Hier,
un monsieur très sérieux m'a
fait une demande très particulière. Un ouvrage épuisé traitant d'une
partie de
la mythologie basque. Comme je ne connaissais ni l'auteur ni le titre,
j'ai
bien pris note des références et de ses coordonnées car il en avait un besoin urgent. Verdict après quelques clics : l'unique mention de la chose se trouve dans la désencyclopédie, en bas de page, dans les « sources ». J'avais oublié combien c'était drôle, cette désencyclopédie. |
mercredi 22 novembre 2023
Une historiette de Béatrice
mardi 21 novembre 2023
Paf, dans ma bibliothèque !
Votre Tenancier a été longtemps
salarié dans une librairie
du XVIe arrondissement de Paris. L’un des intérêts annexes
de cette
activité fut le spectacle d’une faune assez remarquable... La rubrique
présente
me donne l’occasion d’évoquer une figure discrète et amusante qui fit
quelques
visites dans nos murs, non pour des livres d’art ni dans le but
d’acquérir des
ouvrages bibliophiliques, mais afin de faire l’emplette de quelques
10/18,
comme — si je crois m’en souvenir près de 25 ans plus tard —
la série
des « Frère Cadfaël » ou d’autres polars
historiques que la collection produisait alors. C’était une marquise
authentique, telle qu’on l’imaginerait dans quelque dessin gentiment
moqueur
dans une revue bien élevée : brushing et minceur à la limite de la
maigreur, ce qui me faisait immanquablement penser que la noblesse
avait quitté
certaines amplitudes dignes de Botero pour acquérir une silhouette à la
Giacometti, à l’inverse des gueux actuels qui tendent vers l’obésité.
Avec ça,
la façon de s’habiller désinvolte d’une délurée bon chic des fifties,
mais avec
une sobriété remarquable du côté de la joncaille. Bref, Madame la
Marquise ne
se montrait pas bégueule, signe éloquent d’éducation, qui ne permettait
certes
pas de lui taper dans le dos, mais qui rendait son commerce agréable.
Je ne me
rappelle plus de quelle manière je pris connaissance de son titre
nobiliaire,
peu importe d’ailleurs. Je m’amusais de cette présence qui s’égaya
encore plus le
jour où elle exhiba un superbe face-à-main pour mieux lire un résumé…
J’étais
conquis, irrémédiablement fan de Madame la Marquise ! La conversation
était brève en sa présence,
mais elle se surprit sans doute elle-même à me confier qu’il lui
arrivait de
regarder le Tour de France à la télévision « en
compagnie de Mère, car les paysages de notre pays sont magnifiques ».
Je touchais alors
peut-être à cette sorte d’esprit qui attachait certaines familles au
terroir
idéalisé, ou bien peut-être me plais-je à romancer tout cela... Il
n’empêche :
chaque fois que je tombe sur la course, je pense à Madame la Marquise.
Il n’en fallait pas plus que, retombant sur la couverture des chroniques de Blondin, je me remémore cette réflexion et le plaisir du pastiche « Grand-Siècle » auquel s’était livrée l’auteur (La nouvelle s’est répandue en fin de matinée sur le ton du « madame se meurt !... Madame est morte !... » Et pendant un moment, nous fûmes dans l’expectative atroce d’une femme du monde qui a laissé ses diamants sur la toilette de lavabos. — Étape de Bayonne, 19 juillet 1954). L’immense arpentage enguirlandé de pastiches de Bernanos, de Saint-Simon, de Péguy, etc. eût été apprécié par Madame la Marquise, je crois. L’avait-elle acheté ? Je n’étais plus là pour le savoir… Avec ses façons de mémorialiste goguenard, Blondin nous remet sur les brisées d’une littérature qui n’oublie pas ses classiques, au milieu des odeurs d’embrocation et de graisse de chaîne à vélo. Quel plaisir ! Votre Tenancier en picore un peu avant de dormir, le cœur léger, avec cette saveur des noms engloutis : Koblet, Dotto, Laurédi et plus tard, peut-être, un certain Letort, Désiré — rien à voir avec le Tenancier, qui, parfois, accorde une pensée à la Marquise.
