vendredi 26 août 2016

Triste Trieste

« Lâcheur est Trieste, hélas ! et j'ai lu tous les livres. »  
George WF Weaver (28 juillet 2016 à 21:09)
 
« Cela étant, il faut savoir que, à proximité de ladite ville, les panneaux indicateurs affichent "Trst".
Je pourrais vous en parler, cher Tenancier, j'anecdoterai sur le sujet... »
Otto Naumme (29 juillet 2016 à 07:26)
 
« Au contraire, cher Tenancier, je pense que voilà une trieste nouvelle. »
Otto Naumme (5 août 2016 à 08:23)
 
« C’est le moment que choisit Carlo Papucci pour griffonner mystérieusement sur un carnet d’écolier ce curieux message presque en forme d’anagramme qu’il me tend ensuite avec un air de conspirateur souabe :

T T T T T
E R R R R
R I I S I
G E E T S
E S S
T
S T T
E
T E


U



M



(Latino) (Italiano) (Tedesco) (Slovène) (Sempre)
 
Tout est dit là ! Au carrefour des cultures et des langues, la ville-frontière cherche son unité et ne la trouve que dans une sorte de tristesse qui durera (sempre) toujours ! Il me rappelle ainsi que nous sommes dans une ville où, par dizaines, des adolescents romantiques se suicidèrent, des écrivains abandonnèrent leurs noms et choisirent des pseudonymes pour mieux s’intégrer, dans un endroit du bout du monde où la douleur semble d’abord essentiellement métaphysique. »
Franck Venaille : Trieste  (1985)
(Et pendant ce temps, la fille du Tenancier visite la ville...)

jeudi 25 août 2016

Le fond et la forme de Le Rouge

Puisque vous avez été quelques-uns à apprécier l'adaptation par Kafé du Mystérieux Docteur Cornélius de Gustave Le Rouge, voici deux planches supplémentaires. On notera, si l'on guette le numéro en bas à droite tous les deux strips, que cette division induit une parution en feuilleton dans la presse, de deux strips — justement —  en bas de page. Ce petit détail nous fait plaisir tant la fidélité se dénote aussi par d'infimes détails de forme.

Étonnement passager

Le lecteur s'étonnera sans doute du silence du Tenancier alors qu'il était si bien lancé. Qu'on ne s'inquiète pas. Le Tenancier digère...

mardi 16 août 2016

Une réapparition du Docteur Cornélius

Au XXe siècle commençant, Gustave Le Rouge aura pressenti la fièvre urbaine, à celui qui aura précédé il aura gardé la mémoire d’une littérature obsédée par des questions souterraines, comme celle de l’identité — Lon Chaney, était la face cinématographique de Le Rouge. Ci-joint la couverture et une planche de l’adaptation du Mystérieux Docteur Cornélius par Kafé. Il y a dans l’apparente naïveté des dessins et l’absence de tout lyrisme la même liberté que nous accorde Le Rouge dans ses romans : ne pas aller trop loin permet au lecteur de prolonger le récit par sa propre vision. Telle est cette culture populaire qui s’emploie à stimuler la rêverie de ses lecteurs et non la norme poussive à laquelle adhèrent nombre de nos contemporains, qui ont labellisé en « littérature de l’Imaginaire » une suite de stéréotypes. Le travail de Kafé donne une saveur analogue au premier jour où l’on a ouvert le Docteur Cornélius, avec une promesse que l’auteur pouvait tenir, en se reposant sur ses lecteurs. Le présent travail est inédit. On aimerait qu’il ne le reste pas longtemps. 

vendredi 12 août 2016

Charade

Encore une charade, de la même époque que la dernière fois :  

Tu perdras mon second, si tu n’as mon premier ;
En deux sens différents, mon tout peut le comprendre ;
Et si tu t’y prends bien, tu pourras me surprendre
Sur les lèvres d’Iris, ou bien dans ton grenier.  
(Par M. le Ch. De P***)
A vous de jouer, il suffit de me donner la solution en commentaire (au fait, signez d’un nom ou d'un pseudo, tout commentaire anonyme sera supprimé, même s’il est bon.) j'indiquerai alors la source.

