samedi 3 juin 2017

Un écrivain moderne ?

Il y a une étonnante franchise dans les préceptes machiavéliques. L’honnête homme parle volontiers de droit des peuples, de droit des gens ; en réalité, ces droits, il faut la contrainte pour qu’ils soient respectés ; et même avec la contrainte, la plupart du temps on les tourne. Dans les simples rapports de commerce, à chaque instant on a au recours au contrat, à la signature ; on multiplie les marques de l’engagement, tant on sait que les engagements sont précaires. Quel est le niais qui se fierait à un engagement oral quand les engagements écrits mêmes sont loin d’être le roc sur lequel on peut bâtir ? Dans le social, le contrat n’a jamais cessé d’être tourné malgré toutes les promesses de bonne foi. Il y a même certitude de mauvaise foi dès qu’il y a affirmation répétée de bonne foi. Chez nous, un démenti confirme. C’est ici que Machiavel met une franchise d’acier. Dès que le contrat se discute, il déclare qu’il sera tourné et quand il signe, il démontre que la signature ne vaut rien, n’engage rien de réel ; qu’on vient, somme toute, de perdre son temps ? Il défend qu’on parle de bonne foi ; il empêche qu’on parle de bonne foi ; il a la loyauté de proclamer, avant que tous les débats ne commencent, qu’ils seront essentiellement présidés par la mauvaise foi. Il ne s’occupe que de la triste vérité. C’est à ce titre qu’il est un écrivain moderne.

  Jean Giono : Introduction aux Œuvres complètes de Machiavel - La Pléiade, Gallimard (1952)

vendredi 2 juin 2017

Ahem !...

De la précarité des correcteurs et de la précarité de la correction :


Cette version révisée nous a été communiquée par Armelle Domenach.
(Vous trouverez  la lettre sur le site ActuaLitté)

mardi 30 mai 2017

Gloire à nos pionniers !

Noms des Pionniers de l'Espérance (1945) :

MAUD

LE PROFESSEUR

ROBERT

TOM

RODION

TSIN-LU

lundi 29 mai 2017

Connaissons nos classiques

Listes des camps fortifiés romains autour du village gaulois
(dans le sens des aiguilles d'une montre)
:

Petibonum

Laudanum

Babaorum

Aquarium

vendredi 26 mai 2017

À l'acheteur hésitant

Si des histoires de mer aux chansons de matelot,
La tempête et l’aventure, la chaleur et le froid,
Si des goélettes, les îles, les robinsons marronnés,
            Et les flibustiers, et l’or bien caché,
            Et toute la vieille histoire romanesque,
            Exactement redite à la façon de jadis
Peuvent plaire, comme elles m’ont plu autrefois,
            À la jeunesse plus sage d’aujourd’hui :
 
— Alors, ainsi soit-il, allons-y ! Sinon !
Si la studieuse jeunesse a perdu cette soif,
Si elle a oublié ses anciennes passions,
            Kingston, ou Ballantyne le brave,
            Ou Cooper des bois et des vagues :
Alors, tant pis, ainsi soit-il encore ! et qu’avec
            Tous mes pirates je partage la tombe
Où ceux-ci reposent avec leurs créations !
 

Robert Louis Stevenson
L’Île au Trésor (1883)
(Traduction d’André Bay)

mardi 16 mai 2017

Tic tac

« Les ventes aux enchères, en proposant parfois les mêmes catégories d’objets, permettent de fixer la cote des écrivains qui les ont possédés. Ainsi la montre en argent de Lewis Carroll a atteint la somme de £ 9.350, celle de G.K. Chesterton 1.100 seulement — toute deux ayant malgré tout  doublé la mise. Celle de Ian Fleming, qui avait été estimée à £ 1.500, n’en a fait que 880. »
Times, 15 décembre, repris dans Le Magazine Littéraire n° 273, janvier 1990
  Pourtant, dans les Bond, il y a toujours de grosses montres coûteuses…

mardi 9 mai 2017

Quand le Tenancier trouve une nouvelle histoire à raconter, c'est un peu comme ça :

« fort mauvais goût »

On sent que la mort devient de l’embarras avec l’âge, une perspective ennuyeuse, un sas vers le pourrissement : organes nobles ou matière grise, tout y passe. La postérité rassure les trouillards : « Créons, c’est l’heure, laissons des trucs et des machins derrière-nous avant le grand effroi, le pied qui dérape !... » Le morbide ressemble à un amusement adolescent ou une passion de vieillard qui « colifichise » ses attributs, une passion vaguement sexualisée. Elle se garde toutefois du puant et du sale — mais y’a des pervers, n'est-ce pas ? La mort s’avère plutôt un truc dégueulasse, un truc de mauvais goût et il devient donc normal de la traiter par le « fort mauvais goût ».
Tant mieux, pas de regret à avoir : il en est qui ont utilisé ce mauvais goût pour en faire un colifichet pour la postérité. L’auteur trouvait cela bien agréable. Il persiste à le penser, même si ça vaut dans les soixante-cinq boules pour les autres.


(Cliquez sur l'image pour savoir)