vendredi 30 mai 2014

Interlude

La vidéo que le Tenancier soumettait ici était un extrait de Laurel et Hardy au Far West, supprimé par Youtube pour « Atteinte au droit d'auteur ». On est un peu intrigué par cette suppression car le droit de citation existe également. Ce passage ne pouvait être qu'une incitation à se procurer le film que d'ailleurs votre Tenancier possède dans sa vidéothèque...
Tant pis.

jeudi 29 mai 2014

Retour en 1898

Portrait par Félix Vallotton
Citoyens,
On vous trompe. On vous dit que la dernière Chambre composée d'imbéciles et de filous, ne représentait pas la majorité des électeurs. C'est faux.
Une chambre composée de députés jocrisses et de députés truqueurs représente, au contraire, à merveille les électeurs que vous êtes. Ne protestez pas: une nation a les délégués qu'elle mérite.
Pourquoi les avez-vous nommés ?
Vous ne vous gênez pas, entre vous, pour convenir que plus ça change, et plus c'est la même chose, que vos élus se moquent de vous et ne songent qu'à leurs intérêts, à la gloriole ou à l'argent.
Pourquoi les renommez-vous demain ?
Vous savez très bien que tout un lot de ceux que vous enverrez siéger vendront leurs voix contre un chèque et feront le commerce des emplois, fonctions et bureaux de tabac.
Mais pour qui les bureaux de tabac, les places, les sinécures si ce n'est pour les Comités d'électeurs que l'on paye ainsi ?
Les entraîneurs des Comités sont moins naïfs que le troupeau.
La Chambre représente l'ensemble.
Il faut des sots et des roublards, il faut un parlement de ganaches et de Robert Macaire pour personnifier à la fois tous les votards professionnels et les prolétaires déprimés.
Et ça, c'est vous !
On vous trompe, bons électeurs, on vous berne, on vous flagorne quand on vous dit que vous êtes beaux, que vous êtes la justice, le droit, la souveraineté nationale, le peuple-roi, des hommes libres. On cueille vos votes et c'est tout. Vous n'êtes que des fruits... des Poires.
On vous trompe encore. On vous dit que la France est toujours la France. Ce n'est pas vrai.
La France perd, de jour en jour, toute signification dans le monde, toute signification libérale. Ce n'est plus le peuple hardi, coureur de risques, semeur d'idées, briseur de culte. C'est une Marianne agenouillée devant le trône des autocrates. C'est le caporalisme renaissant plus hypocrite qu'en Allemagne : une tonsure sous le képi.
On vous trompe, on vous trompe sans cesse. On vous parle de fraternité, et jamais la lutte pour le pain ne fut plus âpre et meurtrière.
On vous parle de patriotisme, de patrimoine sacré à vous qui ne possédez rien.
On vous parle de probité; et ce sont des écumeurs de presse, des journalistes à tout faire, maîtres fourbes ou maîtres chanteurs, qui chantent l'honneur national.
Les tenants de la République, les petits bourgeois, les petits seigneurs sont plus durs aux gueux que les maîtres de régimes anciens. On vit sous l'oeil des contremaîtres.
Les ouvriers aveulis, les producteurs qui ne consomment pas, se contentent de ronger patiemment l'os sans moelle qu'on leur a jeté, l'os du suffrage universel. Et c'est pour des boniments, des discussions électorales qu'ils remuent encore la mâchoire, la mâchoire qui ne sait plus mordre.
Quand parfois des enfants du peuple secouent leur torpeur, ils se trouvent, comme à Fourmies, en face de notre vaillante armée... Et le raisonnement des lebels leur met du plomb dans la tête.
La Justice est égale pour tous. Les honorables chéquards du Panama roulent carrosse et ne connaissent pas le cabriolet. Mais les menottes serrent les poignets des vieux ouvriers que l'on arrête comme vagabonds !
L'ignominie de l'heure présente est telle qu'aucun candidat n'ose défendre cette Société. Les politiciens bourgeoisants, réactionnaires ou ralliés, masques ou faux-nez, républicains, vous crient qu'en votant pour eux ça marchera mieux, ça marchera bien. Ceux qui vous ont déjà tout pris vous demandent encore quelque chose :
Donnez vos voix, Citoyens !
Les mendigots, les candidats, les tire-laine, les soutire-voix ont tous un moyen spécial de faire et refaire le Bien public.
Écoutez les braves ouvriers, les médicastres du parti : ils veulent conquérir les pouvoirs... afin de les mieux supprimer.
D'autres invoquent la Révolution, et ceux-là se trompent en vous trompant. Ce ne seront jamais les électeurs qui feront la Révolution. Le suffrage universel est créé précisément pour empêcher l'action virile. Charlot s'amuse à voter...
Et puis quand même quelque incident jetterait des hommes dans la rue, quand bien même, par un coup de force, une minorité ferait acte, qu'attendre ensuite et qu'espérer de la foule que nous voyons grouiller : la foule lâche et sans pensée.
Allez.! allez, gens de la foule ! Allez, électeurs ! aux urnes... Et ne vous plaignez plus. C'est assez. N'essayez pas d'apitoyer sur le sort que vous vous êtes fait. N'insultez pas, après coup, les Maîtres que vous vous donnez.
Ces Maîtres vous valent, s'ils vous volent. Ils valent sans doute davantage : ils valent vingt-cinq francs par jour, sans compter les petits profits. Et c'est très bien :
L'Electeur n'est qu'un Candidat raté.
Au peuple du bas de laine, petite épargne, petite espérance, petits commerçants rapaces, lourd populo domestique, il faut un Parlement médiocre qui monnaie et qui synthétise toute la vilenie nationale.
Votez, électeurs ! Votez ! Les parlements émanent de vous. Une chose est parce quelle doit être, parce qu'elle ne peut pas être autrement. Faites la Chambre à votre image. Le chien retourne à son vomissement - retournez à vos députés...