Gazette du Vieux Paris, n° 13
(Numéro révolutionnaire)

jeudi 11 août 2016

10/18 — Daniel Wilhelm : Maurice Blanchot : la voix narrative




Daniel Wilhem

Maurice Blanchot : la voix narrative

n° 895

314 p.
Couverture de Pierre Bernard
Série « S », dirigée par Bernard Lamarche-Vadel
Volume quadruple
Achevé d'imprimer le 11 octobre 1974 sur les presses de l'Imprimerie L P.-F. L. DANEL à Loos (Nord)
N° d'édit. 695 - Dépôt légal n°8947 : 4e trimestre 1974

TABLE DES MATIÈRES :

LA DISSIMULATION

ARGUMENT
I
II
III

LA FOLIE DE BABEL
1. Le récit, le nom
2. La distraction
3. La dessaisie
4. Le récit, le nombre
5. La dissimulation
6. Le dernier récit

L'INTERRUPTION

ARGUMENT
I
II
III

LE CONGÉ DE L'ORATEUR
1. L'intrusion
2. Le filé, le filon
3. L'impossible, l'inévitable
4. La voix séparée
5. L'interruption
6. La voix censurée

LE NEUTRE

ARGUMENT
I
II
III

PAR-DESSUS BORD
1. Les noms du neutre
2. Le livre au débit


(Contribution de Grégory Haleux)
Index 

mercredi 10 août 2016

De source sûre

Le moins qu’on puisse dire, c’est que vous n’avez pas été très brillants à deviner qui avait prononcé ses dernières paroles, lors d’un récent billet.
Puisque j’ai été surpris par Grégory dans le pillage d’une source que je ne voulais pas nommer dans les premiers temps (histoire de ne pas vous faciliter le travail), je serais bien empêché maintenant d’en celer plus à propos de cet ouvrage. Auparavant, il faut se rendre compte de l’état d’isolement dans lequel je me trouve, et l’état d’ennui manifeste qui m’anime quand j’ose mettre le nez dehors. Certains ont recours au caboulot, moi je passe la porte du bouquiniste du coin (et pas trop le libraire, qui me coûterait un peu trop de sesterces pour ma boulimie) sans idée préconçue, cela va de soi. C’est ainsi que je suis tombé sur l’ouvrage qui m’a servi pour ce jeu un peu mortifère, je le conçois. Il s’agit des Miscellanées de Mr. Schott, ouvrage anglais dans son essence et dont l’adaptation est assez fidèle pour la mise en page et l’édition « hard cover ». C’est un livre qui ne sert à rien et qui s’avère indispensable si vous ne songez pas à le lire méthodiquement. D’ailleurs, il n’y a aucun ordre dans la succession des rubriques, ce qui est un peu le propre des miscellanées. Ainsi, l’on passe des Axiomes & postulats d’Euclide (« Les grandeurs égales à une même grandeur sont égales entre elles. ») au Code irlandais du Duel (1777 — « Le seconds doivent tenter une conciliation avant la rencontre, ou bien après un échange de feu ou de coups jugé suffisant. »), à un bref glossaire en yiddish en passant par Quelques Canadiens célèbres (aucun intérêt pour moi, je n’en citerai donc pas). Bien sûr vous trouverez également ce qui a fait la matière de notre P.P.C. : la rubrique intitulée Ultima verba. Outre que ce petit ouvrage fait perdre du temps, la somme des connaissances qui y sont enfermées ne rendront même pas service en cas de naufrage ou de fin du monde (au cas où vous seriez un survivant, le mort est peu lecteur). Mais doit-il forcément avoir une utilité ? Rien n’est moins sûr. Je vois toutefois deux cas de figure pour l'infirmer, plutôt ludiques, en dehors de la possibilité de vous poser des colles :
1. Convenir avec un proche avant de se rendre à une soirée entre amis d’introduire dans la conversation un de sujets du livre, pris au hasard. On doit s’assurer que le sujet devra tenir un temps déterminé — un quart d’heure, une demi heure, voire plus — sans que bien évidemment personne d’autre ne soit au courant de la manœuvre. Le gagnant gagne le resto, le perdant le paye — ou devient esclave sexuel, éventuellement. Vous êtes adultes, vous saurez déterminé cela auparavant.
Le deuxième postulat est plus coton et demande du temps et de la motivation :
2. Prenez trois sujets, toujours au hasard et rédigez une histoire où devront rentrer de façon crédible chacune des rubriques qui vous sont attribuées. Fixez une longueur et un temps donné. Pour le coup, vous serez obligé de disserter dans une fiction convaincante de sujets divers tels Les Clubs londoniens, Les appels du maître d’équipage et Les pays membres de l’OTAN. « Facile », me diriez-vous, il suffit d’écrire une aventure inédite de James Bond qui commence dans un de ces clubs, continue dans un sous-marins (n’oublions pas que James a le grade de Commander) et s’achève au siège de l’OTAN. Je répondrais : « Bien joué, Petit Scarabée, alors que dirais-tu des Pierres de naissance, des Scores à la canasta et de L’échelle de coma de Glasgow ? Tu fais moins le malin… Tu as quinze jours, ce qui montre ma mansuétude. C’est marrant : quinze jours et quinze mille signes au minimum. Au boulot. »
Et ne vous laissez pas avoir par les sentiments. Ces écrivains, ils sont tous pareils.
Bon, maintenant, il faut vous procurer le livre. J’ignore s’il est encore disponible, cette édition-là date de 2006 et, au fond, je m’en fous. J’ai mon exemplaire. C’est ce qui compte. 


