mardi 30 juin 2020

Une historiette de Béatrice

Et mon client obsédé qui ne demande que du porno, qui montre ses livres pleins de photos beurk, qui me demande à chaque fois où sont les livres érotiques puisque vous n'avez pas de porno, qui ne comprend toujours pas que non, je n'en ai pas ; donc, lui, qui veut des auteurs « classiques français du XIXe en poche ». Voici-voilà, je lui donne quelques noms et roule-ma poule. Il revient après avoir épluché les livres de poche.
— Bon, je vous en prends 6 à 2 euros, ça fait 10 euros d'accord ?
Avec son regard porcin-bovin.

lundi 29 juin 2020

Lecture du Tenancier


Revenons un instant vers les catalogues de livres, voulez-vous ? Celui d’aujourd’hui est consternant de mauvais goût pour ce qui concerne la couverture, qui ressemble à celle d’un rapport d’une quelconque Direction régionale de l’équipement en 1973. L’intérieur ne vaut guère mieux. Mais, fi de la pâte, jouissons de la substance : cette vente publique propose une série de poèmes autographes de Rimbaud (dont Une saison en enfer), le portrait photographique original par Carjat et Une saison en enfer (Bruxelles, 1873) « non coupé dans son étui de maroquin brun exécuté en 1925 ». À la suite de ces reproductions pleine page, on trouvera l’une des cinq ou six brochures existantes du chant premier des Chants de Maldoror (août 1868) suivi de deux lettres autographes de Lautréamont. On vous passe les autres livres proposés, éditions originales avec ou sans envoi, reliure pleine soie pour certains, etc., presque du banal en regard des pièces maîtresses. Me prendra-t-on pour un « Rimbaldiste » ? La possession de ce catalogue, en vérité, est le fruit du hasard lors de la récupération d’un lot de ceux-ci il y a longtemps. Ma bibliothèque ne comporte que quelques écrits périphériques autour de Rimbaud et guère mieux pour ce qui concerne Lautréamont et de maigres volumes de leurs œuvres. Par ailleurs, le soussigné moi-même se fiche assez des performances de la vente du 17 novembre 1998 à Drouot. En revanche, la reproduction des documents et des couvertures des ouvrages provoque toujours l’intérêt de l’amateur de livres que je reste. Je ne puis que vous recommander la vigilance lorsqu’un libraire ou un bouquiniste se débarrasse d’un lot de catalogues, on y croise de temps à autre des articles sensationnels et des curiosités. Dans certains cas, les rencontres sont étranges et sources de regrets, moi qui n’ait pu m’emparer d’un catalogue où l’on contemplait des photos de Michel Simon dans des ébats empreints d’une saine pornographie ! Sachez également que ces brochures constituent parfois l’unique occasion de découvrir une page manuscrite, un document, un livre ou une photographie avant de rejoindre l’obscurité d’un coffre ou le secret d’une bibliothèque. On reviendra de temps en temps sur le sujet des catalogues, fussent-ils de libraires ou bien de ventes publiques… enfin, si l’envie nous en prend, bien sur.

dimanche 28 juin 2020

Peter a marqué sa page

10/18 — Jeannette Colombel : Les murs de l'école




Jeannette Colombel

Les murs de l'école

Postface de François Châtelet

n° 934

Paris, Union Générale d'Édition
Coll. 10/18
Volume quintuple

314 pages (320 pages)
Dépôt légal : 2e trimestre 1975
Achevé d'imprimer 27 mars 1975


(Contribution du Tenancier)
Index

samedi 27 juin 2020

Une promenade

 
Si l’on identifie fort bien un serpent, un lièvre et des chevaux sur ces pages, on se demande ce que représente la dernière vignette, en bas à droite, sachant que, selon d’autres ordres de lecture, il ne s’agit pas forcément de la première, d’ailleurs. On se perd en conjectures : une créature aquatique, vous croyez ? On ne pensait pas aujourd’hui vous convier à un jeu. Néanmoins allons-y : vous reconnaissez quelque chose, vous ? À noter que, contrairement aux autres images de cette double page, ce motif intrigant ne possède pas d’idéogramme. Sans doute parce que « n’importe quoi », n’est pas traduisible. On notera la sauvagerie du faciès des chevaux, créatures peu commodes comme on l’avait déjà constaté dans notre coin, avec Delacroix.

vendredi 26 juin 2020

Roland


Roland C. Wagner n’a jamais été un ami, mais un de ces « potes » que l’on trouve au cours de son existence, lorsque de nombreuses virtualités existent dans notre jeunesse finissante, lorsque les contraintes sociales pèsent encore peu. Lorsque je le rencontrais, il n’avait pas encore publié de livres, seulement quelques nouvelles, la plupart du temps dans des fanzines. Il voulait devenir écrivain, dans la collection Anticipation au Fleuve Noir, surtout. Tout nous semblait possible. Il avait raison, au point de clore cette série par le numéro 2001 (L’odyssée de l’espèce). Il a eu la sagesse d’aller plus loin encore, de continuer à écrire. On s’est beaucoup vu, puis beaucoup moins. Nous possédions un ami en commun qui nous reliait subtilement bien après que la distance se fut installée. Cet éloignement marquait l’intervalle qui nous séparait d’une partie de notre jeunesse. 

jeudi 25 juin 2020

Une historiette de Béatrice

Il demande un siège pour examiner confortablement le contenu du bac à 1 euro. Et s'exécute.
Un quart d'heure plus tard, il vient vers moi avec son choix : 5 livres.
« Vous allez me faire un prix pour tout cela. »

lundi 22 juin 2020

Lecture du Tenancier

Rien de récent (ou si peu), et comme ça lui chante.


