lundi 22 juillet 2024

À la recherche d'une bibliographie

Le Tenancier vous l’a signalé à plusieurs reprises : il n’est pas concierge, mais il a l’esprit d’escalier. Ainsi, évoquant le site Banned Book dans un précédent message ici-même, l’on s’est laissé entraîner à évoquer pour soi la censure gaullo-pompidolienne et par association facile (le Tenancier est un garçon facile pour certaines questions) aux mésaventures d’Éric Losfeld, non en qualité d’éditeur sur lequel on a déjà glosé ici et là mais sur son activité d’écrivain. On connaît au moins un des ses romans érotiques publié sous le pseudonyme transparent de Dellfos (Cerise ou le moment bien employé), mais il se plaisait à raconter qu’il écrivait des polars, après-guerre, dont un Vous qui après moi vivrez (titre inspiré de la Ballade des pendus de François Villon) tiré à soi-disant 80 000 exemplaires. Or, une recherche hâtive ne permet de trouver qu’un ouvrage d’Hervé Le Corre sous cette entrée dans les sites de ventes de livres d’occasion. Pourtant, un tel tirage devait laisser quelques « scories »… Cela nous mène à la part mystificatrice de Losfeld ou peut-être à la malédiction qui touche certains livres. Bien entendu, on s’est livré à une recherche très superficielle et sur ce seul titre. Or, il semble en avoir écrit beaucoup et dans tous les genres. Alors, se pose la question : quels sont donc les ouvrages écrits par Éric Losfeld et dans quel genre ? Existe-il une bibliographie ?
Si un érudit passe devant ce message, il nous comblerait d'aise à nous donner quelques informations à ce sujet et contribuerait à une amorce d'une série d'été ravigotante.
Post scriptum ajouté quelques jours plus tard : On a omis de dire que ces ouvrages putatifs auraient été rédigés sous pseudonyme, ce qui rend la recherche plutôt ardue...

17 commentaires:

  1. Jules17:10

    Un intéressant article de Chantal Aubry dans le N°2 de la revue Braséro (nov 2022) apporte quelques précisions sur le bonhomme.
    Mais on n'y trouve trace desdits livres évaporés.

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    1. Merci, Jules, nous allons voir du côté de cette revue. Cela dit, beaucoup d'anecdotes circulent sur le personnage. Pierre Laurendeau nous en a raconté une en commentant il y a peu un de ses Minilivres, j'en connais une autre qui fut racontée par Jean-Claude Forest...

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    2. ... je vois d'ailleurs dans ce même numéro 2 un papier sur Le Gloupier, édité par le même Laurendeau (Ode à l'attentat pâtissier), comme quoi...

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  2. Laurence16:35

    Point n'ai connaissance d'une bibliographie : chercher ses ouvrages sur Chasse aux livres en donne un embryon d'idée ?
    https://www.chasse-aux-livres.fr/search?query=author%3A%C3%89ric%20Losfeld&catalog=fr

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    1. Chère Laurence, oui, ce moteur de recherche a l'air intéressant, mais je dois préciser un fait que je n'ai pas rapporté sur le billet ci-dessus. Je vais d'ailleurs le rectifier en ce sens en ajoutant un post scriptum : les ouvrages qu'aurait écrit Losfeld l'ont été sous pseudonyme. La recherche que vous proposez serait donc un élément si nous connaissions les noms d'emprunt, comme Dellfos — d'ailleurs il figure dans la liste de ce moteur, sans doute parce que l'auteur de la notice l'a mentionné. Pour les autres références, il s'agit pour la plupart d'ouvrages édités par lui... Merci, en tout cas !

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  3. J'ignore d'où vous sortez ce témoignage sur le fait que « il se plaisait à raconter qu’il écrivait des polars, après-guerre, dont un Vous qui après moi vivrez » mais je demeure assez dubitatif quant à sa prolixité d'écrivain.