Jaquette sale mais intérieur très frais, comme une princesse en haillons, mais avec un intérêt sexuel moindre, toutefois 
(c'est comme cela que nous préférons les princesses, nous autres, sinon.)

Une fable express du Tenancier

À Chantilly, de tous les soigneurs, c'est bien monsieur Mali que les chevaux préfèrent et ils manifestent bruyamment leur plaisir à être bouchonnés par lui.

Moralité :

Henni, soit, qui Mali panse.

mardi 9 août 2016

10/18 — Ludovic Janvier : Pour Samuel Beckett




Ludovic Janvier

Pour Samuel Beckett

n° 796

(Les Editions de Minuit, 1966)
448 p.
Folioté jusque 28
Couverture de Pierre Bernard, Photo Le Seuil éd
Volume quadruple
Achevé d'imprimer le 12 juin 1973 sur les presses de l'Imprimerie Bussière, Sain-Amand (Cher)
N° d'édit. 591 - N° d'imp. 747 - Dépôt légal : 3e trimestre 1973

TABLE DES MATIÈRES :

DESCRIPTION D'UN TRAJET

Seuil
Du voyage manqué à la chambre mère
Naître et parler
Les deux naissances
Le temps à deux
L'écho
Le souffle
Être vu se dire

LES CERCLES DE L'HUMOUR

L'écriture
Les jeux de mots
Les autres
Les occupations de l'être
Quel rire ?

L'A VENIR DES MOTS


Une vie par éclairs
Note
Combinaison et liberté : le bilinguisme
Les nouvelles
Deux écrivains au travail
Départ des mots, mots du départ
Mieux que du temps de la faconde
Le souffle et la tension
Silence, à venir, musique
Dire

TROIS NOTES


Beckett et autres
« M »
Chapeau - Père - Opération gigogne



(Contribution de Grégory Haleux)
Index 

samedi 6 août 2016

P.P.C. II

Il y a deux un an, nous vous avions conviés à un petit jeu morbide. Nous récidivons en reprenant la même formulation : quelques littérateurs (et nous rajoutons ici quelques artistes pour faire bon poids) ont pris congé avec une dernière parole. Saurez-vous retrouver les auteurs des phrases suivantes ?
 