Zo d'Axa : Vous n'êtes que des poires, in : La Feuille (1898)

(Et pour continuer les lectures réjouissantes, nous vous incitons à vous rendre sur la page indiquée par un de nos lecteurs, Karl-Groucho D.  : Le Gouvernement du Peuple, ou Plan de constitution pour la République universelle par John Oswald.)

Le Bouvreuil



Le professeur Rollin a toujours quelque chose à direin : Palace (1988)

mardi 27 mai 2014

Lorsque le Tenancier éditait — II

Le logo de L'astronaute mort
Je m’aperçois que j’ai été bien vite en besogne en évoquant les débuts de l’astronaute mort. En effet, j’ai omis de préciser les objectifs de la collection, ce qui a son importance. Chaque volume publié dans « La Bibliothèque sublunaire » était à tirage limité sur papier vergé numéroté. Cette intrusion de la bibliophilie — modeste, tout de même — dans le petit monde de la science fiction n’était pas si courante et ces publications demeurent marginales à l’heure actuelle. Rien d’étonnant à cela. Cette littérature populaire — ce n’est pas un terme péjoratif à mes yeux — est à obsolescence rapide, non par le style ou par la mentalité des personnages mais plutôt parce que l’avancée technologique rend nombre de récits caducs, notion un peu contradictoire avec celle de la bibliophilie. On ne glosera pas plus sur cette idée car elle nous entraînerait fort loin de notre sujet. Implicitement, l’enjeu de la collection était également de publier des titres qui devaient s’assurer d’une certaine pérennité outre leurs qualités littéraires. Ces premiers tirages courts, à prix raisonnable devaient assurer l’édition des quelques volumes que nous projetions. Cela dépassa nos objectifs. Il faut insister sur le fait que l’opération ne pouvait réussir que parce que cette entreprise n’avait nul but lucratif (L’astronaute mort était une association « Loi 1901 ») et parce que Christian Laucou, l’imprimeur, s’était piqué au jeu. La distribution des ouvrages se fit par correspondance. Les marges que nous appliquions sur nos ventes ne nous permettaient pas de supporter un autre mode de revente. Il faut signaler la solidarité et la générosité de quelques fanzines qui me communiquèrent leurs fichiers d’adresses. L’Internet était encore très embryonnaire et, malgré le fait que nombre de lecteurs de SF étaient également des geeks, ce mode de diffusion des annonces de parution n’était pas vraiment dans les mœurs… On eut recours à l'enveloppe timbrée.
Votre Tenancier, à cette époque, dut également se remettre à l’informatique. J’avais mollement tripoté un zx81 quelques années auparavant. Je me  retrouvais désormais doté d'un PC sous DOS — j’assume encore ce retard technologique, je suis un nostalgique de la ligne de commande — équipé d’un logiciel de traitement de texte pour saisir certains manuscrits. Ceux-là étaient ensuite transmis à Christian Laucou qui les préparait pour impression. Signalons que l’impression numérique était devenue assez performante pour se conformer à notre projet, entreprise presque impossible s’il avait fallu recourir à la typo au plomb, ce dont Christian était fort capable, puisque c’est son métier et son grand talent, mais à un coût nettement supérieur.
Si l'adhésion des auteurs fut effective, je pense que c’est aussi une idée qui flatta un peu leur vanité. Qui leur en voudrait ? Quel auteur n’éprouve pas le plaisir de voir son texte un peu plus soigné qu’à l’ordinaire ? Pour l’avoir éprouvé (merci, le Visage Vert !), je sais que le cœur est faillible. Lâchement, je sus en profiter. 