Il n’en fallait pas plus que, retombant sur la couverture des chroniques de Blondin, je me remémore cette réflexion et le plaisir du pastiche « Grand-Siècle » auquel s’était livrée l’auteur (La nouvelle s’est répandue en fin de matinée sur le ton du « madame se meurt !... Madame est morte !... » Et pendant un moment, nous fûmes dans l’expectative atroce d’une femme du monde qui a laissé ses diamants sur la toilette de lavabos. — Étape de Bayonne, 19 juillet 1954). L’immense arpentage enguirlandé de pastiches de Bernanos, de Saint-Simon, de Péguy, etc. eût été apprécié par Madame la Marquise, je crois. L’avait-elle acheté ? Je n’étais plus là pour le savoir… Avec ses façons de mémorialiste goguenard, Blondin nous remet sur les brisées d’une littérature qui n’oublie pas ses classiques, au milieu des odeurs d’embrocation et de graisse de chaîne à vélo. Quel plaisir ! Votre Tenancier en picore un peu avant de dormir, le cœur léger, avec cette saveur des noms engloutis : Koblet, Dotto, Laurédi et plus tard, peut-être, un certain Letort, Désiré — rien à voir avec le Tenancier, qui, parfois, accorde une pensée à la Marquise.
Rien à voir non plus, avec ce petit bouquin de la collection Samizdat qui fait le point sur les mécanismes de diffusion de la culture et amorce quelques réflexions sur, par exemple, les « Créative Commons » et le « Copyleft » (dont on espère une traduction un jour). Ouvrage à recommander à ceux qui se font encore des illusions sur le métier d’éditeur, la vocation d’écrivain, etc. Bien entendu, votre serviteur connaît à peu près tout cela. Ajoutons que le bouquin est clairement destiné à circuler dans les boîtes à livres. Toutefois, vous pouvez faire tintin avec cet exemplaire. Je le garde, tudieu, comme tous ceux de cette collection !
Vous connaissez l'auteur pour le rencontrer en ce moment, deux fois par semaine, dans ces colonnes...
lundi 20 novembre 2023
Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 15
de Terrèbre
Angers — Éditions Deleatur, 1995
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques voyageurs
Angers — Éditions Deleatur, 1995
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques voyageurs
Le Tenancier : Tu as été pendant longtemps l’éditeur de Jacques Abeille, pour Le Cycle des Contrées ainsi que d’autres textes proches de cet univers Cette Lettre de Terrèbre brouille la limite entre le narrateur et l’écrivain, convoquant également son alter ego, Leo Barthe. Cette frontière en question concerne aussi le rêve et son influence dans le réel… La Lettre rentre tout à fait dans le projet apparent de la collection, qui refuse souvent de prendre partie vis-à-vis de la réalité. A-t-il rédigé ce texte pour la collection, ou bien vos intérêts convergeaient-ils naturellement ?
La place manque sans doute pour évoquer ta relation entre Jacques Abeille et Deleatur… ceux qui veulent en savoir plus doivent se procurer ton article : Jacques Abeille, le jardin refermé, dans la revue Le Novelliste n°6, paru en décembre 2022.
Pierre Laurendeau : O Tenancier, quelle belle introduction ! Qui donne envie de lire l’œuvre abeillienne…
Comme tu l’écris, j’ai été l’éditeur (souvent occulte, voire occulté) du Cycle des Contrées, transmettant Les Jardins statuaires à Bernard Noël en 1981. Tu renvoies avec raison à l’hommage paru dans Le Novelliste, qui éclaire, je pense, les relations cahoteuses, voire chaotiques, entre Jacques Abeille et Deleatur (il fut longtemps le président de l’association).
La Lettre fut une commande que je lui passai à l’occasion d’une présentation du Cycle à la bibliothèque municipale d’Angers, à l’automne 1995. L’équipe de la bibliothèque, menée par Agnès Chevalier, était alors ouverte sur la création. Malheureusement, le départ de la conservatrice en chef, en début d’année 1996 si je me souviens bien, entraîna la dislocation de l’équipe qui l’avait suivie : Louis Torchet, un médiéviste amateur d’éditions rares – qui se régalait avec les tirages de tête de Deleatur –, rejoignit la bibliothèque d’Autun, où il put se plonger dans les manuscrits et les incunables ; quant à Jean-Claude Gautier, il repartit vers sa terre d’origine et devint un des référents de la DRAC d’Aix-Marseille pour le livre. C’est le seul avec qui j’ai toujours contact.
