mercredi 20 janvier 2021
mardi 19 janvier 2021
lundi 18 janvier 2021
Une historiette de Béatrice
dimanche 17 janvier 2021
samedi 16 janvier 2021
Un mécénat à 1000 %
« Une circonstance tout à fait inattendue vint augmenter les revenus de Conrad. John Quinn, le collectionneur américain, souhaitait acheter des manuscrits de Conrad et d’Arthur Symons. Par l’intermédiaire d’Agnes Tobin, poète américain très proche de Symons, Quinn prit contact avec Conrad et lui proposa de lui acheter des manuscrits, puis, par la suite, des dactylogrammes et divers brouillons. Quinn offrait des prix assez substantiels pour un auteur vivant : quarante livres pour une nouvelle, cent à cent cinquante livres pour les œuvres plus longues. Ces transactions profitèrent aux deux hommes ; à Quinn qui admirait beaucoup l’œuvre de Conrad, et à celui-ci qui gagna plusieurs centaines de livres à une époque où il était loin de rouler sur l’or. La première transaction eut lieu le 24 août [1911], Conrad envoyant à Quinn le manuscrit d’Un Paria [des îles] (516 pages) et celui de « Freya », encore inédit (226 pages). Conrad aurait voulu envoyer également La Folie Almayer, mais il s’aperçut que tout le chapitre 9 manquait. Comme compensation, il envoya le manuscrit de la préface supprimée du Nègre du Narcisse. C’est ainsi que la collection Conrad de John Quinn débuta, et la correspondance entre les deux hommes deviendra assez volumineuse. Ils ne se rencontreront cependant jamais, Conrad évitant par la suite Quinn d’une manière assez visible, et lorsque Conrad abandonnera Quinn pour vendre ses manuscrits à Thomas Wise, leurs rapports tourneront à l’aigre. Mais la vraie rupture aura lieu lorsque Quinn fera un bénéfice de 1000 % sur la vente de la collection Conrad en 1923. La vente de ce matériau, dont la plus grande partie alla à A.S.W. Rosenbach, rapporta à Quinn cent dix mille dollars environ, pour dix mille dollars d’achat. Lorsqu’on lui demanda de verser à Conrad une partie de ses gains, Quinn refusa catégoriquement. À vrai dire, Quinn aussi bien que Conrad étaient à ce moment-là au seuil du trépas. »
Frederick R. Karl : Joseph Conrad — Trois vies (1979) Traduction de Philippe Mikriammos
jeudi 14 janvier 2021
mercredi 13 janvier 2021
Vieilles lunes et jeunes cons
Une tendance naturelle voudrait que
nous attribuions aux
effets de la nouveauté certains travers bien plus anciens. C’est le cas
des
« Fake News » dont la forme
anglomaniaque semble garantir la novation, alors que nous nous trouvons
confrontés à une vieille lune de la connerie humaine. En effet, dès
l’apparition du papier et de celle de l’imprimerie, une production
abondante de
littérature de colportage et de canards va se diffuser dans les
villages
d’Europe. À ce titre d’ailleurs, une historienne comme Elizabeth L.
Eiseinstein
nous rappelle dans son ouvrage La
révolution de l’imprimé, que nous ne devons pas sous-évaluer
l’alphabétisation de la population aux xive
et xve
siècles, au
moment de la révolution de l’imprimerie. Canards et almanachs (qui
contiennent
souvent des nouvelles très exagérées) nous content des événements
extraordinaires : apparitions de comètes, prodiges, monstres et
contes
moraux sont reproduits sur des brochures, voire des placards, dont les
illustrations sont souvent des réemplois d’autres documents (Il en va
de même
avec la production de livres à la même époque, comme le souligne encore
Eiseinstein…) La pratique du canard perdure jusqu’au xixe siècle.
L’éditeur Pierre Horay a publié en
1969 un recueil in-folio (Canards du
siècle passé) pour cette époque. Bien entendu de tels documents
originaux
sont d’une rareté insigne, car leur fragilité et leur nature éphémère
ne
garantit pas leur pérennité.
Nous faisions allusion à la terrible connerie humaine au début de ce billet. Atténuons notre jugement au sujet du lectorat ancien, pas encore intégré à notre vision du monde, inspirée de Descartes (*). La pensée magique y règne et ne se révèle pas choquante. De même la pénétration d’idées nouvelles poursuit toujours un cheminement lent, d’autant que le livre reste également un média lent…
La pensée magique perdure dans notre société, ce qui nous pousse de ce côté de l’écran à songer que la faute ne provient pas d’un média trop prompt à fasciner mais bel et bien de l’inculture crasse et de la sottise de nos contemporains. Et de cela, aucune raison et aucun média ne peut y remédier. Le Tenancier est misanthrope aujourd’hui. Il fatigue. On reviendra un jour sur ces publications.
Pour le plaisir de la documentation et par perversité aussi, on se reportera à la page de Gallica pour approfondir ses connaissances sur le sujet.
