mardi 24 novembre 2015

Incertitude

« Une liaison naturelle de la vertu avec le bonheur, et du vice avec le malheur, serait bien plus propre à remuer l’esprit mercenaire, que ne l’est sans une grâce efficace la persuasion des orthodoxes. Cette liaison sortirait toujours son plein et entier effet, puisqu’elle ne serait point soumise à une cause qui trouve quelquefois bon de déroger à ses lois, de les étendre, de les rétrécir, d’en hâter ou d’en retarder l’exécution ; d’en disposer, en un mot selon ses vues et selon la variété des circonstances. […] Mais en supposant une providence qui dispose de toute chose selon son bon plaisir, et avec une sagesse dont nous ne comprenons pas toutes les vues, on ne peut pas être certain qu’une bonne action sera utile, ni qu’une mauvaise action sera dommageable ; car on ne peut s’imaginer dans chaque rencontre particulière, que c’est un des cas où il plaît à Dieu de ne point suivre la loi générale de la récompense du bien, ou celle de la punition du mal. »

Pierre Bayle

(Merci à Didier Pemerle pour nous avoir mis cette citation sous les yeux)

samedi 21 novembre 2015

Macquesée

Macquesée n.f. Tenancière d'une maison de tolérance (peu usité de nos jours). A formé « sous-macquesée » : sous-maîtresse d'une maison de tolérance, dite plus couramment « sous-mac ». ○ EXEMPLE : Mme Pauline, la sous-mac de l'avenue Mac-Mahon, présentait ses filles comme personne..

Albert Simonin : Petit Simonin illustré par l'exemple (1968)

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vendredi 20 novembre 2015

Faits divers

Le 28 octobre 1928, un étrange illustré apparaissait dans les kiosques : en couverture, la photo d’une foule entourant un car cellulaire ; légende : « Chicago, capitale du crime. » En page 2, un éditorial de Me Maurice Garçon : « de tous temps, le récit des affaires criminelles a passionné l’opinion… » Plus loin un referendum-concours : « Voici 10 dossiers de forçats. lequel gracieriez-vous si vous étiez chef de l’État ? »

Détective, premier magazine de faits divers, venait de voir le jour. Fondé par une équipe de jeunes risque-tout sans pécune : les frères Kessel, Jef et Georges ; Louis Roubaud, Marius Larique, Paul Bringuier, Henri Danjou, aujourd’hui disparu ; et Marcel Montarron.
Au troisième numéro, assis tristement sur une montagne d’invendus, ils s’apprêtaient à mettre la clef sous la porte. Un gros hommes barbu et grasseyant sauva l’entreprise : Léon-Paul Fargue leur apportait un merveilleux reportage poétique intitulé Paris la nuit. Mac orlan, Carco, Morand prirent le relais… Et les lecteurs d’accourir, rassurés par ces cautions littéraires.
Montarron a raconté l’aventure de Détective1 :
« Nous étions les chiffonniers du fait divers et nous eûmes bientôt rassemblé dans un tiroir tant de documents impubliables (femmes coupées en morceaux et suppliciés en tous genres) que nous n’osions plus sans frémir nous plonger dans ce musée macabre, dans cet enfer de cauchemar.
«  Un seul de nos amis y trouvait ses délices, c’était le cher Michel Simon qui, ponctuellement, venait se repaître de cette collection d’horreurs et qui même, avec cette politesse exquise qui a toujours fait le charme de ce grand comédien, nous demandait d’emporter chez lui quelques unes de ces images d’épouvante pour enrichir ses archives personnelles. » […]

1. Tout ce joli monde, Table Ronde, 1965
 
Jean-Paul Lacroix : La Presses indiscrète — Julliard (1967)

Ladé

Ladé Adv. Là. L'adjonction d'un suffixe destiné à rendre un vocable incompréhensible au profane est un procédé que les argotiers modernes paraissent avoir abandonné. Toutefois subsistent encore, synonymes de « ladé » : « lago », « laga ». ○ EXEMPLE : On avait rembour chez Dupreux avec Charlot la roupane, il était pas laga.
A permis de former l'expression « ils sont pas laga ! », signifiant la pénurie totale de monnaie.