    Certes, Losfeld est arrivé à Paris en 1945 sans un sou dans ses poches trouées, il a bouffé de la vache enragée à tous les étages (aux débuts d'Arcanes, il n'avait même pas de bureau, il donnait rendez-vous aux auteurs dans des bistrots), mais je ne crois pas qu'il ait eu le temps de trop se consacrer à la rédaction, même hâtive, de romans de gare ("de genre", dit-on aujourd'hui), tellement il était possédé par la passion d'éditer — quitte à s'endetter comme une mule (mais pas du pape).
    Rien que le fait d'aller recopier à la BN les œuvres complètes de Forneret lui a pris un temps considérable, sans parler de tout le boulot que devait accomplir à l'époque un éditeur, de la composition jusqu'au brochage.

    Quoi qu'il en soit,suite au présent billet, j'ai reparcouru en vitesse ses mémoires, quarante-cinq ans après qu'elles eurent foudroyé et cryptesthésié mon adolescence, pour vérifier que nulle part il ne cause de tâcheronnage d'écrivaillon à trois sous.

    Cerise est un roman bien plus tardif, quand un chouïa d'aisance financière lui a laissé le loisir de l'écrire.

    Bref, certes rien n'est certain mais Losfeld n'était ni André Héléna ni Maurice Raphaël : pour faire quelques pépètes, il lui était plus naturel de vendre sur le trottoir des bouquins sous le manteau que de pondre des lignes à tire-larigot sur une Olivetti pour les précurseurs du Fleuve Noir ou d'Eurédif.

    Ses mémoires dénotent d'ailleurs un souci assez précieux de l'écriture et des allusions culturelles (naturelles ? mon cul !), comme en témoigne cet extrait à propos de Jacques Sternberg :
    « Il n'a pas profité de son nom pour découvrir une nouvelle Marlène, mais son prénom lui a permis de rester fataliste. » (Endetté comme une mule…, Belfond, p. 80)

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    1. Mon cher George, ces informations seraient rapportées des propos de Losfeld lui-même dans un portrait publié par Libé en 2017, lisible in extenso et facilement trouvable (la flemme de coller le lien). Après, mon cher, j'émets l'hypothèse que ces propos tenaient de la mystification qui se perpétuerait post mortem auprès de journalistes trop enclins à rapporter sans vérifier, ce que nous incitons nos lecteur à faire de leur côté. Il aurait publié au Fleuve Noir après-guerre, toujours d'après le même article et je pense que nous sommes nombreux à tomber d'accord sur le fait que tout ceci paraît improbable, mais pas impossible, d'où mon interrogation sur ces romans "érotico-policiers" publiés sous pseudo dans l'après-guerre. Cela étant, Fleuve Noir naît en 1949, ce qui paraît tardif pour que cela corresponde à l'après-guerre au sens strict et ce qui confirme un certain manque de vérification. Cependant, le doute subsiste encore : Fleuve Noir — ou un autre éditeur du genre comme il en existait tant à cette époque — a pu éditer tout de même Losfeld sous pseudo pour des petits romans facilement écrits en très peu de temps et dont le rapport à l'époque restait honorable, ce qui le sera moins dans les décennies suivantes. Je suis également dubitatif, George, mais gagez que retrouver un de ces textes, s'il existe, serait un motif de nous réjouir ou de nous amuser.

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  4. Pareille trouvaille me semble fort ardue, cher Tenancier, puisque d'une l'existence de ces textes n'est pas avérée et deuzio, s'il y en a, nous ne connaissons pas les pseudonymes.
    Une piste pourrait être le dico de la censure du cher Bernard Joubert, qu'hélas je n'ai pas sous la main, pas plus que les mémoires de Losfeld — dont j'ignorais qu'ils avaient été réédités chez Tristram après Joëlle Losfeld (qui avait eu la judicieuse idée de compléter l'ouvrage d'un index, me semble-t-il).