Donc, comme une sorte de chant du cygne de nos belles collaborations, que je savais à leur terme, j’avais proposé à l’équipe de bibliothécaires un rendez-vous autour des Contrées – dont seuls étaient disponibles à l’époque Les Jardins statuaires Le Veilleur du Jour (les deux chez Flammarion), La Clef des ombres (Zulma), les Carnets de l’explorateur perdu (Ombres), ainsi que les deux fragments des Voyages du Fils, parus dans la collection Les Indes oniriques : L’Homme nu chez Deleatur ; Les Lupercales forestières aux éditions du Lézard – en effet, cette collection avait vocation à être nomade. Le troisième volet, L’Auberge verte, devait paraître au Fourneau mais cela ne se fit pas ; il fut agrégé lors de l’édition des Voyages, toujours dans la collection Les Indes oniriques, mais chez Ginkgo, en 2007.
J’avais demandé à Jacques une sorte d’abstract, comme disent les universitaires, qui permette aux personnes présentes à la soirée de la bibliothèque d’avoir un aperçu de l’ampleur de ses paysages intérieurs. Notons que la Lettre est écrite par Ludovic Lindien, qui jouera un rôle prépondérant dans les deux derniers romans du Cycle, parus peu avant la mort de l’auteur.
Ce qui est singulier dans le process d’écriture de Jacques Abeille, c’est à la fois un schéma d’ensemble qui l’habitait depuis la fin des années 70 – il me confiait en 1984 qu’il avait le plan de tous les livres du Cycle en tête – et sa capacité à y agréger des épisodes épars qu’il n’avait pas nécessairement conçus pour cela : par exemple Louvanne, qui parut à l’enseigne de Deleatur en 1999.
Je ne sais pas… et qui pourrait le savoir ! – si l’apparition de Ludovic Lindien dans la Lettre de Terrèbre fut l’élément déclencheur de son rôle essentiel dans les romans finaux ou si Jacques Abeille avait déjà prévu pour lui cet avenir lumineux.
Détail amusant : sur le rabat de couverture, dans la bibliographie de Jacques Abeille (qui s’est étoffée depuis !), pour les romans de Léo Barthe, il est précisé qu’ils sont traduits du terrébrin par Georges Le Gloupier, l’alias de Jean-Pierre Bouyxou, auquel Jacques était très lié, notamment lors de leur jeunesse bordelaise.
dimanche 19 novembre 2023
Salauds d'athées...
Une petite chose m’amuse beaucoup
lorsque l’on croise une critique
du fanatisme religieux : l’on trouve presque systématiquement un
contradicteur vous signifiant que ce n’est pas mieux du côté des
athées, et de
citer comme exemple Pol Pot et Staline. On a été voir du côté de leur
bio sur
ouikipédia :
En 1934, Saloth Sâr [véritable nom de Pol Pot] est envoyé par son père à Phnom Penhnote pour parfaire son éducation (le village ne possédant ni école ni wat), comme son grand frère Chhay avant lui. Il intègre le Wat Botum Vaddei, un monastère-école à proximité du palais royal et tenu par le Dhammayuttika Nikaya, proche du pouvoir. Véritable village, ce wat accueille chaque année une centaine de novices, âgés de 7 à 12 ans. L'éducation religieuse qui y est apportée est rigoureuse, l'organisation de la vie des apprentis et des moines stricte et l'individualité prohibée. Saloth Sâr y passe un an et semble avoir apprécié cette période. |
Après
avoir brillamment réussi ses examens, Iossif
Djougachvili [alias Staline] entre en 1894 au séminaire de Tiflis et y
reste
jusqu'à l'âge de 20 ans. Il y suit un enseignement secondaire général
avec une
forte connotation religieuse. Surnommée le « Sac de pierre », l'école a
sinistre réputation. ... En décembre 1941, alors que les Allemands approchaient de Moscou, Staline aurait ordonné que l'icône [Notre-Dame de Vladimir] fût placée dans un avion qui fît le tour de la capitale assiégée. L'armée allemande commença à se retirer quelques jours après. |
La formation des élites, y’a rien de tel…
samedi 18 novembre 2023
Une historiette de Béatrice
vendredi 17 novembre 2023
jeudi 16 novembre 2023
Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 14
Pierre Laurendeau
Le Piège
Angers — Éditions Deleatur, 1995
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages,
dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995
sur
les presses de Deleatur pour le compte de quelques jolies guêpes.
Le Tenancier : Joli conte
cruel que ce Piège ! Dans ton dernier recueil (Le Passage clandestin, dans ta
collection Samizdat) tu fais le compte de tes influences : Topor,
Bettencourt et Cavazzoni — encore un auteur à ajouter sur ma liste.
