Amoureuse d'un beau polytechnicien
Qui, d'elle autant épris la besognait fort bien,
L'étoile de mer grimpa au septième ciel
Mais, prise de vertige, craignit la gamelle.
Donc, voici l’hiver de notre déplaisir changé en
glorieux été par ce soleil
d’York ; voici tous les nuages qui pesaient sur notre maison
ensevelis
dans le sein profond de l’Océan ! Donc, voici nos tempes ceintes
de
victorieuses guirlandes, nos armes ébréchées pendues en trophée, nos
alarmes
sinistres changées en gaies réunions, nos marches terribles en
délicieuses
mesures ! La guerre au hideux visage a déridé son front, et
désormais, au
lieu de monter des coursiers caparaçonnés pour effrayer les âmes des
ennemis
tremblants, elle gambade allègrement dans la chambre d’une femme sous
le charme
lascif du luth. Mais moi qui ne suis pas formé pour ces jeux folâtres,
ni pour
faire les yeux doux à un miroir amoureux, moi qui suis rudement taillé
et qui
n’ai pas la majesté de l’amour pour me pavaner devant une nymphe aux
coquettes
allures, moi en qui est tronquée toute noble proportion, moi que la
nature
décevante a frustré de ses attraits, moi qu’elle a envoyé avant le
temps dans
le monde des vivants, difforme, inachevé, tout au plus à moitié fini,
tellement
estropié et contrefait que les chiens aboient quand je m’arrête près d’eux ! eh
bien, moi,
dans cette molle et languissante époque de paix, je n’ai d’autre
plaisir pour
passer les heures que d’épier mon ombre au soleil et de décrire ma
propre
difformité. Aussi, puisque je ne puis être l’amant qui charmera ces
temps beaux
parleurs, je suis déterminé à être un scélérat et à être le
trouble-fête de
ces jours frivoles. J’ai, par des inductions dangereuses, par des
prophéties,
par des calomnies, par des rêves d’homme ivre, fait le complot de créer
entre
mon frère Clarence et le roi une haine mortelle. Et, pour peu que le
roi
Édouard soit aussi honnête et aussi loyal— que je suis subtil, fourbe
et
traître, Clarence sera enfermé étroitement aujourd’hui même, en raison
d’une
prédiction qui dit que G sera le meurtrier des héritiers d’Édouard.
Replongez-vous, pensées, au fond de mon âme ! Voici Clarence qui
vient.
William Shakespeare : Richard III
Acte premier, scène première
Traduction de François-Victor Hugo
Version filmée par Richard Loncraine (1995)
Avec Ian McKellen
« Bonjour
madame, je possède une très belle édition en 3 volumes avec
illustrations
protégées par papier sur la guerre de 14. Ça raconte la guerre de 14,
avec
plein de détails. En état parfait, vu que ça date de 1916. »
Le Tenancier tentait de trouver une rime (voir l'illustration due à notre fidèle Jehan-Georges Vibert) et, soudain, se demande si, puisqu'il a toujours été mauvais à trousser des poèmes, l'aimable lecteur ne pourrait pas suppléer à cette lacune en faisant quelques bouts rimés en commentaire, à partir de « Élixir parégorique ».
Ainsi, le Tenancier, superbe, généreux — cependant modeste —, accommode jeu, allégorie, fainéantise et vertu, en stimulant les talents.
Tiens, c’est l’été et toujours
pas de jeu sur blog du Tenancier…
Réparons l’outrage.
CHARADE
Tu perdras mon second,
si tu n’as mon premier ; En deux sens différens,
mon tout peut se comprendre ; Et si tu t’y prends
bien, tu pourras me surprendre Sur les lèvres d’Iris,
ou bien dans ton grenier. (Par
M. le Ch. de P***)
À vous de trouver le mot derrière
la charade, publiée dans un ancien Mercure
de France. Comme d’habitude, on attend votre réponse en commentaire, en
vous priant de laisser votre nom ou un pseudo.
On commence doucement, elle est
facile.
Signalons avec enthousiasme, dans la maigre patrie des blogues cultivés et intéressants, celui de Grégory Haleux intitulé Des brouettes à la pelle. Diable ! Nous avions manqué quelque chose ! Cette anthologie littéraire et permanente comblera nos lacunes. Merci, monsieur Haleux !
