vendredi 16 février 2024

Traduttore Traditore



Allez zou, les publications de 2024 démarrent par une collaboration à une entreprise amusante cornaquée par Pierre Laurendeau dans sa collection L’Ange du Bizarre aux éditions Ginkgo. Plutôt que de se perdre dans une explication, présentons le deuxième plat de couverture qui vous dévoilera le nécessaire et même plus.



On trouvera au sommaire : Jacques Adit, Alphonse Allais, Jean-Marie Audignon, Sandrine Blais-Deschênes, Patrick Boman, Marine Bourafa, Sylvain Erdepoinzé, Roger Lahu, Pierre Laurendeau, Jean-Louis Lejonc, Yves Letort, Jean-Paul Plaintive, Pauline Rey, Catherine Vasseur, Gilles Verdet et Alain Zalmanski.

jeudi 15 février 2024

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 26


Patrick Boman

Crawford
l'Incorrigible

Angers — Éditions Deleatur, 1997
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques voyageurs intépides



Le Tenancier : Reproduisons l’exergue de la nouvelle de Patrick Boman, traduit de manière fort peu synthétique par Albert Savine dans l’exemplaire que nous possédons :
« Or l’Inde est, par-dessus tout, le pays où il ne faut pas prendre les choses trop au sérieux, sauf quand il s’agit du soleil de midi.
Un travail exagéré, une énergie trop grande tuent un homme aussi sûrement que les excès du vice ou ceux de la boisson. » (Rudyard Kipling : Lancé à l’aventure, in : Simples contes des collines).
Dès le début de ce conte anglo-indien, l’on s’attend à se retrouver à Simla et à croiser madame Hauksbee dans le témoignage d’un correcteur de presse du Daily Peigham, au sujet d’un certain Crawford. Patrick Boman se livre à un bel exercice de style et à un pastiche tout à fait maîtrisé (avec un poème « à la manière de » dedans). Ici, chez le Tenancier, on adore Patrick Boman…
 
Pierre Laurendeau : J’ai déjà narré (voir A Naïve Romance, numéro 19) comment j’ai rencontré Patrick Boman, qui deviendra un des piliers de Deleatur, puis de Sous la Cape.
Crawford l’Incorrigible fut d’abord publié, en 1985, dans la Petite Bibliothèque de littérature portative qui était animée par Agnès Jehier, mon épouse. Collection qui accueillit Un Cas de lucidité de Jacques Abeille – repris également dans les Minilivres (voir le numéro 23) –, puis deux nouvelles de Bettencourt…
Patrick est un fin connaisseur de l’Inde – il maîtrise le sanscrit, si j’en crois une rare confidence sur son passage aux Langues-O. Son récit Retour en Inde, paru en 2011 chez Arlea, témoigne de sa nostalgie à retrouver un pays qu’il ne comprend plus guère, vingt ans (ou plus) après ses premiers séjours. Je le vis peu de temps après son « retour » ; il me confia : « Pour une fois que je prenais une chambre avec balcon à Bénarès, ça donnait sur un bûcher funéraire ! »
En 2000, je venais de créer chez Ginkgo la collection Biloba – un temps coanimée par Christian Laucou. J’avais demandé à Patrick, alors sous contrat avec Le Serpent à plumes, un roman très particulier, lié à mon aventure universitaire : j’assurais alors un TD en fac d’histoire à Angers (les universitaires n’ont jamais compris le contenu de mon enseignement) lié à un cours sur l’histoire du livre – que j’assurais également. Pour le TD, je proposais aux étudiants – dont certains sont devenus des amis, avec lesquels je continue d’être en relation – de se mettre en petits groupes autour d’un projet éditorial. Je me souviens de la panique en début d’année : « Mais qu’est-ce qu’on doit faire ? » « Ce que vous voulez… En revanche, j’exige que le résultat soit professionnel. » « Argggg… » Puis, au fil du temps, les groupes se prenaient au jeu, parfois au point de négliger leurs cours ex cathedra, ce que l’on me reprocha, ainsi que mes notations trop élevées selon les critères en cours (sans jeu de mots), notations qui correspondaient à la réelle implication des étudiants dans les projets. L’un de ces groupes avait inventé un personnage trouble, Piotr Terikchenaltev (je me demande bien où ils étaient allés pêcher le nom de ce personnage !) dont ils avaient reconstitué la biographie d’une manière assez amusante. Pour rendre crédible le personnage, et épaissir leur « devoir », j’avais proposé de demander à des amis écrivains de témoigner de leur rencontre avec ce Piotr. Patrick fut un des premiers à répondre – il avait croisé fugacement ce demi-escroc un peu raté, ce qu’il raconta avec son humour en demi-teinte, pour le plus grand plaisir des étudiants. Un ou deux ans plus tard, il m’annonça que mes étudiants s’étaient trompés sur toute la ligne et qu’il avait écrit la véritable histoire de ce Piotr sous le titre La Méthode Piotr. Ce fut donc le premier livre de Biloba, fort joliment illustré par Pascal Jousselin. Le problème : Tania Capron, du Serpent, avait flashé sur Piotr ; mais elle accepta de se défausser à mon profit, par amitié, et sous condition que Patrick lui écrive un « vrai » polar pour le Serpent noir. Ce fut le début de la série des Peabody, dont le personnage central, un inspecteur de la police des Indes, très mal noté par ses supérieurs pour préférer se mêler au bas peuple plutôt que de fréquenter l’élite coloniale, résout des enquêtes aussi tordues que jubilatoires. Il y aura sept livres, plus un recueil de nouvelles (les deux derniers publiés Sous la Cape), qui connurent un beau succès, notamment par la description pleine de saveurs (et d’odeurs !) de l’Inde au tournant du xxe siècle, travaillée par les soubresauts d’un empire sur le déclin et les velléités d’indépendance du pays sous son joug.
Crawford se situe, bien sûr, dans ce registre de l’arrogance des colonisateurs – qu’il paiera chèrement !

