mercredi 12 novembre 2014

Débaucher

Débaucher, v. a. Congédier, renvoyer.
Il a été débauché, on l'a remercié, on l'a renvoyé de l'atelier.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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mardi 11 novembre 2014

Paradis pour tous
(et masque à gaz pour les autres)

Le pays de cocagne
 
Le jeune homme, les précédant, leur fait visiter le Paradis. Ils voient une terre très fertile en beaux bois et en prairies. Les prés, splendides et constamment en fleurs, y forment un jardin. Le fleurs sentent très bon, comme il convient à un endroit qu’habitent les saints, un lieu où les arbres et les fleurs font les délices de ceux qui les regardent, et où les fruits et les parfums sont d’une richesse inestimable. Ni ronces, ni chardons, ni orties n’y poussent à profusion ; il n’y a pas d’arbre ni d’herbe qui n’exhale une odeur suave. les arbres sont continuellement chargés de fruits et les fleurs toujours en pleine épanouissement, sans tenir compte de la saison qui ne change pas ; c’est toujours l’été, et le temps reste doux. les fruits sont toujours mûrs sur l’arbre, les fleurs produisent sans cesse leur semence ; les bois sont toujours remplis de gibier, et toutes les rivières d’excellents poissons. Il y a des rivières où coulent le lait. Cette abondance règne partout : les roselières exsudent le miel grâce à la rosée qui descend du ciel. il n’y a pas de montagne qui ne soit d’or, pas de grosse pierre qui ne vaille un trésor. Le soleil ne cesse d’y briller de tout son éclat, aucun vent, aucun souffle ne vient remuer le moindre cheveu, aucun nuage dans le ciel ne masque la lumière du soleil. l’habitant n’y souffrira aucun malheur, il ne connaîtra aucun orage, il sera à l’abri du chaud, du froid, de l’affliction, de la faim, de la soif, de la privation. Il aura tout ce qu’il souhaite, en abondance. Il est certain de ne jamais être privé de ce qu’il désire le plus ; il l’aura toujours à sa disposition. Absorbé par la contemplation de toute cette félicité, Brandan ne voit pas passer le temps ; il voudrait y rester encore longtemps. le guide le mena beaucoup plus loin encore, et lui fit voir bien d’autres choses : il lui décrivit en grands détails les délices dont jouira chacun. il gravit un tertre aussi haut qu’un cyprès, et Brandan le suit ; d’ici Brandan et ses moines ont des visions qu’ils ne parviennent pas à expliquer. Ils voient des anges et les entendent se réjouir de leur arrivée. Ils écoutent leurs grands chants mélodieux, mais en viennent à ne plus les supporter : les mortels ne sont pas de nature à comprendre ou à concevoir tant de gloire.
 
Benedeit – Le voyage de Saint-Brandan
(Texte et traduction de Ian Short)

Chapelain

Chapelain, s. m. Celui des ouvriers qui tient les copies de chapelle. (B. Vinçard.) Inusité depuis que la chapelle n'existe plus.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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lundi 10 novembre 2014