(A suivre)

Boîte à morve

Boîte à morve : Le nez.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

lundi 26 mai 2014

Truffes & petits papiers

On trouve de tout dans un livre.
— Des tickets de métro
— Des tickets de cinéma
— Des articles de journaux, quelquefois sans rapport avec le sujet du bouquin 
— Des cartes postales…
Et puis, on trouve l'image ci-contre.
C'est Didier Deaninckx qui, je crois, avait fait un roman sur les canaques du jardin d'acclimatation. Si l'on avait besoin de se convaincre que ce n'était pas une fiction, en voici la preuve. 1000 crocodiles, des canaques avec des “danses expressives”, le tout à Paris en 1931, comme l'indique le verso de ce ticket : du colonialisme sans arrière-pensée. Cela vaut bien des romans engagés sur le sujet. Les livres truffés se font rares. Beaucoup de confères en suppriment le contenu. On ne peut leur donner tort, car la mauvaise qualité du papier dont sont constituées ces truffes peuvent tacher irrémédiablement un livre précieux. Pour ma part, j'élimine du livre tout ce qui est sans rapport et je m'arrange pour que les documents restants soient contenus dans un papier un peu plus neutre, si possible. Le reste constitue un musée secret, une exposition permanente à côté de mon bureau. On reviendra de temps à autres sur ce sujet.
Mais, ces petits papiers sont-ils vraiment des “truffes” ? En réalité, non. Dans le jargon de la librairie le mot désigne le plus souvent des documents insérés dans un ouvrage et qui ont un rapport parfois étroit avec le sujet de celui-ci : coupures de presse, lettres tapuscrites ou manuscrites, cartes de visite, etc. Mais ici, la licence poétique n'interdit pas de considérer ce ticket comme une truffe valide. Il suffit de prétendre l'avoir trouvé dans Le livre du Zoo, de Suzanne Pairault, par exemple, même si le livre est tardif. Ou mieux encore dans le livre de Didier Daeninckx auquel je faisais allusion plus haut et dont le titre est Cannibale.
Rappelons que le must est de trouver une lettre autographe de l'auteur. De quoi vous rendre jaloux. J'ai des noms.

Ce billet, très légèrement revu, a été publié la première fois sur le blog Feuilles d'automne en juin 2008

Renvoyons nos lecteurs au billet du blog de George WF Weaver, ou il est question de l’expo coloniale mais de bien plus encore. Nous sommes bien loin du bois mystérieux d'un André Hardellet...

Lever une gonzesse



Le professeur Rollin a toujours quelque chose à direin : Palace (1988)