I.
— « Ne baissez pas le store ! Je suis bien. Je veux que le soleil me salue. »
 
II.
— « Maintenant, je suis à la source du bonheur. »
 
III.
— « J’ai bu dix-huit whiskeys sec, je crois que c’est un record. »
 
IV.
— « Mozart ! »
 
V.
— « Ou ce papier peint disparaît, ou c’est moi. »
 
VI.
— « C’est assez. »
 
VII.
— « Quel artiste périt avec moi ! »
 
VIII.
— « Oh, je suis tellement las de tout ça. »
 
IX.
— « Est-ce que personne ne me comprend ? »
 
Là aussi, on vous prie de donner vos réponses dans les commentaires et d’éviter les ressources du net. Le Tenancier se fera un plaisir de vous mettre sur la voie et cela alimentera le plaisir de la conversation.
 

(Illustration : José Guadalupe Posada)

Gazette du Vieux Paris, n° 12
(Numéro « Louis XVI »)

vendredi 5 août 2016

Un fable express du Tenancier

Déterminé, le torero muet apprend à parler en s’appropriant Walden, mais il continue à user d'un klaxon comme Harpo.
 
Moralité :

Il prend le Thoreau, parle et corne.

Une contrepèterie de George

Non seulement il en fait dans les commentaires, mais il en destine pour les billets de notre blogue. La voici donc :

Rien de tel pour les grands verruqueux que la Côte d'Azur.

Ne demandez la clef pas au Tenancier, il patauge. On compte donc sur George pour nous confirmer ce que vous avez pu trouver.

Encore des navions






Toujours piquées dans un Lecture pour Tous (juillet 1924), ces vignettes accompagnaient un article sur « L'avion sanitaire »...

mercredi 3 août 2016

Où Trieste fout la paix au Tenancier...

L’autre fois, je vous causais de la persistance de l’apparition de Trieste au gré des mes promenades littéraires. Depuis, je n’ai plus eu aucune manifestation, comme si le fait d’avoir exposé cette étrange obsession l’avait jugulée.
Bien, il suffit donc d’écrire sur ce blog pour en être débarrassé. Tant que cela reste dans nos domaines de prédilections, nous n’en demandons pas plus, n’est-ce pas ?

mardi 2 août 2016

10/18 — Henri Guillemin : Zola, légende et vérité




Henri Guillemin

Zola, légende et vérité

n° 546

(René Julliard, 1960)
192 p.
Couverture de Pierre Bernard, Photo : Roger Viollet
Volume simple
Impr. Union-Rencontre à Mulhouse (Ht-Rhin).
N° d'édit. 394 - N° d'imp. 4907/196 - Dépôt légal : 1er trimestre 1971

TABLE DES MATIÈRES :

Avant-propos

I. Émile (Claude) Zola
II. Zola et le catholicisme
III. Le « sieur » Zola et la police
IV. Claudel et Zola


(Contribution de Grégory Haleux)
Index 

lundi 1 août 2016

Pour les sagaces de l'Ancien Régime...

Eh oui, un petit jeu, pour renouer avec nos habitudes. L’énigme reproduite ici a été publiée au XVIIIe siècle. On donnera la source lorsqu’elle sera résolue.  
Tu m’entends, cher lecteur, mais tu ne peux me voir ;
Je règne en Souverain sur la machine ronde ;
Du Nautonnier souvent je suis l’unique espoir ;
Et bientôt ma victime, il va périr dans l’onde.
  Ce n’est pas très difficile…

Gazette du Vieux Paris, n° 11
(Numéro « Régence & Louis XV »)

samedi 30 juillet 2016

Un papillon jaune


On trouve parfois quelques prières d'insérer ou des publicités qui peuvent enrichir une collection ou même un ouvrage unique. Le petit papillon ci-dessus figurera bien dans l'un des ouvrages exposés dans la liste au verso et ici en regard.
Il vous suffira de trouver le papier mais également l'un des ouvrages...
Et puis aimer Rosny aîné, bien sûr !

