Il existe des périodes fastes en
matière de trouvailles,
même si cela concerne des choses très connues déjà, pour plusieurs
raisons.
Commençons par une bienveillance lointaine, celle de Béa, de
la Bouquinerie Kontrapas qui m’a expédié le Bukowski manquant dans mes
rayonnages (excepté la poésie, simple impéritie de ma part). Que dire
sur cet
auteur qui n’a été déclaré sinon verser dans les clichés et les a
priori pour
pas mal de personnes. Cette chronique publiée dans le journal Open
Press remet
en perspective — comme chacun de ses livres — la vision que nous
devrions
en garder : un sacré prosateur, bien servi, je trouve par
Gérard
Guégan, auteur d’une postface pour le présent ouvrage. Je retourne à
Bukowski
de temps à autre. La fréquentation me remet à ma place lorsque j’évoque
le
travail d’écriture : pas très haut en définitive, à mesurer la
distance
qui me sépare d’un véritable écrivain. Voilà un exercice salutaire…
Comme j'avais reçu le Bukowski la veille, le lendemain je
me suis résolu à aller commander le Connel,
Le
jeu le plus dangereux, dont je vous rebats les oreilles depuis un
certain
temps : il s’agit de Zaroff, encore !
Attendons de satisfaire cette lubie, sous peu. Bien sûr, j’ai fait un
crochet à
la boîte à livres. J’y ai découvert un bordel immonde. On aimerait que
l’endroit
soit respecté. Mais je t’en fiche : les bouquins sont empilés
n’importe
comment, gauchis, maltraités. De quoi désespérer ?
Même pas, puisque l’on sait de longue date que les gens sont des cons
et des gougnafiers.
Quand c’est gratuit, pourquoi se gêner, hein ?
Allez, on a trouvé un Peter Ackroyd, mais en langue anglaise, ce qui
m’arrange
moyen parce que je la maîtrise assez peu. Toutefois, l’envie me donnera
peut-être des facilités à l’égard d’un auteur au corpus assez
intrigant, en
tout cas pour moi. Au moins j’aurais essayé, encore une fois. L’autre
volume
trouvé dans un état très propre (petite odeur de renfermé, quand même)
est un
Sheckley que je possédais jadis dans ma bibliothèque (mon rayon SF
occupait une
place importante). Plus de vingt ans plus tard, après m’être débarrassé
de
presque tous ces volumes, voici qu’un peu de nostalgie me cueille au
débotté.
Tant pis pour moi, ou tant mieux : relire du Sheckley ne se révèle
pas la
pire punition que l’on puisse s’infliger (j’ai des noms, mais je ne
suis pas
une balance).
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Dans l’aimable sous-préfecture où je réside, quelques
auteurs trouvent un refuge paisible et il nous arrive désormais de nous
réunir
tous les mois autour d’un repas. Nous le prenions à L’Improbable,
restaurant
qui faisait aussi brocante, c’est-à-dire que vous pouviez repartir avec
la
table, les chaises, les couverts, mais également des bibelots parfois…
improbables
et le tout à des prix démocratiques — même de démocratie
populaire, me
risquerais-je à affirmer. « À
cause d’eux », je
me retrouve à la tête d’une collection de près de 300 buvards
publicitaires ! C’est malin... Ils
ferment, victimes de la pandémie avec un peu de retard, mais également
de l’augmentation
de tout… et sans doute par un peu de lassitude. Ils ferment, donc,
alors depuis
quelques semaines ils ne font plus à manger, mais il déballe leur
fonds. Puisqu’il
n’y avait que quelques pas depuis la boîte à livre nous y sommes
rentrés pour
dire bonjour à Katia et à Tony, adorables de
coolitude.
Je suis tombé en arrêt sur une étagère ou traînaient encore des appâts
à
nostalgie, entre deux jouets en fer blanc :
— un Kurt Steiner plus beau que celui que je possède
— des numéros de la revue Fiction où, tiens, je
retrouve Sheckley, mais également le très rare François Valorbe, Walter
Tevis,
ce curieux John Anthony West (
Un mari à l’engrais)
qui allait devenir un « égyptologue » hétéroclite et puis des
personnes que j’ai eu le bonheur de publier : Philippe Curval,
Jean-Claude
Forest et Gérard Klein. Nous les retrouvons d’ailleurs dans :
— ce numéro spécial de Fiction (n° 4 :
Anthologie
de la SF française), rejoints
par un certain André Ruellan qui signa nombre de romans sous le nom de…
Kurt
Steiner. Les livres d’André, ou ceux où figurent ses nouvelles font
partie des
rares bouquins du genre conservés avec soins dans un recoin de la
maison, en
souvenir de trop fugaces rencontres, passionnantes.
Évidemment, devais-je laisser tous ces beaux exemplaires à
la concupiscence d’une tierce personne, sachant la profession de foi
que je
clamais quelques lignes plus haut, vis-à-vis de ces connards de gens,
même s’ils
évitent cet antre-là ?
Pourtant, j’avais, lors de ma crise des 40 ans, largué les amarres du
monde de
la SF dans lequel d’ailleurs je m’étais peu intégré pendant la presque
vingtaine d’années où j’y avais eu des activités. La sagesse
venant, la
vieillesse aussi peut-être, l’on se permet le loisir d’un retour sans
risque
sur des sentiers balisés. Ce n’est certes pas avec ces pioches-là que
je me
trouverai à la pointe de l’actualité du genre. Mais vous savez quoi ?
Je m’en fous.
Il n’empêche, où va-t-on se retrouver pour discuter le bout
de gras, maintenant, que l’Improbable est fermé ?
Charles Bukowski :
Journal d’un vieux dégueulasse (1969), traduction et postface de Gérard
Guégan —
Grasset, 1996
Robert Sheckley :
Et quand je vous fais ça, vous sentez quelque chose ? Le livre de
Poche,
1977
Peter Ackroyd :
The House of Doctor Dee — Penguin, 1994
Kurt Steiner :
Menace d’Outre-Terre — Fleuve Noir Anticipation, 1958
Fiction n° 30, mai
1956
Fiction n° 113, avril
1963
Fiction n° 144, mai
1963
Fiction n° 124, mars
1964
Fiction Spécial n° 4
(112 bis) : Anthologie de la science-fiction française, 1963