samedi 11 février 2023

À 140 à l'heure

À William Packard
Fin octobre 1985
 
[…] Ce matin, je me suis payé un méchant duel de vitesse avec une espèce de connard sur l’autoroute de Pasadena, ma gueule de bois faisant resurgir instantanément de mes couilles et de ma tête à la François Villon les 3 bouteilles de Beaujolais picolées la veille. Je suis alors monté jusqu’à 140 à l’heure dans le Virage de la Mort, là où la chair humaine et les os sont fréquemment disloqués dans un violent éclair de néant cramoisi, et il a fini par ralentir, passant de la 5e à la 4e tout en faisant des appels de phares en signe d’abandon. Ça leur apprendra à vouloir jouer au con avec un Suicidé en puissance ! […]
 
Charles Bukowski : Correspondance, 1958-1994

vendredi 10 février 2023

Les lecteurs de Planète


La venue massive de gourous portés par les vidéos en ligne et le fait que leurs délires grandissants touchent une population de plus en plus naïve ne doit pas nous faire perdre de vue qu’avant cette résurgence sous forme numérique, tout un pan de l’édition se livrait à la production de balivernes dans les années 1960 et 1970. On a ainsi connu les ouvrages d’Erich Von Däniken, Robert Charroux et autres imbécillités relayées désormais par des JacquesGrimault et des imposteurs vidéastes de l’archéologie fabulée. On se rappelle ici que l’impulsion fut donnée par le fameux Matin des magiciens, pondu par les duettistes Bergier et Pauwels et que, sur la lancée, des collections entières vaticinaient à tout-va : soucoupisme, Grands Anciens, vie post-mortem, mysticisme de bazar, etc. L’autre vecteur, toujours sous forme imprimée était la revue Planète qui, pour être honnête, s’était également diversifiée vers les contre-cultures (non exemptes, d’ailleurs, de fabuleuses conneries !). Ainsi, votre serviteur conserve le numéro de Planète plus consacré à Bob Dylan et la beat generation, surtout par pur fétichisme. En effet, on a lu mieux. Pour vous situer cette collection au format de la revue mère, l’on y trouvait des parutions vouées à Artaud, Ramakrishna, René Guénon, Henry Miller, Mounier, Jung et Krihnamurti. Mais qui achetait donc ces machins ?
L’on n’ose songer à des publications militantes en faveur des réalités alternatives, même si Peyotl et Grands Initiés aux remugles fascistes semblaient avoir provoqué la fonte de quelques fusibles dans la rédaction. Bien au contraire, nous estimons que ces porte-parole de la sottise mystique avaient conscience de s’adresser à du CSP++, c’est-à à dire une catégorie socioprofessionnelle plutôt aisée, genre classe moyenne, voyez-vous, mais subissant un fort déclassement qui la pousserait à des succédanés religieux ou culturels (nous ne sommes pas très loin du petit bourgeois marxien, d’une certaine manière). Hélas, dans ce numéro de Planète plus (daté d’Avril-Mai 1971), pas de publicités, indices forts de la catégorie du lectorat (ce qui permettait de savoir, par exemple que le Nouvel Observateur était un journal de gros bourges.) En revanche…
En revanche, la maison Planète, soucieuse d’instaurer un ordre nouveau dans les consciences planétaires proposait à nos chers petits Français des voyages d’initiation qui permettait à un occidental de se balader sans vergogne dans une contrée alors du « tiers-monde » ou presque. On découvrira ci-dessous que la pilule de la pauvreté s’avale plus facilement vue du dos d’un éléphant et entre deux palaces, bien sûr après avoir visité quelques ashrams ou bien des récipiendaires de savoirs millénaires.
Le tarif est éloquent : 5350 francs de 1971 (avec un supplément de 400 balles pour une chambre individuelle) vous donnera accès aux clefs de la sagesse orientale. Cela représente plus de 6500 € actuels selon le convertisseur de l’INSEE. On appréciera peut-être la modicité de la somme pour un voyage organisé de vingt jours en Orient. On attrapera la nausée en imaginant ce que pouvait signifier une telle somme pour les travailleurs autochtones, même encore maintenant (2 € par jour de salaire minimum en 2020). La pudeur n’a jamais vraiment touché la maison Planète, née vraisemblablement avant le concept d’obscénité. Reconnaissons toutefois que ces voyages semblaient honorés par les organisateurs, ce qui n’est pas le cas pour ce qui concerne certains égyptologues fabulistes à l’heure actuelle.
On constate avec dépit que l’engouement pour les gourous s’est quelque peu avili sous la férule de la loi du marché et des nouveaux médias. Avouons-le aussi, le gogo devient moins fortuné et adepte des charters. Il semble bien que la période Planète fut un Eldorado pour les marchands de gris-gris…


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jeudi 9 février 2023

Margot lit

Image tiré de Margot veut lire, texte de Michael Heinze, images de Katrin Strangl, éditions être, collection l'étrangeté, 2008 (2003 pour l'édition originale), album cartonné sous jaquette sobrement illustrée (comme tout l'ouvrage), 12x17 cm.