(Cette notule a paru pour la première fois sur le blog Feuilles d'automne en décembre 2008)

vendredi 29 juillet 2016

Dans la cage...

« Monsieur René Barjean vient d’avoir, dans Le Gaulois, une miraculeuse idée. Cette idée, que Barnum regrettera toute sa vie de n’avoir pas eue le premier, consiste à exhiber, dans des vitrines spéciales de l’Exposition de 1900, nos meilleurs gendelettres, non pas en cire ou en toile, ce qui ne serait nullement miraculeux, mais vivants, oui, mesdames et messieurs, vivants ! Philosophes et historiens, poètes et romanciers, critiques et dramaturges, journalistes de tout poil et de toute format, chacun, amateur ou professionnel, y aura sa place et y exercerait publiquement ses fonctions, pourvu, toutefois, qu’il pût justifier d’une gloire quelconque ou d’une belle camaraderie. On pourra voir et toucher ! Les gendelettres à un mètre, comme la lune ! Tel est le programme. […] »
 
Octave Mirbeau : La gloire des lettres, in : Le Journal, 212 juillet 1895 — Repris dans Combats littéraires (ed. P. Michel et J.-F. Nivet) — 2006
 
Si l’idée n’a pas été appliquée lors de l’Exposition, elle a été néanmoins reprise en 1927 pour le lancement de Paris-Matinal en voulant enfermer Georges Simenon (Georges Sim à l’époque) dans une vitrine. (On parlait d’un contrat de 100 000 francs — et même 300 000 — pour l’auteur, au bas mot) Le projet ne se fit pas, à cause du scandale, semble-t-il. Néanmoins l’effet d’annonce profita à l’auteur avec la réputation immérité « d’écrivain à la cage de verre ». Ci-dessous un extrait des Dimanches de la femme : supplément de la "Mode du jour", de 1933. Déjà la légende s’en emparait.
 

(Source : BNF — Gallica)
 
Signalons que ce ne fut pas « les exigences » de Simenon qui firent capoter le projet puisqu’il empocha malgré tout l’argent du contrat, cage ou pas cage…

jeudi 28 juillet 2016

Trieste

Les coïncidences en matières littéraires abondent, elles se font parfois insistantes, à moins qu’au lieu d’évoquer le hasard on accuse un inconscient soudainement devenu réceptif à certaines stimulations. Tout à coup, des connexions s’opèrent, des substances chimiques dans le cortex sont libérées, des paramètres exotiques se font jour dans le psychisme. Autant penser à cela plutôt qu’à un message divin ou de la CIA, ce qui me porterait fâcheusement à porter une calotte confectionnées avec du papier alu sur ma calvitie désormais triomphante. J’aurais l’air fin. Généralement, les injonctions sont subtiles. On se dit « Tiens, c’est marrant, je viens à l’instant de finir son bouquin et voilà qu’il y a une émission sur Tartempion » ou bien le coup de fils d’un pote inquiet : « Ça fait la deuxième fois qu’on apprend la mort de quelqu’un après que tu ais acheté son livre ». Mais pour cette dernière remarque, on se réserve le plaisir de vérifier une troisième fois à propos d’écrivaillons. J’ai mes listes.
Parfois, aussi, l’insistance se fait lourde, au point qu’on pourrait se prendre pour le héros de Rencontre du troisième type obsédé par une montagne…
Moi, c’est Trieste.
Au départ, l’allusion débute avec une habitude plaisante mais pas tellement assidue, celle de l’écoute de l’émission Ville-mondes sur France Culture. Le hasard du butinage sur le site de la station m’avait fait aboutir à l’écoute de l’émission en deux parties avec le sentiment diffus d’être tombé dessus déjà (le passage sur le karst ne m’était pas étranger). Pour le plaisir de vos esgourdes on vous convie à l’écouter :
 