Qui n’a pas eu la tentation d’une telle compilation, qui consiste à recenser les ouvrages imaginaires glanés dans la littérature ? Certes, depuis le temps que l’on nous cite l’exemple du Necronomicon (bâillement poli de votre serviteur), il devenait nécessaire de nous fournir d’autres exemples propres à exciter l’amygdale, non loin de notre hippocampe. Le seul obstacle à une telle entreprise résid
e dans l’érudition et la verve accumulatrice de l’auteur, celui-ci devant prouver l’étendue de ses capacités par le nombre d’entrées dans ce registre. On se garde ici de les compter ou même de relever les lacunes. On se contente déjà de ce que l’on trouve en gardant à l’esprit que toute entreprise de recension autour de la littérature et de ses surgeons se voue à l’incomplétude. Satisfaisons-nous alors de l’existence virtuelle d’un ouvrage comme Des trappes à souris et de leur influence sur l’âme et l’activité des chats (dans Le Chat Murr, d’Hoffmann) ou la continuation du canular de l’Action française de façon imprévisible par Jacques Roubaud qui, dans sa série d’Hortense, cite un ouvrage consacré à la Poldévone poldévique, par un certain Henri de Wachtendonck… et puis évidemment Perec et Le Voyage d’Hiver, d’Hugo Vernier, et puis l’œuvre de Ronceraille, et puis, et puis voilà.
Bien évidemment, un tel livre se feuillète de la même manière qu’on le fit avec Le guide de nulle part et d’ailleurs de Manguel et Guadaluppi, ici pour former un périple incertain et là, avec cette Bibliothèque invisible, pour fixer notre goût pour les voyages immobiles, ou presque, dans nos rayonnages. On reviendra dans quelques temps sur ce domaine du livre imaginaire, le sujet se révèle riche ! En attendant, pour vous récompenser de vous avoir fait poireauter dans notre salle d’attente, prenez donc cette prescription : un ou deux notices quand le besoin s’en fait sentir… ça ne vous fera pas de mal. Votre amygdale vous remerciera.

samedi 20 juin 2020

Le lendemain...


Un jour un' petit' châtelaine, enl'vée par des romanichels,
Fut mis' dans un' chambre malsaine,
Tout en haut d' la rue St-Michel ;
La p'tit' au caractèr' rieur, prit joyeusement son malheur :
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Les brigands furieux d'la voir rire lui attachèrent, les mains, les pieds,
Puis par ses cheveux la pendirent au plafond en face du plancher
Puis la laissant là, les voyous allèrent chez l'bistrot boire un coup
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Les bandits jaloux d'son courage un soir à l'heure de l'angélus
La jetèr'nt du sixième étage son corps tomba d'vant l'autobus
L'autobus qui n'attendait qu'ça sur la belle aussitôt passa.
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Mais les assassins s'acharnèrent
Sur elle à coups d'pieds, à coups d'poings
De mill' coups d'poignards la lardèrent
Pour lui faire passer l'goût du pain
Et pour en finir les ch'napans ils la noyèrent dans l'Océan.
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Au moment où la pauvre fille allait remonter sur les flots
Un sous-marin avec sa quille coupa son corps en deux morceaux.
Puis une torpill' qui éclata fit voler le reste en éclats.
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
La tempête, le vent et l'orage soulv'nt les vagues de l'océan
La petit' lutt' avec courage bravant le terribl' ouragan,
Mais le tonnerr' à ce moment tomb' et foudroie la pauvr' enfant.
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Elle disparut dans l'eau profonde
Une baleine lui bouffa les mains
Sa jolie chevelure blonde
Fut arrachée par les requins
Un p'tit' maqu'reau qui s'balladait
Lui barbotta son port' monnaie
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.
 
Vous croyez p't'être qu'elle en est morte
Et cependant il n'en est rien
Après cett' secousse un peu forte
La p'tite ne se sentait pas bien
Elle prit pour se remettr' d'aplomb
Un p'tit cachet d'pyramidon
 
Le lendemain, elle était souriante, à sa fenêtre fleurie, chaque soir,
Elle arrosait ses petit's fleurs grimpantes,
Avec de l'eau de son arrosesoir.

(Elle était souriante (1908) — Paroles d’Edmond Bouchaud, dit Dufleuve)
Sur la chanson et les conditions de sa création, voir ici.

vendredi 19 juin 2020

Et maintenant, quelques titres de Craig Strete

Toutes mes statues ont des ailes de pierre
Pour voir la cité assise sur ses édifices
Samedi soir au poste d’observation de la femme blanche
Just like Gene Autry (Foxtrot) — version Cherokee de « Jésus-Christ est entré dans notre vie »
Vieille, si vieille, mais sans âge en cette science
Conte de fées à Wounded Knee
Un cheval d’un autre technicolor
Une corde autour de chaque monde
Où ils ont mis les agrafes et pourquoi elle a ri
La cruauté de ton visage
Un lieu pour mourir sur la photographie de ton âme
Pourquoi la vierge Marie n’est-elle jamais entrée dans le wigwam de Standing Bear ?
L’oiseau du piano
Quel fut le premier oscar à recevoir un nègre
L’homme qui saigne
Quand ils parlent
La haine est un amour infiniment douloureux