mercredi 8 février 2023

10/18 — Robert-Louis Stevenson : Le cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde




Robert-Louis Stevenson
Le cas étrange du Dr. Jekyll et de Mr. Hyde
suivi d'histoires non moins étranges
réunies et postfacées par Francis Lacassin
Introduction de Pierre Mac Orlan
Traduit de l'anglais par Théo Varlet
n°1044
Paris, Union Générale d'Édition
Coll. 10/18
Série « l'Aventure insensée »
Volume sextuple
448 pages
Dépôt légal : 2e trimestre 1976
Achevé d'imprimer : 15 mars 1976
ISBN 2.264-00034-1

TABLE DES MATIÈRES
— Introduction par Pierre Mac Orlan
— Le cas étrange du Dr Jekyll et de Mr Hyde
— Will du moulin
— Janet la revenante
— Olalla
— Markheim
— Histoire de Tod Lapraik
— Thorgunna la solitaire
Postface par Francis Lacassin
Bibliographie


(Contribution du Tenancier)
Index

mardi 7 février 2023

Une histoire de constellation


Si vous ne le savez pas vraiment, vous avez dû la subodorer : votre Tenancier s’absente maintenant souvent du blogue parce qu’il écrit par ailleurs et que quatre heures de tensions dans la journée aboutissent à l’épuisement. Guère facile ensuite de vous causer sans se forcer et risquer ainsi de générer du déplaisir. Ai-je envie de m’adresser à vous de mauvaise grâce ? Non.
Les semaines passées ont été consacrées à la dernière main (on verra que le terme est choisi, à la parution de l’ouvrage) à un roman qui était fort mal parti. On reparlera sans doute un jour de la suffisance et des avertissements divers qui ont accompagné la conception et les révisions avant la survenue de sauveteurs. L’une des incidentes de ce récit use du firmament et des constellations comme moteur de l’action ; étrange coïncidence, alors, que de recevoir en cadeau (truffé chaque fois de surprises merveilleuses) d’une amie, ignorante du roman qui se trame, l’essai de William Marx : Des étoiles nouvelles, quand la littérature découvre le monde. Ces hasards fascinent toujours et procurent une illusion magique qui abonde dans notre sens : nous avons raison, puisque les événements nous le confirment, sans que nous les sollicitions de trop. On a commencé à feuilleter le livre et l’on tombe sur le dernier paragraphe :
« À défaut, il n’est possible que de tracer des constellations toujours plus diverses et d’imaginer comment leur dessin se poursuivrait au-delà de l’horizon visible, au-delà du passé historique, au-delà des contraintes trop aisément contestables des faits et du récit de vainqueurs. Alors peut-être se découvriront d’autres étoiles nouvelles, accessibles seulement à l’esprit »

Propos finaux presque anodins s’ils ne venaient en contrepoint exact de la situation développée dans le roman à paraître. Parvenue à ce paragraphe conclusif il nous reste à remonter le cours de l’exposé, ainsi qu’agissent les personnages du récit, intrigués par une constellation. On s’y apprête avec gourmandise en temporisant un peu, toutefois, non par peur de la déception, mais pour prolonger la jouissance.
 

lundi 6 février 2023

Une historiette de Béatrice

La publicité ambulante pour Burberry's-Chanel-Lancel me demande une remise. Je lui dis que le prix de sa bague couvrirait largement la réparation de ma porte ?
Et de ma devanture

dimanche 5 février 2023

Jeu

Ah ces éditeurs populaires qui retouchent les couvertures pour les rendre aguichantes !
Mais, dites-moi, de quel film est tirée cette capture d’écran ? Facile, trop facile...
 

samedi 4 février 2023

C'est pas du boudin, c'est du frais


Votre Tenancier s’est adonné récemment à la promotion d’un livre (V., évoqué plus bas dans ce blogue) et, de fil en aiguille, s’est retrouvé au cinéma local à présenter la version restaurée de Nosferatu, concluant une Semaine Vampirique qui avait débuté par des lectures publiques en médiathèque. Bien entendu, lâché devant une assemblée de spectateurs surtout venus regarder le chef-d’œuvre de Murnau, il s'est agi de faire court, pas emmerdant et puis de tenir compte d’une volubilité qui tendait à devenir excessive : on n’avait pas causé en public depuis un bail. Cela s’est bien passé, merci, et l’on a ressenti une palpitation seulement au moment de quitter chez soi, mais guère à l’arrivée dans la salle. On a retrouvé avec un certain plaisir la verve rencontrée autrefois à vendre des livres, ce plaisir presque intime de l’argumentation préparée, guère taraudante, cela dit, rangée dans un coin, mais aisée à se ressouvenir dans le feu de l’action. Votre Tenancier chéri n’est pas un spécialiste des vampires. Comme lorsqu’il vendait en librairie, il demeure une sorte de touche à tout, montrant ses limites rapidement. Il convient d’en garder conscience. Cependant, aucune grosse connerie n’a été proférée (une petite boulette sur le nombre de victimes de la grippe espagnole, c’est tout). Et puis, le jeu des réminiscences, des anciennes lectures, m’a obligé à commander le bouquin de Kracauer, De Caligari à Hitler, que j’avais lu en diagonale, à la libraire, afin de prolonger la jouissance d’un grand film et d’explorer les malaises qu’il véhicule. Rien de bien émotionnant dans tout cela, seulement une suite de menus plaisirs, passés ou anticipés, apaisés. Votre Tenancier deviendrait-il un vieux sage ou, comme les rats de la mythique bassine, se fait une raison devant l’inéluctable en ménageant l’attente du mieux qu’il peut ? Quelques ronds encore, en attendant ?
Voire…

