mardi 19 décembre 2023

Une historiette de Béatrice

C'est la librairie Truc qui m'envoie, j'ai besoin de thunes, elle a regardé sur l'ordinateur, elle m'a dit que j'en aurais 10 euros le livre.
Qu'il aboie, ziva, en posant le casque après être entré en trombe et sorti ses beaux livres XIXe du sac Leclerc.
Non merci.
« Et pourquoi, hein, pourquoi ? » Sur un ton agressif.

lundi 18 décembre 2023

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 23


Jacques Abeille

Un Cas
de lucidité


Angers — Éditions Deleatur, 1996
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques rêveurs



Le Tenancier : Voici un titre paradoxal, puisque les événements décrits dans ce récit se déroulent au début dans les limites de la conscience. Ajoutons que ce texte sensuel, érotique, reprend les conventions du conte libertin, avec un « châtiment » final digne des moralistes de l’époque. Je ne sais pas pourquoi exactement, mais ce récit m’a fait songer à Crébillon. Enfin, la note finale résonne particulièrement pour moi et d’ailleurs pour tous ceux qui se sont confrontés au thème de la mémoire. Le conte a été achevé à 4 heures du matin et cette annotation explique assez son atmosphère…
 
Pierre Laurendeau : Cette nouvelle troublante avait été inspirée à Jacques Abeille par un très beau roman d’Henri Thomas (un auteur un peu oublié de nos jours), La Nuit de Londres, dont Jacques cite un passage en exergue : « L’épouse que Mr. Smith étreint dans la nuit noire n’est pas la compagne de tous les jours... » Il semble me souvenir également que le texte fut inspiré par un rêve.
La première édition d’Un Cas de lucidité parut en 1984 dans la collection « La Petite Bibliothèque de littérature portative », animée par ma femme, Agnès Jehier de 1981 à 1988. Les minilivres ont d’ailleurs accueilli un autre ouvrage de cette belle collection, que l’on découvrira au numéro 26. Pour les amateurs de raretés, certains ouvrages de la « Petite Bibliothèque de littérature portative » sont proposés par des libraires spécialisés entre 25 € et 200 € (je découvre qu’un de ces libraires propose L’Écriture du désert, du même auteur, à 24,90 €… alors que le livre est toujours disponible au catalogue de Deleatur au prix initial de 8 €.
Un Cas de lucidité a été repris dans un recueil de nouvelles paru à L’Escampette, Celles qui viennent avec la nuit.

vendredi 15 décembre 2023

Paf, dans ma bibliothèque !


« Parler de la bêtise, par les temps qui courent, c’est aller au-devant de toutes sortes d’écueils ; certains y verront de la présomption, d’autres même une volonté de s’opposer à l’évolution contemporaine. Il y a de cela quelques années, j’avais moi-même écrit : “Si la bêtise ne ressemblait pas à s’y méprendre au progrès, au talent, à l’espoir ou au perfectionnement, personne ne voudrait être bête.” C’était en 1931 ; et personne n’osera douter que le monde a connu d’autres progrès et perfectionnements depuis lors ! Ainsi l’urgence de cette question se fait-elle de plus en plus pressante : qu’est-ce au fond la bêtise ? »

Robert Musil 
: Conférence prononcée à Vienne en 1937
De la bêtise, Allia, 2015

jeudi 14 décembre 2023

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 22


Armando Alvarez
Bravo

Les Trahisons
du souvenir

Traduction :
Agnès Boonefaes

Illustrations :
Ramón Alejandro


Angers — Éditions Deleatur, 1995
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques êtres premiers ou derniers



Le Tenancier : Une nouvelle dans les Minilivres ne compte pas énormément de signes. L’enjeu consiste à rendre une idée intelligible en peu de mots. Ici, il faut rendre compte du terminus d’une existence, de l’accumulation et de la futilité de tout cela. J’ai la vive impression que ce très court récit s’ancre dans quelque chose de vécu, sans savoir vraiment à quoi se rapporte cette dite expérience, partielle, ou totale ? La question prend de l’intérêt avec ce soupçon, et sans doute parce que cela se rapporte à tout processus créatif…
Armando Alvarez Bravo semblait un auteur important de l’émigration cubaine, comment son texte est-il parvenu dans cette collection ? A-t-il apporté les dessins d’Alejandro dans ses bagages ?
 