Presse clandestine

Avant Internet, il y avait les catalogues. Ce qui était vrai pour les 3 Suisses l'était également pour les libraires de tout poil, du libraire d’ancien le plus huppé au pourvoyeur de ballots pornographiques. Tout le monde rédigeait, annotait, collationnait, amendait, fichait, etc.
Voici, en gros comment cela se déroulait avant les ordinateurs :
Le premier stade du catalogue, c’est la fiche. Et là, point de norme propre au bibliothécaire, chacun faisait comme bon lui semblait. Mais ces fiches avaient un minimum de points communs : Auteur, titre, sous titre, date et lieu d’édition, description physique, commentaire, référence bibliographique lorsqu’il y avait lieu, etc. A ce stade, il y avait déjà une indication de prix, lequel serait éventuellement révisé pendant la rédaction de la liste. A l’évidence, on travaillait avec ces fiches pour des commodités de tri mais également comme trace d’une vente passée. Ainsi, le libraire en faisant des fiches, forgeait également sa propre bibliographie et ses cotes.
Ensuite, le libraire se mettait devant sa machine à écrire et commençait à transcrire le contenu de ses fiches dûment triées.
Après, cela partait chez l’imprimeur…
C’est tout ?
J’ai d’autres souvenirs.
Liés à ma propre expérience, cela va de soi, dans une librairie, qui éditait des catalogues.
Précisons que cela se passait au milieu des années 80...
Le fameux catalogue était donc tapé — par une machine mécanique, s’il vous plaît — mais pas sur une feuille de papier. Cela ressemblait plutôt à des stencils qui étaient utilisés sur des duplicateurs à alcool. C’étaient, en quelque sorte des matrices pour offset de bureau. Ainsi, nanti de cette matrice, je descendais dans le sous-sol frais de la librairie, au milieu des éditions originales et m’attelais à ce méchant cube vert sapin et orange qu’était l’offset de bureau. Il fallait fixer cette matrice sur le cylindre, faire un tour avec celui-ci à l’aide de la manivelle, retirer la feuille de papier glacé qui la protégeait, remettre un coup de manivelle en engageant une feuille format 21 X 27 cm. — Eh oui, ce n’est pas une erreur de ma part. Il ne s’agissait pas de format A4… — Une fois la première impression faite, il suffisait de pousser l’interrupteur électrique et veiller à alimenter la machine en papier. Opération qui se renouvelait autant qu’il y avait de pages au catalogue. Le tirage était approximativement de 450 exemplaires et avait une quarantaine de pages.
Venait, une fois l’ensemble tiré, le tri des feuilles pour constituer le catalogue, utiliser toute la surface du sous-sol et tourner dedans en classant les feuilles… j’en ai encore le tournis. Il ne fallait pas oublier la couverture, imprimée, elle, en véritable offset et portant la mention : "Vente à prix marqués" et puis les écussons du SLAM (Syndicat de la Librairie Ancienne et Moderne), etc.
Ensuite, il fallait constituer des paquets d’une trentaine de catalogues et les enfermer dans une presse à main, en grecquer ce qui allait être le dos à l’aide d’un vieux coupe-papier, le recouvrir de colle plastique et attendre que ça sèche. Alors, armé d’un couteau de cuisine, je séparais chaque catalogue en tranchant les dos un par un, tel un boucher impitoyable.
Ensuite, venait l’affranchissement. Seule concession à la modernité, une machine à affranchir permettait de reposer les papilles surmenées par l’atmosphère sèche du sous-sol. Seulement, il fallait alimenter la machine à la main, point de tapis roulant ou autre alimentation automatique, vous rêvez, vous… J’avais donc établi un système un peu ergonomique, à base de boîte en carton et de siège autour de la table où se tenait la machine. De plus, il était nécessaire d’affranchir avant de mettre les catalogues car cette machine refusait les plis trop épais. Ensuite venait « l’ensachage », la fermeture des enveloppes, leur « liassage » et leur « portage » jusqu’à la Poste dans mes petits bras musclés… Près de 14 000 feuilles de papier partaient ainsi dans la nature, l’univers entier et ses abords immédiats.
Deux ou trois jours après, le téléphone n’arrêtait pas de sonner. Mais ceci est une autre histoire, comme disait Rudyard, que je vous conterai dans un article prochain.
J’ai le regret de signaler que le progrès fit rage dans cette librairie au début des années 90. Tout d’abord, l’on passa du format 21 X 27 au format A4. C’était le début de la fin. Après ce fut l’acquisition d’une IBM à boule qui procura une frappe plus régulière et donc un catalogue un peu plus lisible. Puis, ce fut l’abandon de l’offset de bureau et des heures passionnantes passées dans le sous-sol à lire tout en surveillant la machine. Celle-ci partit dans l’antre des éditions Fornax, où il m’est arrivé de croiser sa présence sournoise. Le catalogue contracta un format A5 et la seule chose qui le différencia de ses congénère fut la couverture verte…
La librairie ferma vers 2000, avant le saut fatal vers les ordinateurs de type 286, voire 386 ce qui eût permis d’envisager des catalogues avec des mises en pages sophistiquées. Si cela avait continué, je sens que – la révolution étant en marche – nous aurions été, à l’heure actuelle, à la veille d’acquérir notre premier ordinateur doté de Windows 3.1
Nous l’avons échappé belle !
Je ne peux même pas vous montrer ces catalogues. Bêtement, je n’en ai pas gardé un seul ! J’en ai une belle quantité, mais point ceux-là.
Alors, à l’occasion, si vous retrouvez des catalogues (21 X 27, de préférence !) de la Librairie Delatte. Ne le jetez pas, siouplaît !
Pensez à moi.
Je suis un nostalgique.

