Baqué sur le magazine en ligne 9 lives au sujet du fabricant de posters.

samedi 24 mai 2025

Lecture substantielle

La typographibilité du fromage de Gruyère est une de ces questions — je m’en doutais bien — qui ne peuvent manquer de passionner tout être tant soit peu possédé de l’angoisse du demain industriel. (Si « angoisse » semble à certains un trop fort mot, mettons « curiosité » et n’en parlons plus.)
La divulgation de cette étrange aptitude du fromage de Gruyère à remplacer avantageusement la pierre lithographique m’a valu une recrudescence de communications attestant chez nos lecteurs, jointe à un courageux mépris des sentiers battus, une ingéniosité toujours en éveil.
Les grincheux, comme il fallait s’y attendre, ne manquent pas non plus, qui, devant la marche triomphale du progrès, dressent la sotte barricade de la routine et sèment sous les pas de l’idée fraîche éclose les agressifs tessons de bouteilles du plus ténébreux obscurantisme.
Haussons les épaules et passons.
Ce surtout que l’on reproche au fromage de Gruyère, comme moyen de reproductions graphiques, c’est d’abord l’inconvénient qu’il possède d’être criblé d’yeux, c’est-à-dire de trous plus ou moins volumineux, inconvénient, reconnaissons-le, bien susceptible d’arrêter un esprit moins résolu que le nôtre.
Son odeur, également, prête à mainte plaisanterie facile :
— Ce que ça fouettera, s’écrie trivialement un de nos correspondants, dans votre établissement de gruyérographie !
Des troisièmes enfin ne croient pas notre fromage capable de supporter l’énorme charge qu’entraîne l’impression sur papier :
— Des clichés métalliques eux-mêmes, objectent ces messieurs, s’écrasent rapidement à ce métier. Que sera-ce donc, avec vos pauvres quatre ronds de fromgi !...
Etc., etc., etc.
Le plus triste, c’est que toutes ces désobligeantes réflexions reposent sur un incontestable fond de vérité : oui, son odeur n’est pas de celle qu’on recherche pour le mouchoir, et oui, sa résistance aux fortes pressions est illusoire.
Au moment où, découragé de mener à bien cette intéressante entreprise, j’allais jeter le manche après la cognée, un inconnu sonnait à ma porte, un citoyen de la libre Helvétie, un grand fabricant du fromage de Gruyère.
— Bonjour, monsieur, me fit le robuste montagnard et, au nom de ma généreuse patrie, merci !
Puis le monsieur m’expliqua qu’une crise sévit sur son industrie et que, de même le Midi pâtit de la mévente des vins, de même la Suisse connaît celle non moins douloureuse du fromage de Gruyère.
— Heureusement, ajouta-t-il poliment, que vous étiez là, cher monsieur, pour empêcher la catastrophe définitive. Mais permettez-moi de vous faire remarquer que vous faites fausse route en voulant remplacer par du gruyère l’ancienne pierre lithographique. Là ne gît pas la sage solution du problème.
— Et, cher monsieur, où gît-elle, la sage solution du problème ?
— Là !
Et l’homme sortit de sa serviette une large feuille que je pris d’abord pour une feuille de papier, mais qui, je m’en aperçus tout de suite, n’était autre qu’une feuille extrêmement mince de fromage de Gruyère, d’une blancheur, d’une souplesse, d’une homogénéité parfaites ; et, de trous, pas la moindre trace.
— J’ai réalisé cette feuille en fondant du gruyère à une certaine température et en découpant le bloc ainsi obtenu par feuilles minces, grâce à un couteau mécanique qui peut débiter, à l’heure, des milliers de feuilles semblables à celle que vous avez dans les mains. Bien que d’un prix légèrement supérieur à celui du papier, ces feuilles de gruyère remplaceront facilement ce dernier, aussi bien dans la confection de livres que dans celles des journaux, car elles présenteront sur lui l’avantage une fois lues, de pouvoir servir à l’alimentation.
— Parfait ! parfait !
— Il faudra bien entendu, pour que la comestibilité en soit sans danger, qu’on emploie une encre d’imprimerie spéciale, tel, par exemple, un amalgame de truffes et de jaune d’œuf.
— Et c’est désormais que les expressions « déguster une chronique » ou « dévorer son feuilleton » pourront se prendre au pied de la lettre.
— De même qu’on pourra parler sans hyperbole de « lectures substantielles ».
Alphonse Allais