dimanche 25 mai 2014

Lorsque le Tenancier éditait — I

J’animais depuis plusieurs années une émission sur la SF sur Radio Libertaire. Elle avait eu plusieurs titres, plutôt idiots d’ailleurs, comme Vous avez dit Bigeard, Les gros niquent les martiennes ou bien encore Bienvenue chez les Maîtres du Monde. Ces séries d’émissions étaient assez détendues, voire parfois bordéliques en diable. On s’y amusait et on était cependant sérieux la plupart du temps, ce n'était pas contradictoire. Nous y avons invité beaucoup d’auteurs et d’éditeurs sur plus d’une quinzaine d’années (il y eut des interruptions) entre 1982 et 2000.
Il s’avéra que j’avais eu envie à l’époque de prolonger le plaisir en créant une petite maison d’édition dont l’objectif était limité : publier des nouvelles à petit tirage dans un format soigné et avec des auteurs de SF prestigieux. Je projetais de ne publier que cinq ou six titres, guère plus, et ne pas dépasser le cap de 1995.
Cette entreprise n’aurait pu voir le jour sans le généreux mécénat de Sophie et Salim, des amis qui financèrent les premières publications. Ce fut la seule subvention extérieure que cette entreprise reçut, elle permit de démarrer et d’élaborer un catalogue plutôt sympathique. Si la question du financement fut résolue, restaient encore quelques obstacles à franchir. La question des auteurs fut résolue assez facilement parce que votre serviteur fréquentait de temps à autre les Déjeuners du Lundi, institution de la science fiction française qui consacrait la rencontre hebdomadaire de nombres d’acteurs du milieu. L’annonce du projet y fut accueillie avec bienveillance et la générosité des auteurs la confirma par la suite. L’autre question cruciale était de s’adjoindre la compétence d’un imprimeur qui répondrait à nos critères d’édition. Je ne pus mieux tomber en faisant appel à Christian Laucou qui, outre son métier d’imprimeur, s’employait à tenir à bout de bras les Éditions du Fourneau, devenues plus tard Fornax. Bien évidemment, toutes ces étapes ne se déroulèrent peut être pas avec la facilité que laisse entendre ce petit compte-rendu. Néanmoins, avec le recul, je suis encore étonné de l’aisance avec laquelle tout s’enchaîna. Il n’y eut plus qu’à déposer les statuts de l’association et déclarer au monde entier la « raison sociale » de notre micro maison d’édition.
Elle s’appela L’astronaute mort, hommage à une nouvelle de J.-G. Ballard, sans doute pas la meilleure de l’auteur mais qui dévoilait notre ambition pour ce qui concernait la qualité des textes et des auteurs que nous voulions accueillir.
Les statuts étaient déposés, les auteurs consentants, un compte ouvert, un excellent imprimeur à disposition… il fallait désormais constituer un catalogue.

(A suivre)

Talons

Talons : Avoir les talons courts : pour une femme, être de nature luxurieuse.
Mais la beauté de la Cour
C'est d'avoir les talons courts
(Parnasse des Muses)
Marie-François Le Pennec : Petit glossaire du langage érotique aux XVIIe et XVIIIe siècles (1979)

Un peu de dignité, Monsieur !

Cervelle qui fait de la chaise longue (Avoir la)

Cervelle qui fait de la chaise longue (Avoir la) : Être très fatigué et ne plus avoir les idées bien nettes.