 

Jusque là nous ne sommes pas dans le domaine de la coïncidence mais de l’heureuse rencontre. Ignare des écrivains de Trieste, de la ville même, l’appât est suffisant en y entendant l’évocation de Joyce ou de Stendhal pour que j’en fasse mon profit.
Peu de jours passent et je retrouve Trieste sur un écran de télévision, une émission d’Histoire relatant la difficile scission des habitants lors du rattachement de la ville à l’Italie au sortir de la guerre mondiale. Je passe rapidement car, pris par des obligations diverses, je ne pouvais m’y arrêter. Mais j’ai commencé à me dire « Tiens, c’est marrant… »
L’affaire se corse lorsque, exhumant quelques Magazine littéraire d’une caisse je feuillette le n° 227 consacré à « La France Fin de Siècle ». Quel rapport, me rétorquerez-vous ? Aucun si ce n’est que ce numéro contient également un article de quatre pages intitulé « Trieste, dernière escale »… aussitôt lu avec un intérêt flambant neuf. Eh bien, l’on note de nouveau la présence d’Umberto Saba ou de Quarantotti-Gambini, voire de Svevo, tous écrivains italiens que je connais fort mal pour ne pas dire pour certains pas du tout ! J’y apprends l’origine triestine de Leonor Fini, le passage des ombres de Larbaud ou de Rilke, la dèche de Joyce. Je m’inquiète surtout de ces signes répétés en si peu de temps. Pourquoi donc Trieste ? Non que j’y sois rétif mais quitte à m’intéresser à une ville italienne, ce serait plutôt Naples, par exemple…
 
 
Mais, de ces maigres connaissances, je perçois à quel point le lieu est une limite, une frontière cosmopolite et indécise une rencontre intéressante. Cependant rien ne me permet de m’inquiéter encore : trois coïncidences successives peuvent arriver, le codage du simulateur de réalité dans lequel nous vivons n’est pas à l’abri d’accidentelles réitérations… J’ai bien vu, une fois, des dizaines de nuages identiques se côtoyer.
Il est des moments où on finit tout de même par jeter un coup d’œil par-dessus son épaule avec inquiétude. Ainsi, alors que j’allais chercher un ouvrage commandé chez mon nouveau libraire de neuf, je tombais sur une pile de livres de chez Allia en promotion. Si Les mémoires d’un travesti (attribuées à Erik Losfeld !) avaient attiré mon immédiate attention, la couverture d’un autre ouvrage dont le titre est — bien sûr — Trieste, par Roberto Balzen n’a pu que me saisir. Que faire sinon l’acheter et le lire ? J’avais rencontré Balzen dans l’article du Magazine littéraire, avec cette suite de notes qui emprunte le ton du tutoiement, évoquant le vent de Trieste, la Bora, qui rend fou, et puis aussi le souvenir des fonctionnaires austro-hongrois et de leur probité… On retrouve cette même nostalgie un peu désolée à propos de ces fonctionnaires dans l’émission de France Culture. Le texte est doté du charme déchu d’une miette d’empire, doté d’un humour exquis. Un livre qui reviendra de temps en temps sous mes yeux.
 