mercredi 14 février 2024

Une historiette de Béatrice

— Dix-huit euros, s'il vous plaît monsieur.
— Vous me le faites à 15 ? Vous avez vu la pliure ici ? Et bon, l'état général…
— Le prix de dix-huit euros tient compte de ces défauts, monsieur.
 …
— Et voici 2 euros qui font vingt, merci monsieur.
— Vous êtes sûre que c'est une vraie pièce ? Elle est bizarre, je préfèrerais une autre pièce.

mercredi 7 février 2024

Abba les cadences infernales

Puisque des commentateurs du présent blogue font de la pub pour Joe Dassin et que, entre nous, c’est pas très standing, parce que d’autre part le Tenancier se voit obliger d’observer une courte pause et enfin reconnaissant le caractère dérisoire de toute activité humaine, surtout pour ce qui concerne le titrage des billets ici et même chez les confrères, le même a décidé de vous infliger un titre tartignole, gâchant ainsi une précieuse carte d’immunité, mais carpe diem, après tout, bordeyl, et puis il faut reconnaître que les thuriféraires de JD ont commencé — on est donc en légitime défense, quoi..

mardi 6 février 2024

Une historiette de Béatrice

Le minet qui me demande « où est le coin érotisme », et à la vue des livres, me dit « Ah mais non, je cherche des magazines ». Alors tu t'es trompé d'adresse, ducon.

vendredi 2 février 2024

Rien ! Rien ! Rien !

C’est une sottise que d’écrire des romans pour gagner sa vie. Je vous assure. C’est étrange. L’irréalité de la chose donne l’impression de pénétrer dans votre vie réelle, de vous entrer dans les os, de faire battre l’illusion dans les artères à chaque pulsation du cœur. La volonté se fait esclave des hallucinations, ne réagit qu’ à des élans fantomatiques, est au service de la seule imagination. État étrange, aventure éprouvante, cette sorte de brûlante ordalie par l’insincérité. Et on la traverse avec une exaltation aussi fausse que tout le reste. On la traverse et on n’a rien à montrer au bout du compte. Rien ! Rien ! Rien !
Joseph Conrad : Lettre à E.L. Sanders, 12 octobre 1899
Citée par Sylvère Monod dans la préface de Œuvres, dans la Pléiade.