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

samedi 24 mai 2014

Jules Verne en 10/18

Les amateurs de l'irremplaçable collection 10/18 reconnaissent du premier coup ce qui en faisait à l'époque l’identité : le double filet séparant le nom de l’auteur et le titre, le logo, toujours de la même taille, se déclinant en couleurs différentes d’un volume à l’autre…
La série « Jules Verne inattendu » présente cependant quelques caractéristiques supplémentaires :
Le logo représentant un phare (emblématique de la production vernienne) situé au coin supérieur gauche, à côté du nom de l'auteur et du titre – cette idée sera également utilisée dans cette collection pour les ouvrages de Jack London (une tête de loup) ou d'autres auteurs.
Le sous-titre « maison » en long accolé à la marge gauche de la couverture.
Le fond bleu des couvertures.
Mais bien plus que l’aspect physique, c’est bel et bien la mise en œuvre de cette série qui doit retenir notre attention. La préface générale qui en ouvre le premier volume est explicite : il s’agit pour son maître d’œuvre, Francis Lacassin, de présenter un aspect méconnu, à l’époque, de l’œuvre de Verne. Il est à signaler que cette série – publiée sur quelques mois seulement – partait de la dynamique générée par de nombreuses publications au cours des années 70 et dont la plus remarquable fut peut être le numéro des Cahiers de L’Herne. Ne pas négliger non plus une manifestation importante qui fut sans doute le point d’orgue de la réévaluation de l’œuvre, avec le Colloque de Cerisy. Il était donc tout naturel que l’on assiste à l’apparition d’une collection qui allait présenter une autre facette de Verne, plus souterraine, avec des hypothèses et des conjectures sur les idées politiques et l’inconscient… Ces lectures différentes vont se retrouver tant dans les préfaces de Lacassin que dans les autres textes des spécialistes qui parsèment ces éditions. D'ailleurs, les sous-titres en long sur la couverture annoncent clairement les orientations de l'appareil critique. Une question, du reste, se pose. A cette époque, les seuls Verne disponibles à bon marché étaient ceux de la collection du Livre de Poche. On se prend à penser soudainement que la série « Jules Verne inattendu » a constitué une sorte de complément à la fois marginal et intelligent de cette collection grand public. Contrepoint bienvenu, avec notes, appareil critique et même quelques bibliographies. On se prend à rêver si la collection avait entreprit une édition des œuvres – complètes ? – avec le même appareil critique. Certes, désormais, le foisonnement des « lectures » de Verne s’est un peu atténué. On est revenu à une certaine mesure. Il faut penser à ces douze volumes comme une parenthèse curieuse et très récréative, fort bien dans la lignée de ce que publia Francis Lacassin en 10/18 pour d’autres auteurs (London, Stevenson) ou pour des thèmes précis (comme « L'aventure insensée », concernant la littérature populaire).
Découvrons maintenant les ouvrages de cette série publiée entre 1978 et 1979.
Notons que nombre de ces volumes sont encore aisés à trouver pour une somme modique à l’exception des « Textes oubliés ».
Les Naufragés du Jonathan
n° 1209
Famille-sans-nom
n° 1210
P'tit Bonhomme
n° 1220
L'île à hélice
n° 1221
Histoires inattendues
n° 1129
L'invasion de la mer, suivi de "Martin Paz"
n° 1239
César Cascabel
n° 1247
Sans dessus dessous
n° 1273
Un billet de loterie
n° 1274
Le pilote du Danube
n° 1286
Textes oubliés
n° 1294
Clovis Dardentor, suivi de Un neveu d'Amérique
n° 1308

Il s'avère après examen que notre rêve évoqué plus haut n'était pas si insensé puisque, au hasard de nos butinages dans les volumes de la série, nous avons relevé nombre de titres en préparation. Voici ce que nous avons trouvé dans Clovis Dardentor, dernier volume publié de la série :

— Claudius Bombarnac
— Souvenirs de voyage en Angleterre et en Écosse
— Les frères Kip
— Le Volcan d'Or
— Le Village aérien et M. de Chimpanzé
— Mirifiques aventures de Maître Antifer
— Le Superbe Orénoque
— Le Chemin de France
— L'Épave du « Cynthia »
— Seconde Patrie
— Le secret de Whilem Storitz
— Aventures de trois Russes et de trois Anglais
— L'Étonnante aventure de la mission Barsac
— Le Testament d'un excentrique
— L'Agence Thompson and Co.
— Bourse de voyage

La présence d'un telle liste n'indique pas forcément que ces textes allaient être publiés à coup sûr, mais réservait une possibilité à l'éditeur de ne pas être coiffé au poteau par un autre. Il faut donc relativiser le projet que constituait une telle liste. Du reste, Francis Lacassin développe les raisons de la disparition de cette série au sein de la collection : en résumé, le public n'avait pas suivi.

A cette présence de Verne en 10/18, on se devait d'ajouter trois volumes, à titres divers :
Tout d'abord le Colloque de Cerisy, publication guère exceptionnelle dans le corpus de cette collection puisque nombre de colloques sur des auteurs ou des sujets divers y furent déjà publiés. Cette publication consacra nombres d'avancées dans la recherche verniste. Comme je l'ai indiqué plus haut, on en sent même les effets dans la série « Jules Verne inattendu ». Quoi de plus naturel que d'ajouter encore le livre de Francis Lacassin consacré à quelques passagers clandestins de l'Histoire ou de la Littérature ? Verne y côtoie Mata Hari, Harry Dickson, Jack London et Gustave Le Rouge, par exemple. Et puisque nous citons Le Rouge, on ne pouvait manquer en conclusion de mentionner son amusant « Sous-marin Jules Verne », publication encore cornaquée par le même Lacassin...