    Merci en tout cas pour l'article de Frédérique Roussel (je me coltine la tâche de pallier votre flemme…), duquel vous tirez vos infos de ce passage :

    Le soldat belge va ensuite devenir, comme s'amusait Alphonse Boudard, le « brave soldat de la 17e » [chambre correctionnelle, s'entend – NDGWFW]. Les semis de piment sexy dans sa prose vont lui faire goûter les premières affres de la censure. Pour gagner sa vie, Losfeld a en effet commencé à écrire des textes érotico-policiers, maniant avec dextérité tous les poncifs du roman populaire. Son premier titre, Vous qui après moi vivrez, se vend tout de même à 80 000 exemplaires. L'écrivain de circonstance a ainsi rejoint la cohorte de «traîne-savates» qui déversent des pages et des pages pour alimenter la production du Fleuve noir ou d'autres éditeurs de l'époque peu regardants sur le style. Joyeusement, Losfeld livre quelques perles pour distraire le lecteur : « Une nappe de plomb semblait flotter à la surface du lac. » Ou encore : « Docteur, ma femme est clouée au lit et je voudrais que vous la vissiez. » Ses œuvres complètes, signées de pseudonymes, comprennent quelque cinquante titres. Oubliés, oubliables, ils sont l'une des faces cachées de l'iceberg.

    Je me souviens que la dernière citation m'avait bien amusé, mais pas du reste du passage d'où ça sort, au début, lorsque Losfeld narre son retour de captivité.
    Mais une chose est certaine : tout comme Girodias et Pauvert (les deux autres éditeurs similaires de l'époque qui nous ont livré leurs mémoires), Losfeld enjolive considérablement les faits à maintes reprises (mais sans vindicte rance, contrairement à Pauvert qui ne rate pas une occasion de lui balancer des piques acides).
    S'il est vrai que son récit fourmille d'anecdotes hautement réjouissantes, il est avéré que certaines sont totalement fantaisistes.
    Par exemple, il prétend n'avoir jamais eu vent du passé plus ou moins collabo de Maurice Raphaël avant de le rééditer, alors que la chose était parfaitement notoire depuis les années cinquante (voir l'enquête minutieuse de Franck Lhomeau dans les n° 14 et 16 de Temps noirs.

    Bref, affaire à suivre…

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    1. Vous vous rendez compte, mon cher George, que vous me servez toute une tartine pour arriver à la même conclusion : "Affaire à suivre" ?

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    2. Ouaipe, Chief, mais dans mon cas c'est un tantinet plus étayé et ma conclusion n'est pas une envolée dans le vent : ça signifie que je vais me replonger dans Endetté… et scruter le Joubert, par exemple…

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    3. Mais, c'est qu'il me chercherait des poux dans la tête !

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    4. C'est pas moi, M'sieur, c'est vous qu'avez lancé la dispute !

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    5. Une disputation peut-être mais jamais de dispute, mon cher George. De plus, l'enjeu de ce blogue reste tout de même de stimuler les commentateurs et sous cet angle, l'on plutôt réussi avec vos trouvailles.

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    6. Ah mais c'est bien en ce sens de disputatio que j'entendais le terme, cher Tenancier : voyez le sens A du substantif ici.

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  5. Et pis tiens, vise-moi donc un peu ça :

    Signés "Alexandre Leucade" :
    Le Gorille (1957)
    La Belle et la bête


    "Loulou Morin" :
    Madame de V. a des idées noires

    "Comte d'Irancy" :
    La Nonne

    La bibliographie de Dutel est hélas hors de prix mais il semblerait que le site de la BNF (actuellement en rade depuis chez moi) liste certains des pseudos de Losfeld.

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    1. Belle pêche, mon petit George, dirait l'adjudant aux tinettes !
      Je savais bien qu'en stimulant la curiosité de certains amateurs, cela donnerait quelque chose !
      Bravo.

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  6. Bah, suffisait de feuilleter l'article de Ouiqui dans lequel a pompé la Roussel : paradoxalement, c'est l'anthologie de Pauvert (pas sous la main non plus, grmmbll !… toujours encartonnée à longue distance) qui dévoile quelques pseudos.
    Mais vu la perfidie du bonhomme, cela est-il fiable ?

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