Albert Simonin : Petit Simonin illustré par l'exemple (1968)

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jeudi 19 novembre 2015

Un traitement du texte

[…] Précisons, avant de commencer, que nous sommes pleinement autorisés à interroger Restif sur l’enjeu de la pratique de l’italique : venu en effet à la littérature par la typographie (ce fut un ouvrier imprimeur qui ne devint écrivain que sur le tard), Restif imprima lui-même plusieurs de ses œuvres. La typographie ne pouvait donc être pour lui transparente. Elle entretenait même dans son esprit d’étranges rapports avec l’écriture : Restif allait jusqu’à ne pas préparer de manuscrit pour se lancer parfois directement, sans copie, dans d’étonnantes improvisations typographiques. Nous seulement il pense en termes d’imprimerie mais il « écrit typographie » comme on parle anglais *.
 
* « Les endroits faits à la casse sont toujours les mieux écrits » dit-il dans la Revue des ouvrages de l’Auteur. S’il semble presque confondre écriture et impression, Restif sais aussi se montrer attentif à leur différence : « on sent que, dans l’impression, les lettres accentuées ne coûtent pas plus à mettre que les autres ; au lieu que dans l’écriture, tout ce qui retarde la course rapide est très gênant » (Les Nuits de Paris). Claire conscience donc des lois corrélatives de rapidité et d’économie qui régissent la pratique scripturale. Mais ces lois propres à l’écriture, Restif les reverse sur sa typographie, reconfusion, par un mouvement de retour, du manuscrit et de l’impression : quand il composait à la casse, il était tellement « pressé » qu’il économisait des signes en éliminant les doubles lettres et en utilisant de constantes abréviations. Écriture, typographie : circularité d’où Restif ne sort pas.
 
Philippe Dubois : L’italique et la ruse de l’oblique — Le tour et le détour
in : Cahiers Jussieu / 3 (1977)

mercredi 18 novembre 2015

Klébard

Klébard n. m. Chien. Mot formé à partir de « klebs » (arabisme). ○ EXEMPLE : Son dabe tond les klébards au bord de la Seine, mais cézigue, trouvant ce coltin trop dangereux, préfère tondre les truffes au pok'.

Albert Simonin : Petit Simonin illustré par l'exemple (1968)

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mardi 17 novembre 2015

Une raison

Le silence observé depuis plusieurs jours sur ce blog n’est pas l’effet d’une sidération. Il ne convient pas non plus d’en chercher l’origine dans un quant-à-soi d’essence supérieure face aux événement qui viennent de se dérouler Paris, du genre « je vous l’avais bien dit ». Cet mutité est réfléchie, c’est un pas d’écart, une mise en congé de soi. Je me refuse à commenter l’horreur dans ses détails, je ne veux participer ni à la haine ni à une compassion abstraite. Je veux seulement m’exercer à un sentiment qui semble ici juste : la pudeur.
C’est pour cela que le blog va continuer et que nous ne dirons rien sinon les futilités qui sont de notre usage.

dimanche 15 novembre 2015

Silence

Pendant quelques jours le Tenancier se taira pour des raisons évidentes.

lundi 9 novembre 2015

Jacots

Jacots n. m. pl. Mollets. ○ EXEMPLE : Chez la grosse Loulou, les jacots qui restaient leaubiches l'obligeaient à tapiner en talons aiguilles et jupe plissée accordéon. Au bas des Halles, elle maintenait une clientèle de connaisseurs.

Albert Simonin : Petit Simonin illustré par l'exemple (1968)

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mercredi 4 novembre 2015

Où le Tenancier revient mais sera moins assidu pendant un temps

Le Tenancier revient d’une tournée triomphale en Bretagne. Le blog va donc reprendre un peu d’activité. Cela ne signifie pour autant pas qu’il retrouvera son rythme de croisière. Des changements dans la vie personnelle du soussigné vont intervenir très prochainement, à savoir qu’il prépare un déménagement. On s’en doute, la bibliothèque d’un libraire est plutôt importante même si au cours de ses trente-cinq ans de carrière il a bien fallu qu’il se résolve à se séparer d’importantes quantités de livres… Il en reste assez pour l'occuper à de longues mises en carton. Tout cela accapare. On fera notre possible toutefois pour être présent.
Merci de votre patience.