Faut-il
également songer à Jacques Sternberg ?
Pierre Laurendeau : Sternberg ? Je n’y avais pas songé ! Merci de me le rappeler… Ce Piège a été écrit une fin d’été particulièrement riche en guêpes et frelons. Nous avions installé sur la terrasse un piège à guêpes très simple : on découpe une bouteille d’eau minérale aux deux tiers et on inverse la partie haute, qui devient entonnoir. Dans la partir basse, un mélange de substances à base de miel (pour les riches) ou de sucre (pour les pauvres). L’an dernier, notre petit-fils, Martin (5 ans), nous a suggéré d’ajouter au mélange du café. Les pièges ont été redoutablement productifs : guêpes et frelons se piétinaient littéralement jusqu’à former une couche compacte de quelques centimètres d’épaisseur, les vivants pataugeant dans une espèce de boue constituée du liquide initial et des morts. Plusieurs scènes de cannibalisme pour ajouter une touche d’horreur à ce spectacle peu ragoûtant… Et je pensais à mon conte, cruel certes, mais bien plus fade que la réalité !
Pierre Laurendeau : Sternberg ? Je n’y avais pas songé ! Merci de me le rappeler… Ce Piège a été écrit une fin d’été particulièrement riche en guêpes et frelons. Nous avions installé sur la terrasse un piège à guêpes très simple : on découpe une bouteille d’eau minérale aux deux tiers et on inverse la partie haute, qui devient entonnoir. Dans la partir basse, un mélange de substances à base de miel (pour les riches) ou de sucre (pour les pauvres). L’an dernier, notre petit-fils, Martin (5 ans), nous a suggéré d’ajouter au mélange du café. Les pièges ont été redoutablement productifs : guêpes et frelons se piétinaient littéralement jusqu’à former une couche compacte de quelques centimètres d’épaisseur, les vivants pataugeant dans une espèce de boue constituée du liquide initial et des morts. Plusieurs scènes de cannibalisme pour ajouter une touche d’horreur à ce spectacle peu ragoûtant… Et je pensais à mon conte, cruel certes, mais bien plus fade que la réalité !
mercredi 15 novembre 2023
Avertissement
Je frissonne à l’idée que des
locdus de bas étage, des
ambitieux sans scrupules, des amoindris, des refoulés, des invertébrés,
des
combinards, des zaprogains, des vicieux et des pommes-à-l’eau
pourraient avoir
la prétention de se reconnaître dans les merveilleuses pages qui
suivent.
Cette histoire est fictive ainsi que tout son matériel. D’ailleurs la vie ne serait pas fichue d’inventer des trucs pareils. Qu’on se le dise !
S.A.
|
mardi 14 novembre 2023
Tacatacatacatacatacatac (ding !)
Leroy Anderson : Typewriter (1950) par le Brandenburger Symphoniker
lundi 13 novembre 2023
Bibliographie commentée des Minilivres aux édition Deleatur — 13
Charles Perrault
Le Petit
Chaperon rouge
Angers — Éditions Deleatur, 1995
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages,
dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995
sur
les presses de Deleatur pour le compte de quelques croqueurs de galettes
Le Tenancier : On oublie
un peu trop souvent la cruauté
des contes de Perrault et en général des littératures enfantines des
siècles
passés. Serait-ce par hasard le terreau d’un certain fantastique qui se
développe
de façon souterraine en France et dont on découvre des résurgences ici
et là,
comme dans cette collection ?
Pierre Laurendeau : Tu as raison, ô Tenancier ! Les contes pour enfants sont cruels, c’est en cela qu’ils sont formateurs de défenses psychologiques. Un enfant qui ne lirait que des histoires de parents séparés et de classes multiculturelles (je ne dis pas qu’il n’en faut pas) ne connaîtrait pas ce frisson salvateur de la peur du loup. L’hiver dernier, nous avons accueilli à la montagne une nièce de ma femme, qui est venue avec sa fille de 7-8 ans, très dégourdie et d’une curiosité de tous les instants… Je les ai emmenées se promener au-dessus de notre maison et, tout en marchant dans la neige, j’ai parlé du loup, très présent dans notre coin des Hautes-Alpes. Je sentais la jeune Manon à la fois excitée et inquiète. « Tu crois qu’on va en voir un ? » me demande-t-elle. Je lui réponds : « C’est peu probable, mais on verra peut-être ses traces dans la neige… » Juste à ce moment-là, nous débouchons sur un pré (enneigé) avec un reste de massacre de chevreuil – du sang, des poils et une mâchoire inférieure caractéristique. Je me tourne vers Manon, un peu inquiet : « Hum… là, ce n’est pas très cool… » Elle se précipite vers la mâchoire : « Génial ! » Et, se tournant vers sa mère : « Est-ce qu’on peut la rapporter chez nous ? » L’anecdote est révélatrice de l’écart entre l’idée que se font les adultes (notamment les éditrices jeunesse) de ce qu’un enfant peut « encaisser » et l’envie qu’ils ont de se mettre en inquiétude !