 
Est-ce que je cherche la petite bête, dites-moi ? Est-ce la soudaine fécondité de mon inconscient qui me met à l’affût de toute allusion à la ville ? Je décide de forcer le destin et commande — d’après le même article du Magazine littéraire — un ouvrage de Svevo, un de Saba et celui de Franck Venaille sur la ville. Il y a de quoi conjurer le sort.
Les livres sont arrivés depuis peu (mon bouquiniste à Redon, curieusement, n’avait rien sur le sujet) et je n’ai pas encore eu le temps de les lire. Cela va venir forcément.
Visiblement cela n’a pas suffit. Le lendemain de la réception du petit colis (ouvrages payés à prix fort modique, d’ailleurs, mais je ne recommande pas ce site qui vient de me décevoir), ma fille me téléphone et me fait part de ses projets estivaux, dont celui de venir voir son heureux géniteur. Quel plaisir ! Et puis, juste après sa visite, elle ira faire une petite balade en Italie. « Ne me dit pas que… » Et si : Trieste, encore Trieste, toujours Trieste !
La répétition est devenue inquiétante et puis aussi un petit peu rassurante. Cette insistance ne peut être de mon fait à moins d’être un grand télépathe (ce qui m’étonnerait fort, vu mes fins de mois). Il y a certes l’empathie qui règne entre ma fille et moi, mais elle réside surtout dans l’appétence pour les films bourrins.
On finirait par trouver tout banal. Alors que je cherchais pour le travail quelques informations sur la vie de Casanova dans la biographie de Rives Child, je n’ai pas sourcillé cet après-midi même en croisant le chapitre intitulé « Errances qui le conduisent à Trieste ».
Cela fait trois mois que cela dure.
Je gage que la série n’est pas encore terminée, quoique le fait d’écrire un billet ici aura peut-être le don d’éventer toutes velléités du destin.
Mais on ne sait jamais, la Bora souffle peut-être jusque dans mes contrées.

mercredi 27 juillet 2016

Tuileries

Quelques temps après un court échange — qu’il serait incongru de qualifier de « technique », surtout venant de moi — je reçus la plaquette ci-dessous, signée par Dominique Autrou et Hélène Verdier. Textes et photographies s’y répondent et s’accompagnent, moins mises en pages que mises en scène. J’ai pris un long plaisir à goûter lentement le livre, un acte paisible accompagné de divagations paresseuses qui allaient, évidemment, au-delà des Tuileries. Mais que dire de son contenu qui ne vaut que pour les images qu’elles suscitent en chacun de nous ? Combien de ces livres, alors que j’étais libraire, passés entre mes mains et dont la seule possibilité de les recommander était de les glisser en des mains de confiance ? Impossible de garder ici, sur ce blog, l’intimité de l’échange, cette même intimité qui nous relie à certains livres. Scanner et reproduire n’est pas montrer ou sentir – en l’occurrence, pour cette dernière sensation, la texture du papier.  Quel plaisir de recevoir ce galop d’essai (tiré à 10 exemplaires seulement) ! Il va falloir que je me mette en chasse de leurs livres. Le défaut du plaisir est qu’on doit parlementer avec le désir. On vous tiendra au courant dès qu’une édition accessible au public sortira. Il vous faudra chercher, ouvrir l’ouvrage et décider qu’il vous suivra. Pour la durée de la cohabitation, ce sera à l’amiable.

lundi 25 juillet 2016

Gazette du Vieux Paris, n° 10
(Numéro « Molière et Louis XIV»)

10/18 — Guy Leclerc : Le T.N.P. de Jean Vilar





Guy Leclerc

Le T.N.P. de Jean Vilar

n° 538

256 p. Couverture de Pierre Bernard, Jean Vilar sur scène, photos : Lipnitzki-Viollet
Série « S », dirigée par Bernard Lamarche-Vadel
Les six dernières pages occupées par un extrait du catalogue 10-18 (liste alphabétique par nom d'auteurs et liste numérique des ouvrages)
Volume simple
Achevé d'imprimer le 22 mars 1971 sur les presses de l'imprimerie Bussière, Saint-Amand (Cher)
N° d'édit. 404 - N° d'imp. 172 - Dépôt légal : 2e trimestre 1971