Jules Verne : Colloque de Cerisy
n° 1233
Francis Lacassin : Passagers Clandestins /1
n° 1319
Gustave Le Rouge : Le sous-marin « Jules Verne »
n° 1245

Le Tenancier remercie tout particulièrement MM. Francis Ester et Vincent Reignier pour lui avoir fourni les volumes qui lui manquaient. On retrouvera chacun de ces volumes dans des bibliographies par titre et dans les bibliographies secondaires.

Grains

Grains : Génitoires. Être léger des deux grains : être châtré.

Marie-François Le Pennec : Petit glossaire du langage érotique aux XVIIe et XVIIIe siècles (1979)

On sait ce qu'on y perd...

Rien ne change et tout change. Ainsi, votre Tenancier s’occupe toujours de livres même s’il s’apprête sous peu à ne plus le faire sous la forme qui lui était coutumière (mais il ne sait trop encore comment cela va rebondir… on verra bien). Toujours est-il qu’il cause « livres » sur différents médias et donc sur Facebook où il lui arrive de fréquenter un aussi beau linge que céans. Il est vrai que votre serviteur fait gaffe de choisir ses potes. Et il fait bien. Mais, vous savez ce que c’est, les amis de nos amis, hein…
Tenez, l’autre fois, une copine que j’aime beaucoup relaie un message de blogue sur le fameux Petit manuel du parfait aventurier, de Mac Orlan. Pensez si je biche, car non seulement j’apprécie l’auteur mais j’adule ce petit texte au point que j’ai réussi à me procurer le volume des Éditions de la Sirène (1920) à une époque d’opulence.
Seulement, le billet avait l’air de présenter cet ouvrage comme étant de 1951. Pour être honnête, retranscrivons ce que nous avons pu lire dans ce billet :
« Le petit manuel du parfait aventurier est paru à la suite de l’édition de 1951 du recueil de brèves nouvelles grinçantes, La Clique du Café Brebis, une édition ultime ( ?) et, à la même époque, l’entré de Pierre Mac Orlan à l’Académie Goncourt ».
On admettra qu’une lecture hâtive pouvait amener à la même conclusion que la mienne : l’auteur du billet avait dégainé un peu vite. Je me fendis donc d’un commentaire en dessous du lien — accompagné de la couverture de mon exemplaire — se demandant ce que je devais faire de mon livre, entendant par là que je possédais sans doute un exemplaire uchronique. Je ne m’étalerai pas sur l’échange qui en a suivi et qui fut fort pénible car il s’est avéré que je touchais plus à la dignité offensée qu’au sérieux bibliographique. Cela aurait pu en rester là et j’avais d’ailleurs fais un pas dans ce sens, malgré le fait que l’on insinuait chez moi une disposition belliqueuse. Et là, cher lecteur qui me connaît, tu sais à quel point je peux l’être, c’est dire la retenue dont je fis preuve puisque je tentais par deux fois de « briser là ».
Mais voilà, on ne peut rien faire contre l’acharnement et voici in extenso l’amendement que je découvris dans le même billet :
« Pour faire suite à l'indignation d'un libraire érudit autant que tonitruant, je précise qu'il s'agit de cette édition. N'ayant pas de volume antérieur comme je le signale en tête de page, et ayant rédigé cette courte notule uniquement dans l'objectif de porter à la connaissance des amateurs une conception amusante de la profession de romancier, je n'ai pas pensé à chercher la date exacte de parution originale de ce texte amusant. Toutefois, après vérification soigneuse, j'affirme n'avoir jamais prétendu qu'il s'agissait de la date de parution originale. Je suis navrée si mes paroles ont pu être interprétées autrement et regrette de m'être mal exprimée. »
On pourrait répondre à l’auteur que ces qualificatifs sont outrés concernant ma personne, mais il l'étaient bien plus sur Facebook. Il est d’ailleurs difficile d’être tonitruant par écrit. Le souci se situe dans le manque de suite de l’auteur de ce blogue qui aurait peut être dû faire attention au reste de ses propos puisque juste au-dessus de la remarque me concernant il est écrit « Ce manuel date de l’âge d’après la Seconde Guerre Mondiale […] ». On pointera l’inconséquence du propos qui, niant avoir écrit une chose d’un côté, s’empresse de la confirmer de l’autre. J’en déduis donc que mon exemplaire du livre est bien uchronique ou alors que l'auteur du billet avait manqué quelque chose...
La profession de foi de ce blogue-là est paraît-il de partager, c’est du moins ce qui est indiqué en dessous de son titre. Comme on aurait pu dire dans les bousbirs chers A Mac Orlan : on sait ce qu’on y perd, mais on sait pas ce qu’on y trouve