Pierre Laurendeau : Que de questions ! qui touchent à la dimension internationale de Deleatur. En 1995, Ramón Alejandro décida de s’installer à Miami, au plus près des amateurs de sa peinture à la fois onirique et descriptive (également truffée de références à la santeria – religion à mystère très présente à Cuba et dans l’émigration floridienne). Avant de partir, il me confia : « Ce que je regrette le plus en quittant la France, c’est notre complicité… Mais je réfléchis à poursuivre notre collaboration. »
Le résultat : un projet transatlantique fou, avec deux collections consacrées à des auteurs cubains, en langue espagnole (Baralanube et Mañunga). Ramón m’adressait les manuscrits et les dessins par Poste (c’était avant Internet). Je faisais relire les textes par une amie, Martine Roux, excellente hispanisante, puis j’envoyais – toujours par Poste – les épreuves à Ramón. Enfin, l’impression était confiée à Ivan Davy, un ami imprimeur près d’Angers. Puis j’expédiais les ouvrages à Miami. Le premier auteur publié dans Baralanube (en 1996) fut Armando, à l’époque journaliste dans un quotidien de Miami en langue espagnole : Trenos, un recueil de poèmes, illustré de magnifiques dessins au trait de Ramón Alejandro.
Je ne sais plus si Les Trahisons du souvenir fut antérieur ou postérieur à Trenos – peut-être Armando me confia-t-il le texte lors de mon séjour à Miami en 1997… Il existe une version en espagnol, Las traiciones del recuerdo, disponible en minilivre également.
Cette aventure angevino-cubaine donna lieu à une dizaine d’ouvrages, dont deux livres d’Antonio José Ponte, qui vivait alors à Cuba. Le premier, Las Comidas profundas, eut un écho international bien au-delà de la confidentialité de notre aventure : le livre de Ponte fut publié en anglais par City Lights Books à San Francisco, et l’auteur invité dans de nombreuses universités américaines, ce qui le contraignit à quitter Cuba (il fut rayé des listes de l’Uneac, le syndicat des écrivains cubains) et à s’installer en Espagne, où il vit toujours. Martine Roux, ma relectrice en espagnol, me signala l’intérêt de l’ouvrage, que je fis traduire par Liliane Hasson ; il parut en 2000 en français, toujours à l’enseigne de Deleatur, sous le titre Les Nourritures lointaines (le livre est toujours disponible). Ramón m’avoua plus tard que son projet éditorial était avant tout de publier Ponte, dont un second ouvrage, Cuentos de todas partes del Imperio, parut dans la collection Baralanube (non traduit).
La plupart des ouvrages des deux collections sont encore disponibles chez Deleatur… Avis aux amateurs !

lundi 11 décembre 2023

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 21


Jacques-Élisée Veuillet

Oncle Ted

Angers — Éditions Deleatur, 1996
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques amateurs



Le Tenancier : De nouveau, Jacques-Élisée Veuillet suscite une féroce jalousie en même temps que de l’admiration avec ce texte, après La lettre close. C’est le genre de récit que tout écrivain rêverait d’écrire, enfin, tout écrivain qui se respecte : pas un mot de trop, pas un qui manque, la ténuité des phrases qui sied, une façon d’avancer feutrée... Je vous le dis les yeux dans les yeux, Monsieur Laurendeau, si vous n’aviez dû éditer qu’un seul auteur, il eût bien fallu que ce fût celui-ci. Une question demeure, qui ne s’est pas résolue à son propos lors de ta précédente évocation : a-t-il produit d’autres écrits, analogues à La lettre close et à Oncle Ted ? Je voudrais aussi que l’on revienne un peu sur les conditions de production et surtout de distribution de ces Minilivres. Comment s’opérait-elle ?
 
Pierre Laurendeau : O Tenancier, que de questions !
Ton éloge d’Oncle Ted me va droit au cœur. Ciselé, étrange sans donner d’explication à son étrangeté, un très grand texte en un condensé de mots. Malgré mes nombreuses et insistantes demandes – proposant de publier un recueil de ses nouvelles –, Jacques Veuillet ne m’a jamais transmis d’autres textes, si j’excepte un recueil de poèmes publié à titre posthume pour sa famille et ses proches. Il parlait de ses deux nouvelles avec une sorte de modestie distanciée, et ce sourire bienveillant que je lui ai toujours connu. Et me promettait de réfléchir à de nouveaux textes. Une première édition d’Oncle Ted, en grand format, est parue en 1992 dans la collection « Les Indes oniriques » : un cahier 15 x 21 cm, cousu, sous couverture Canson bleue, avec étiquette rapportée – très chic.
La diffusion des minilivres ? Un peu au hasard des librairies… à l’époque où il y avait encore de vrais libraires ; pendant les salons du livre, notamment celui de Paris, où je disposais un présentoir conçu exprès par un designer (je l’ai toujours) ; et des commandes de clients fidèles. En près de trente ans, j’ai tout de même imprimé, plié à la main et agrafé près de 15 000 exemplaires ! Ce qui, pour environ 70 titres, représente une moyenne de 200 exemplaires par titre… Les ventes servaient à compenser – partiellement – les ouvrages dispendieux publiés par ailleurs.
Ce qui est amusant, c’est que l’on trouve sur des sites de libraires anciens des minilivres à 10 € voire 15 €, alors qu’ils sont toujours disponibles chez Deleatur à 1,5 € !

samedi 9 décembre 2023

Quel caractère !


Signalons la parution de l'ouvrage d'Huguette Lendel, artiste que votre Tenancier prise particulièrement. Il a eu la chance de pouvoir collaborer avec elle à deux reprises et ne désespère pas de récidiver un jour. En attendant, il s'agit moins ici d'illustrations que d'écrits, une suite de 433 notices, illustrant ainsi un intérêt commun pour la forme courte. On ne fait pas souvent du copinage dans ce blogue. Vous savez bien que le Tenancier n'aime personne. On fait une exception...
Pour en savoir plus, allez faire un petit tour ici

Une historiette de Béatrice

« Le prix qui est indiqué au crayon sur la première page, c'est vraiment le prix ?
— Oui monsieur, c'est le prix du livre »
Avec un grand sourire.