[…] Il y avait près de deux siècles
que Boccace, séjournant
au royaume de Naples, et avide de voir la bibliothèque du célèbre
monastère du
Mont Cassin, avait demandé à un moine de lui faire la grâce de la lui
ouvrir.
Il s’était entendu répondre : « Monte,
c’est ouvert. » Et
de lui montrer une longue échelle. Boccace, tout joyeux, monte :
il trouve
un local sans porte, entre, voit que l’herbe pousse entre les
fenêtres ; stupéfait, il remarque
de nombreux ouvrages d’auteurs anciens où manquent des cahiers entiers,
où l’on
a coupé les marges des pages. Pleurant de douleur, il demande au
premier moine
qu’il rencontre dans le cloître pourquoi des livres si précieux ont été
mutilés ; on lui répond que les
moines, pour gagner quatre ou cinq sous, arrachent un cahier de temps
en temps
et en font des petits psautiers qu’ils vendent aux enfants ; d’autres
avec des marges
découpées, font des bréviaires qu’ils vendent aux femmes.
Manuel de Dieguez : Rabelais par lui-même (1960)
Manuel de Dieguez : Rabelais par lui-même (1960)
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