(*) Lisons Descartes et soyons surpris par la « banalité » du raisonnement, pour une simple raison : nous l’avons intégré dans notre système de pensée, ce qui n’est pas le cas de la plupart de ses contemporains.
lundi 11 janvier 2021
dimanche 10 janvier 2021
Une historiette de Béatrice
samedi 9 janvier 2021
vendredi 8 janvier 2021
RB
Signalons aux curieux nantis d'un accès à Facebook l'existence d'une page dédiée : Coup de sombrero à Richard Brautigan et aux plus austères l'existence d'un site officiel pas très beau consacré à l'auteur : American Dust.
Merci qui ? Merci Tenancier !
mercredi 6 janvier 2021
Blague à part...
Ce petit coup de gueule fut publié sur
Facebook (et l'on pardonnera le style relâché) le 1er novembre 2020. La sottise de certaines personnes
criant à « l’atteinte à la liberté » parce que l’on demandait aux
libraires de fermer quelques temps devenait quelque peu encombrante. Le propos
ne soutient en rien, précisons-le, la politique absurde en vigueur concernant l’épidémie
qui nous touche tous (et dont j’ai été atteint), mais s’interroge sur un
certain fétichisme autour du livre…
Blague
à part, je suis sidéré parce que je lis en ce moment autour de l'ouverture des
librairies, et en général tout ce qui touche le livre. J'ai commencé dans le
métier (parce que j'y suis toujours, malgré tout) en 1979 et je me trouve loin
du fétichisme affiché par beaucoup ici. En effet, je considère cette étrange
passion de continuer à baguenauder dans les rayons assez frelatée, comme si, du
point de vue du lecteur, de l’acheteur de livre, nous nous relevions d’une
privation de quatre ans. Et encore, si tel était le cas, frémirait-on de
plaisir à enfin découvrir des voix venues d’ailleurs comme l’étaient en leur
temps tous les écrivains amerloques débarqués par rayon entiers sur nos
rivages. Là, on demande aux professionnels de fermer un mois et de se débrouiller
pour livrer, afin de compenser comme ils peuvent leur manque à gagner. Ils
s’organisent. Eux-mêmes le signalent. Je pense que nous survivrons tous à cette
suspension partielle de la vente des livres parce que, c’est vrai, la librairie
n’est pas vitale. On peut tout à fait survivre sans livre (on s’emmerde, c’est
vrai) mais on ne peut pas survivre sans bouffer. Alors oui, d’autres commerces
restent ouverts et je serais pour qu’on les ferme aussi, ou qu’ils se
débrouillent comme les libraires. Parce que vous savez quoi ? Eh bien comme le
dit un éditeur de ma connaissance, je préfère me priver d’un bouquin et
sauvegarder une vie. Nous voici confrontés à problème de santé publique qui
constitue une menace immanente sur les plus faibles, à notre merci du fait de
notre inconscience ou de notre impéritie... Tout cela pour complaire cette
sorte d’attachement malsain autour d’un métier où le fantasme — je suis bien
placé pour la savoir — d’un certain public reste omniprésent. Eh, les gens, si
vous vous voulez tant de reconnaissance, ne faites pas librairie, c’est chiant,
on fait des factures, on déballe des cartons et en plus on doit se gaufrer des
clients qui viennent baver des « C’est merveilleux votre métier on lit tout le
temps », sous-entendu qu’ils aimeraient aussi. Toujours cette envie de
reconnaissance, parce que, aux yeux de beaucoup le livre garantit une sorte de
prestige, alors que… Musso, Lévy, Tesson et les merdouilles du genre, ça c’est
la vérité de la librairie. Et vous voudriez que ça reste ouvert pour que ce
robinet à connerie ne se tarisse pas. Oui, je sais, il y a les autres, les
obscurs, les sans-grades. Ne vous alarmez pas pour eux, ils ne vendront pas
plus que si tout restait ouvert, ou bien la différence reste si infime : un ou
deux exemplaires à décompter, peut-être. J’exagère à peine. Mais non, prendre
position pour ou contre la fermeture (et ce n’est pas du Marthe Richard), c’est
prouver qu’on est concerné, que cela a de l’importance. Mais pas du tout, en
définitive. Si vous voulez un livre, c’est bon, bigophonez au libraire. Si vous
voulez vous valoriser par le livre en manifestant ou en pétitionnant, allez-y,
je ne vous retiens pas, mais vous devriez sans doute penser au radio-crochet
pour tenter de vous donner de l’importance, parce qu’on risque de regarder vos
achats de plus près, et ça risque aussi de ne pas être glorieux. Autrement, les
gens, vous êtes toujours au courant, la pandémie, les malades, les vieux qui
crèvent dans les mouroirs industriels que sont les ehpad, non ? Vous devriez…
et demander qu’on reconfine encore plus strict. En plus ce serait chouette de
votre part, il y aurait encore moins de circulation et de cons en liberté. Le
printemps serait joli. Ah mais oui, le dernier rempart contre le fascisme,
j’oubliais : le livre ? Comme ceux de Houellebecq, le Céline de la petite
bourgeoisie centriste ? Bon courage pour la victoire finale, alors…
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