TABLE DES MATIÈRES :

Première partie : L'ILLUSION LYRIQUE

I. L'instrument scénique
II. Un théâtre d'héritier
III. La Fête et la Culture
IV. La Résistance et la Démocratie culturelle

Deuxième partie : LE MUSÉE IMAGINAIRE

I. Chefs-d'oeuvre du passé et public d'aujourd'hui
II. Public populaire et public ouvrier

Troisième partie : LA CONSCIENCE CIVIQUE

I. Les feux croisés de Suresnes
II. Sénateur contre metteur en scène
III. L'engagement politique et le théâtre de la conscience
IV. Les rôles archétypes

Quatrième partie : LA TRAGÉDIE DE NOTRE TEMPS

I. L'Homme et la Guerre
II. Le stalinisme
III. Le Pouvoir et la Tyrannie
IV. L'Argent : le Capitalisme
V. Le Pouvoir gaulliste
VI. La guerre d'Algérie ; le Fascisme
VII. La guerre atomique
VIII. L'Homme devant le Pouvoir

Cinquième partie : LA MORT DE L'IDÉALISME

I. Théâtre idéaliste et théâtre matérialiste
II. La critique de gauche : « Théâtre Populaire »
III. La critique de l'idéologie

Conclusion

Bibliographie

(Contribution de Grégory Haleux)
Index 

dimanche 24 juillet 2016

Des navions

Ces vignettes — d'un format à peine lisible et considérablement agrandies ici — ornaient un article sur le Salon de l'aéronautique dans le numéro de novembre 1922 de Lectures pour Tous.

samedi 23 juillet 2016

Si tu veux pécho des vieux, lis des livres !

Le Tenancier & Casanova

Vous connaissez le Tenancier : d’une équanimité à toute épreuve, même qu’on pourrait prendre ça pour de la catatonie si l’on ne remarquait pas la mobilité de ses yeux aux reflets intelligents. Toutefois lorsqu’on lui présente un texte d’autofiction, il ne faut pas vous le cacher, cela lui fait mal. À ce moment-là, il quitte se réserve naturelle et vitupère. Il faut bien dire que cet afflux de textes inutiles qui paraissent à la pelle — à la pelleteuse, même — a de quoi énerver lorsque l’on aime la littérature. Souvent, on apprend que ces livres sont l’aboutissement d’une séance chez l’analyste. On imagine que le spécialiste n’en pouvant plus des banalités qu’on a pu lui répandre dans la trompe d’Eustache a dû se dire que ce serait une belle revanche sur sa vie de merde en faisant partager les turpitudes de ses clients. Je confirme, cher psychanalyste, vous avez une vie de merde et je ne l’envie pas, surtout à la lueur des textes autofictifs. Ce ne doit pas être drôle tous les jours. Cela dit, les lecteurs de ces vaticinations ont un moment l’impression de jouer votre rôle, certes sans le canapé et l’argent ramassé en fin de séance. Mais on voit bien que vous ne volez pas cet argent quand on lit ce qu’on lit. Il y en a d’autres qui entreprennent d’écrire sans la sollicitation du psy. Mettons les en garde ! Quitte à écrire sur sa vie inintéressante, autant qu’elle soit écrémée d’abord par un spécialiste. À la grande époque, où c’était franchement tendance, vous pouviez même vous passer de style. Précaution superflue, d'ailleurs : beaucoup d’éditeurs se sont passés depuis longtemps de réviseurs et de correcteurs, donc cela tombait bien.
Enfin, voilà où en était — en gros — la pensée de votre Tenancier chéri. Et puis, il est tombé sur un auteur qui a justement écrit sur les conseils de son médecin. Et là, il a bien fallu se dire qu’il existe des exceptions à l’autofiction comme :
Giacomo Casanova.
 Mais quitte à avoir affaire à un escroc, autant qu’il soit brillant.