jeudi 11 mai 2023

Une littérature à la loupe

Votre Tenancier chéri, en général, s’abstient de toute critique littéraire et garde ses manies de lecture pour lui-même. Restons laconique en affirmant notre satisfaction au sujet de la nouvelle de Julien Gracq, La maison, dont le dévoilement final reste extrêmement plaisant. On laissera les exégètes développer le sujet, car ce n’est pas tout à fait le nôtre ici. Signalons qu’il s’agit d’un récit court, 28 pages de texte, auquel on a ajouté une postface, mais également le «fac-similé» des deux états du manuscrit, in extenso, semble-t-il. L’ensemble compte 84 pages, dispensables pour la majorité de celles-ci. 
 

Que la maison Corti se sente le besoin de reproduire les manuscrits d’un auteur, cela, au fond, les regarde et nous avons connu des éditions passionnantes ailleurs, dotées d’appareils critiques et de translations en vis-à-vis qui laissaient un peu pénétrer l’esprit d’une œuvre. Ce n’est pas le cas du tout ici ; on peut même songer à un foutage de gueule qui nous mène à contempler la réduction de pages manuscrites qui — à ce que l’on présume puisqu’aucune indication n’est donnée — auraient été rédigées sur des feuillets de format 21x27 cm (format courant d’époque) et rendues dans un ouvrage de 13,5 x18 cm. Le résultat de l’affaire contraint le curieux à recourir à une loupe à fort grossissement pour tenter de déchiffrer l’écriture de Julien Gracq. À ce stade, il constatera l’impression dégueulasse au point d’estimer qu’un fanzine photocopié des années 1980 était plus soigné, et nous fait accroire que la vitre du scanner a été nettoyée avec du gras de jambon, tant la reproduction manque parfois de netteté et de contraste. Le résultat est illisible.
Mais, au fait, la copie de ces manuscrits se révélait-elle si indispensable? Il semble que, du point de vue de l’éditeur, cela justifie le prix exorbitant de 15 € pour une trentaine de pages lisibles et 84 pages effectives, jouant sans doute sur la ferveur d’un cénacle d’amateurs. Pour votre Tenancier, il considère qu’il a assez rigolé et que la vénérable maison Corti peut désormais se brosser pour que le Tenancier leur refile quelques sesterces après une telle opération. On arguera peut-être que les clichés des manuscrits ont été fournis par la Bibliothèque nationale de France et que la qualité médiocre peut éventuellement provenir de cette source. Nous souhaitons alors vivement qu’une partie de nos impôts passent dans l’équipement de matériels et de logiciels performants, comme Photoshop qui possède des fonctions de luminosité et de contraste… Si ce n’est pas le cas, rappelons aussi à l’éditeur que d’autres formats existent, comme l’in-4°, par exemple, qui approche la dimension originelle des feuillets rédigés par Gracq, à ce que l’on peut présumer. Il pouvait réfléchir au choix de son imprimeur. Il pouvait également renoncer à cette reproduction qui n’apporte pas grand-chose à la plupart des amateurs. Quitte à payer cher un livre, autant le faire pour quelque chose de lisible in extenso, car cet aspect du problème, cette fois-ci nous regarde bel et bien : notre fétichisme porte sur des objets plus gracieux destinés à nous procurer du plaisir.
 

Nous avons délicatement laissé tomber cette règle sur la page afin de vous donner un aperçu de la taille de la reproduction

mardi 7 mars 2023

Une historiette de Béatrice

Hé Simone, attends un peu voir. (devant le panier à 1 euro). Voyons si je trouve un livre pour lire. Mais, bon, c'est vrai que j'ai tout, moi. Tiens, ceux-là tu vois, et bien j'ai toute la collection. Ils sont jolis hé ? Boh, je ne trouve rien, peut-être au marché samedi alors. Viens Simone, on s'en va.

lundi 27 février 2023

dimanche 26 février 2023

Jeu

Puisque vous prenez goût aux devinettes coriaces, voici un photogramme tiré d'une série célèbre. Là aussi, il s'agit d'un personnage secondaire : un imprimeur (mais pas que). On vous donnera des indices dans les commentaires si vous séchez trop longtemps...

samedi 25 février 2023

Une historiette de Béatrice

Bonjour madame, il y a 15 jours vous aviez dans le panier à 1 euro un livre sur les dictons météorologiques, je ne le vois plus aujourd'hui. Vous l'avez vendu ?

vendredi 24 février 2023

Granit House

Prochainement sera lancée une micro-maison d’édition associative destinées à publier quelques nouvelles de votre Tenancier chéri. Le propos de ce billet n’a d’ailleurs aucune intention promotionnelle puisque, de toute façon, la distribution de ces petits ouvrages est limitée, par souscription, et que le quota est déjà rempli de ce côté. Les ouvrages sont des travaux d’amateur accomplis par le soussigné et ne saurait d’ailleurs se substituer à l’expérience et aux connaissances de vrais professionnels du livre. Néanmoins, le Tenancier s’applique et s’amuse (et transpire parfois) à découper, à plier et à coudre. Il se peut qu’à la longue quelques amateurs se désistent, on recourra alors à une éventuelle liste d’attente. Deux brochures ont été fabriquées à titre de test et distribuées. On attend maintenant l’entérinement de la création de l’association pour lancer l’affaire… plutôt paisible car l’on ne dépassera guère quatre ouvrages publiés par an.
Donc, bienvenue à Granit House. On vous invite à visiter le site embryonnaire ici.
 

mercredi 22 février 2023

Presse clandestine


Le Comité finit par reconnaître que l'agitation et la terreur, les tracts et les bombes n'étaient que deux aspects d'une seule et même chose ; dans un certain sens, cela agissait officiellement ; chaque acte de terrorisme précédait une déclaration officielle ; chaque attentat était en même temps un moyen de propagande dont l'effet s'étendait très loin.
C'est pourquoi, parmi les groupes spécialisés, les imprimeurs jouissaient d'une situation particulière. Ils travaillaient en collectifs itinérants. « Les outils de l'imprimerie, dit un récit du temps, étaient les plus simples du monde : quelques caissettes de caractères, un petit cylindre avec un substance collante, gluante, un gros cylindre recouvert de tissu, qui servait de rouleau d'imprimerie et quelques brosses et des éponges. C'était si bien organisé qu'en un quart d'heure tout pouvait disparaître dans un grand placard. »

Hans Magnus Enzensberger : Les rêveurs de l'absolu (1964)
Éditions Allia, 2022, traduction de Lily Jumel