J’y ai fait allusion à plusieurs
reprises dans ce blogue :
« L’homme heureux n’a
pas de chemise ». Je
ne sais pas d’où cela vient, mais ce proverbe me plaît, même si du côté
vestimentaire je n’ai pas à me plaindre, tout en étant préservé du
malheur
(croisons les doigts). Mais pour les possesseurs de livres, existe-t-il
aussi
un précepte autant inepte ?
Assurément, on en a vu passer lors du confinement tandis que les
libraires
avaient été contraintes de fermer : déclarations connes sur la
liberté — ou
la libération — liée au livre, comme si Mein Camphre
ou autre truc de ce genre n’avait jamais existé. Bref,
dois-je craindre un accroissement des emmerdements en accumulant les
volumes
ici et là ? Eh bien,
cela risque fort d’arriver au bout d’un moment avec notre maison qui
n’en
pourra mais sous le poids. Pour l’instant, pas de craquement suspect.
On reste
serein. Tout de même, il convient de se méfier du bonheur des autres,
qui, se
sentant légers, se défaussent encore plus sur les amis, tel celui-ci,
amoureux
au point d’en perdre des kilos, se libère également de nombre de livres
de sa
bibliothèque. À nouvel homme, de nouvelles perspectives, et bien
dégagées s’il
vous plaît ! Voici
les rayons qui se vident et mes bras chargés d’une pile : pas
moins de
dix-neuf livres à « rentrer » (comme disent les
libraires d’occasion et les bouquinistes) !
Bigre, vais-je m’amuser à chroniquer ici tout cet arrivage d’une
traite, vous
infliger un placard indigeste, d’autant que je vous tiens la jambe
depuis
environ 1500 signes avec mon babil ?
Allons, je vais me montrer raisonnable et vous appâter par deux
ouvrages non
négligeables :
Oui, c’est bien le reprint complet de
la revue chez
Jean-Michel Place, superbe et à l’état neuf. Petite bouffée de
nostalgie puisqu’il
m’est arrivé de voir circuler les originales dans un passé qui
s’éloigne de
plus en plus. Que dire de plus, sinon que je biche ce genre de
publication !
Puisqu’il est question d’édition
originale, voici un des 925
exemplaires sur vélin ivoire de cette « édition
publique » de
Cendrars. Cette publication a fait un peu polémique à l’époque, en
1997, en
raison de la rareté du document-source et donc de l’attente qu’il a
suscité.
Parfois, le prodige d’une réapparition peut faire douter. On a en
mémoire, vers
la même époque, d’un roman inédit à l’histoire miraculeuse[1]
et pour
lequel on continue ici et là à concevoir des doutes, sans preuve
concluante,
mais avec le chiffre d’affaires d’un poids lourd de l’édition. Pour
revenir à
cette Légende de Novgorode, sa page Wikipédia
fait état des polémiques qui courent encore. Tout ce qui prête à une
enquête
sur la nature matérielle de la publication, la codicologie,
donc, reste passionnant. Tant que les « raretés » ou les manuscrits
sont
gardés hors de portée des spécialistes, le scepticisme demeure la
règle… On
accueille donc ce volume avec un certain plaisir, celui de lire du
Cendrars, ou
celui de conserver peut-être un faux, sachant que les deux peuvent se
confondre. La couverture de celui-ci était légèrement tachée, mais rien
qu’une
gomme blanche n’a pu enlever. L’on a vu également des exemplaires du
tirage de
tête nous passer sous le nez avec l’eau-forte d’Alechinsky. Les livres,
cela
existe aussi pour rêver ou se souvenir, un épisode mélancolique,
parfois.
La suite un peu plus tard…
La suite un peu plus tard…
[1] Paris au xxe siècle, de Verne.
Le Surréalisme au service de la Révolution, numéros 1 à 6, juillet 1930 à mai 1933, colleciton complète — Jean-Michel Place, 2002
Blaise Cendrars : La légende Novgorode — Fata Morgana, 1997