Ce billet est paru en juillet 2008 sur le blog Feuilles d'automne.

Une historiette de Béatrice

— « Houlala, tu as vu tous ces livres ?
— Ben oui papa, on est dans une librairie. »
 
Cette historiette a été publiée pour la première fois en octobre 2011 sur le blog Feuilles d'automne

Aller en Galilée

Aller en Galilée, v. Remanier, remettre en galée. M. Ch. Sauvestre, qui, lui aussi, est un ancien typo devenu journaliste, nous signale cette expression pittoresque: « Aller en Galilée, dit-il, c'est faire des remaniements qui nécessitent le transport d'une page ou d'une portion de page du marbre, où elle était en forme, dans la galée, sur la casse. Aller en Germanie n'est rien, comparativement au guignon d'aller en Galilée. » Galilée est évidemment une corruption plaisante de galée.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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dimanche 9 novembre 2014

Petit hommage à Daniel Boulanger

Momo :
Et Fido, on dirait un nom de chien…
Fido :
Fido, ça veut dire « Fidèle ».
Ernest :
Pas mal le coup du lait. Mais avoue qu’on a eu la deuxième manche !
Momo :
Mais moi à ta place, j’aurais pas laissé la porte ouverte. D’ailleurs, mon père disait toujours : « Quand t’entends sonner à la porte, dis-toi que c’est l’assassin, comme ça si c’est qu’un voleur, tu seras content ».
Ernest :
Tu travailles bien à l’école ?
Fido :
Comme ça…
Momo :
En quoi t’es le plus fort ?
Fido :
Sciences naturelles.
Ernest :
Moi j’étais fort en rien du tout. Le travail, ça me donne la migraine. Je paye pour les pères et les grands-pères qu’ont travaillé avant moi, toutes ces génération laborieuses…
 

François Truffaut : Tirez sur le pianiste — (1960)

Zéphir

Zéphir : « L'infanterie lègère d'Afrique, dont les hommes sont généralement désignés sous le non de zéphyrs. » (Gandon.)

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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De la friture sur la ligne éditoriale

On se découvre toujours une joie mauvaise quand on s’aperçoit que l’on est débordé en talent pour ce qui est du courroux et du sarcasme, quand cela porte sur la même personne et pour la même cause. A propos de l’affaire de l’article sur l’ouvrage d’Eddie Breuil consacré à l’attribution des Illuminations, on vous avait fait part il y a quelques temps de nos réserves sur l’honnêteté de la critique livrée dans Libération. Le Préfet maritime, animateur de l’Alamblog exécute ce même critique avec une verve et une justesse que votre Tenancier est bien incapable d’égaler. Il vous convie donc à ce moment de plaisir en vous dirigeant vers ce billet.
Rendez-vous .
Par ailleurs, on vous recommande une nouvelle fois de vous rendre sur le blog de Grégory Haleux pour dauber ensemble les excès de l’exégèse rimbaldienne, les psychanalystes semblant détenir un record assez inégalé en la matière.
Cliquez donc ici.

Yankee

Yankee : Américain. — « Parbleu ! tous les yankees s'appellent Atkins, s'écria M. Jules. » (Du Boisgobey.)

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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