Les contes de Perrault, ou ceux des frères Grimm jouent de ce ressort, de même que les récits d’aventures comme L’Ile au trésor, avec l’inquiétant Long John Silver…
D’ailleurs, les éditions pour la jeunesse du Petit Chaperon rouge omettent bien souvent la moralité finale, qui contient un avertissement explicite :
On voit ici que de jeunes enfants,
Surtout de jeunes filles
Belles, bien faites, et gentilles,
Font très mal d’écouter toute sorte de gens,
Et que ce n’est pas chose étrange,
S’il en est tant que le Loup mange.
Je dis le Loup, car tous les Loups ne sont pas de la même sorte ;
Il en est d’une humeur accorte,
Sans bruit, sans fiel et sans courroux,
Qui privés, complaisants et doux,
Suivent les jeunes Demoiselles
Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ;
Mais hélas ! qui ne sait que ces loups doucereux,
De tous les loups sont les plus dangereux.
Pierre Laurendeau : Tu as raison, ô Tenancier ! Les contes pour enfants sont cruels, c’est en cela qu’ils sont formateurs de défenses psychologiques. Un enfant qui ne lirait que des histoires de parents séparés et de classes multiculturelles (je ne dis pas qu’il n’en faut pas) ne connaîtrait pas ce frisson salvateur de la peur du loup. L’hiver dernier, nous avons accueilli à la montagne une nièce de ma femme, qui est venue avec sa fille de 7-8 ans, très dégourdie et d’une curiosité de tous les instants… Je les ai emmenées se promener au-dessus de notre maison et, tout en marchant dans la neige, j’ai parlé du loup, très présent dans notre coin des Hautes-Alpes. Je sentais la jeune Manon à la fois excitée et inquiète. « Tu crois qu’on va en voir un ? » me demande-t-elle. Je lui réponds : « C’est peu probable, mais on verra peut-être ses traces dans la neige… » Juste à ce moment-là, nous débouchons sur un pré (enneigé) avec un reste de massacre de chevreuil – du sang, des poils et une mâchoire inférieure caractéristique. Je me tourne vers Manon, un peu inquiet : « Hum… là, ce n’est pas très cool… » Elle se précipite vers la mâchoire : « Génial ! » Et, se tournant vers sa mère : « Est-ce qu’on peut la rapporter chez nous ? » L’anecdote est révélatrice de l’écart entre l’idée que se font les adultes (notamment les éditrices jeunesse) de ce qu’un enfant peut « encaisser » et l’envie qu’ils ont de se mettre en inquiétude !
Les contes de Perrault, ou ceux des frères Grimm jouent de ce ressort, de même que les récits d’aventures comme L’Ile au trésor, avec l’inquiétant Long John Silver…
D’ailleurs, les éditions pour la jeunesse du Petit Chaperon rouge omettent bien souvent la moralité finale, qui contient un avertissement explicite :
On voit ici que de jeunes enfants,
Surtout de jeunes filles
Belles, bien faites, et gentilles,
Font très mal d’écouter toute sorte de gens,
Et que ce n’est pas chose étrange,
S’il en est tant que le Loup mange.
Je dis le Loup, car tous les Loups ne sont pas de la même sorte ;
Il en est d’une humeur accorte,
Sans bruit, sans fiel et sans courroux,
Qui privés, complaisants et doux,
Suivent les jeunes Demoiselles
Jusque dans les maisons, jusque dans les ruelles ;
Mais hélas ! qui ne sait que ces loups doucereux,
De tous les loups sont les plus dangereux.
Un p'tit peu de lecture...
Le numéro ne va pas tarder à paraître et votre Tenancier chéri y figure en bonne compagnie. Rendez-vous à la fin du mois... mais il n'est pas interdit de souscrire ici.
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