« Et puis, surtout, il y
avait eu une guerre et un mode de vie qui avait disparu quand la guerre fut
perdue. Les hommes qui s’étaient battus étaient maintenant des vétérans. On les
voyait assis sur les bancs, à la gare, se chauffant au soleil, taillant des
bouts de bois en regardant arriver les trains, mais, aux jours de fête, ils
remettaient leurs uniformes, organisaient des défilés ; les plus jeunes
rentraient le ventre et sautillaient pour garder le pas, les plus vieux
clopinaient, appuyés sur leurs cannes. Il était malaisé de voir le rapport
entre ces yeux chassieux, ces visages vides, et le fracas des armes, les
drapeaux déchiquetés par la mitraille, et cependant parfois, quand la voiture
devait s’arrêter au passage à niveau, il les entendait parler, et les noms de
batailles lui parvenaient à travers le bourdonnement de la conversation. —
Manassas, Shiloh, Gaines Mill, Malvern Hill, Sharpsburg, Second Manassas,
Fredericksburg, Murphreesboro, Chancellorsville, Gettysburg, Vicksburg,
Chickanauga, The Wilderness, Spottsylvania, Cold Harbor, Brice’s Crossroads,
Kennesaw Mountain, Big Shanty, Atlanta, Petersburg, Spring Hill, Franklin,
Nasville, Five Forks, Appomattox ; il les entendait tous, les noms
bibliques, indiens, anglais, noms de villes et de hameaux, noms de cours d’eau
et de carrefours dans toute l’étendue du Sud, la plupart sans importance par
eux-mêmes jusqu’au jour où les armées s’étaient réunies, plus ou moins par
hasard, pour donner une permanence à ces noms épars et pour établir un mode de
vie qui serait celui d’Hector Sturgis et de tant d’autres. »
Shelby Foote : L’enfant
de la fièvre (1954)
Traduit par Maurice-Edgar Coindreau
« Nous sommes les ennemis naturel de ces révolutionnaires, futurs dictateurs, réglementateurs et tuteurs de la révolution qui, avant même que les États monarchiques, aristocratiques et bourgeois actuels, soient détruits, rêvent déjà la création d'États révolutionnaires nouveaux, tout aussi centralisateurs et plus despotiques que les États qui existent aujourd'hui, qui ont une si grande habitude de l'ordre créé par une autorité quelconque d'en haut et une si grande horreur de ce qui leur paraît les désordre et qui n'est autre que la franche et naturelle expression de la vie populaire, qu'avant même qu'un bon et salutaire désordre se soit produit par la révolution, on rêve déjà la fin et le musellement par l'action d'une autorité quelconque qui n'aura de révolution que le nom, mais qui en effet ne sera rien qu'une nouvelle réaction puisqu'elle sera en effet une condamnation nouvelle des masses populaires, gouvernées par des décrets, à l'obéissance, à l'immobilité, à la mort, c'est-à-dire à l'esclavage et à l'exploitation par une nouvelle aristocratie quasi révolutionnaire. »
Programme et objet de l'organisation secrète révolutionnaire des Frères internationaux (1868)
(Bakounine, bien entendu)
N'empêche qu'on pressentait bien des choses, dans le temps, celui qu'évoque Michel, plus haut.
Lorsque le Tenancier travaillait encore en librairie de neuf, il lui arrivait de rencontrer quantité d'objets promotionnels. Le plus prestigieux était évidemment l'Album de la Pléiade, ou bien l'agenda... Et puis, la maison 10/18 s'est mise également à produire des objets plus ou moins amusants : faux livres contenant des mouchoirs, par exemple. Le plus sympa était sans doute cette boîte à épices de 1997, que les acheteurs de la collection n'ont pas dû beaucoup rencontrer. On soupçonne les libraires de les avoir détournés à leur usage. Il fut un temps (votre Tenancier n'était pas encore du métier) où les éditeurs pensaient à récompenser les libraires en fin d'année. Ainsi, a-t-on entendu parler de caisses de cognac de la part des éditions du Seuil... Est-ce une légende urbaine ?
Cette amusant « madeleine » a été envoyée par Didier Pemerle, que l'on remercie ici.