mardi 29 novembre 2022

Où le Tenancier se goure, semble-t-il

Bien que votre Tenancier se soit beaucoup intéressé à la science-fiction (il a tenu une émission sur le sujet sur près d’une vingtaine d’années), il s’est peu à peu éloigné du genre. Certes, de temps à autres, il lui arrive de rédiger une histoire qui pourrait s’apparenter à cette littérature, sachant par ailleurs qu’il ne la considère pas comme un genre, mais plutôt un mode de narration. D’ailleurs, qui se préoccupe de connaître la nature de ce qu’on lit, pourvu que cela remplisse sa mission (et vous pouvez investir ce que vous voulez dans cette notion de « mission ») ? Je suis toutefois intrigué par l’usage que l’on assigne désormais à la SF et le fait que certains de ses acteurs obéissent à l’injonction de conforter la réalité, comme si, tout à coup la SF devenait un laboratoire conjectural pour un secteur de Recherche & Développement (mais après tout, la SF reprend certains archétypes de la classe moyenne, y compris parfois la béatitude entrepreneuriale) et non une littérature qui navigue surtout au large de notre contemporanéité, possédant plus une valeur testimoniale que d’injonction « sociétale » ou technologique. Il semble que votre Tenancier se goure. Ainsi, n’est-il plus rare de voir fleurir des tables rondes dans les festivals qui confrontent les thèmes plus ou moins classique de la SF au fait social. Il devient intrigant de songer que l’on demande à cette littérature une compétence et un point de vue là où d’autres champs littéraires sont priés de ne pas fourrer leur nez, sans doute par incompétences, alors que les auteurs en question possèdent sans nul doute autant de conscience sociale et politique qu’un écrivain de SF moyen. Le phénomène conserve toutefois un aspect anodin et même sympathique, à rechercher perpétuellement une respectabilité ailleurs que dans le monde des lettres, où son image s’est démonétisée (en partie par sa faute, mais ceci est une autre histoire).

lundi 7 novembre 2022

V.

Votre Tenancier, certes, accorde peu de soins à ce blog. Il faut en trouver la raison à quelques occupations annexes qui le retiennent ailleurs comme, par exemple, la confection d’une anthologie vampirique. On espère revenir à un peu plus de constance dans les temps à venir…
V.
Une anthologie vampirique préparée et présentée par Yves Letort
 

Yves Letort Avant-propos
Benjamin Desmares Bloodkovski
Florent Liau Heureux les affamés de justice
Jean-Hughes Oppel Aux vampires anonymes
Céline Maltère Atalef
Patrick Denieul Au Club des Chirurgiens
Sandrine Scardigli La Marche vers la longue nuit : une demi-étoile
Didier Pemerle Anesthésie, ou Boire à la source
Taddeusz Hiddinko Considérations sur l'épieu
Chantal Rabutin Une correspondance ferroviaire
Sylvain-René de La Verdière Casus Belli
Dolmancé Gode Dracula !
Léo Kennel VampireS de craie
Pierre Laurendeau Végan, le vampire qui n'aimait pas le sang
Nicolas Liau Gris des épines
Fabienne Leloup Hologramme
Patrick Boman L'innommable

Le site de l'éditeur ici

vendredi 21 octobre 2022

Métaphysique du pilchard



Le plaisir de figurer dans certaine publications réside également dans le voisinage. Ainsi, votre Tenancier figure au sommaire du numéro 3 de la revue Lard-Frit (nouvelle formule bi-fluorée) pas très loin d’un article que Jean-Pierre Bouyxou consacre à la revue Fascination dont on aurait tant aimé posséder la collection complète. Certes, d’autres contributeurs ne déméritent pas dans le cahier érotique, comme l’évocation de la collection La Brigandine, par Vincent Roussel... Bref, avec l’âge, le Tenancier se sent polisson. Mais voilà, on peut vouloir, mais il faut pouvoir, on s’est contenté d’une modeste nouvelle : Métaphysique du pilchard, exclue à juste titre du dossier érotique, car, n’est-ce pas, il en faut pour tous les goûts…
Lard-Frit n°3, à commander ici.
… et à ceux pour lesquels ce titre rappellerait de bons souvenirs, on peut se rafraîchir la mémoire.