vendredi 23 mai 2014

Dégauchir

Dégauchir : Trouver

Géo Sandry & Marcel Carrère : Dictionnaire de l’argot moderne (1953)

Un lancer d'espions

Croyez-le ou non, votre Tenancier a toujours considéré la collection Espionnage au Fleuve Noir comme une série crépusculaire. Sans doute cela est dû au fond noir des couvertures des débuts de la collection mais également au fait que cet univers avait toujours des corrélations intimes avec la nuit ou bien avec des univers en faillite. Bien évidemment, nous sommes loin des ouvrages de Le Carré et la lecture de ces livres ne nécessitent pas trop de ressources en intellect. Du reste, si l’on trouve pas mal d’ouvrages particuliers sur les collections policières ou de SF, on serait en peine de trouver une bibliographie un peu fouillée sur l'espionnage. Certes, votre Tenancier n’as nullement vocation à l’universalité et on pourra lui opposer tel source ou tel publication rien que pour le contrarier, certes… Mais augurez donc avec moi qu’on ne croule pas sous la quantité. Nous détenons une étude, un ouvrage général pour lequel on s’est empressé de distraire quelques sesterces, il s’agit de L’idéologie dans le roman d’espionnage, d’Érik Neveu. Si le dieu Janus nous protège comme il faut, p’têt ben qu’on aura le temps de vous en causer un de ces jours.
L’évocation de cet ouvrage n’est pas innocente ici. L’idéologie du roman d’espionnage au Fleuve Noir ne se distingue pas par sa nuance ni sa défense absolue d’un idéal libertaire, loin de là. On sort de ces lectures avec plus de convictions impérialistes que des idées démocratiques et les droits de l’homme y sont plutôt une vue de l’esprit. Quant à la place de la femme dans ce genre de littérature, chacun de nous a eu dans les mains les ignobles petites saloperies estampillées SAS (publiées par la concurrence, chez Plon) dont l’auteur fut d’ailleurs encensé récemment dans les colonnes de Libération. A toute cette littérature consternante pour ce qui concerne la dignité même de ceux qui la lisent sans le recul nécessaire, il fallait opposer un auteur quelque peu reposant : G.-J. Arnaud.
On se propose dans les temps à venir de chroniquer de temps à autre une série qui faisait partie de la collection Espionnage au Fleuve Noir et dont le héros, Serge Kovask, alias Le Commander, constitue une sorte de bain de fraîcheur dans le machisme et la violence ordinaire. A travers cette petites chronique, on se propose de suivre l’évolution, importante, du personnage et également de rendre hommage à un auteur populaire méconnu du grand public et dont on estime la production à plus de 350 titres.

The Tenancier Is Baque

A peine achevé le blogue Feuilles d’automne, voici que votre Tenancier chéri récidive. Que l’on vous explique : votre serviteur est en train d’affronter quelques tournants dans son existence et il a décidé de laisser certaines choses derrière lui. L’ancien blogue — qu'il laisse en consultation, bien sûr, hors de question de le supprimer ! — était surtout consacré au livre dans sa partie matérielle Cela finissait par devenir une contrainte désagréable que le Tenancier avait cru pouvoir contourner en créant quelques blogues parallèles, lui procurant ainsi un travail tellement supplémentaire qu’il s’est trouvé à un moment dans l’incapacité d’y faire face. Alors voilà, pouf pouf, on recommence ! Bientôt, quand on aura liquidé les affaires de la libraire (parce que là aussi, cela s’arrête), on arrivera à un rythme assez régulier dans la publication des billets. D’ailleurs, certains amis du précédent blogue seront dans celui-ci car on s’en voudrait d’abandonner l’esprit, les historiettes et les terribles vermotisations de cette engeance.