dimanche 17 septembre 2023

Le policeman 416



— Hop ! policeman… que diriez-vous policeman, si l’on vous demandait de lever les yeux jusqu’à ce mur qui est devant vous, et de donner votre opinion ?
— Je dirais, gentleman, que c’est là une question saugrenue, qu’il ne m’est pas nécessaire d’examiner…
— Que diriez-vous, policeman, si on vous faisait remarquer que ce mur immensément vieux est muni, dans sa partie supérieure, de crampons qui forment une véritable échelle, par laquelle on peut monter sur les toits ?...
— Je répondrais que ce n’est pas là un chemin d’honnête homme et je conseillerais à qui me parle de passer son chemin…
— Que diriez-vous, policeman…
— Que diriez-vous, gentleman, si je vous invitais à faire demi-tour et à déguerpir ?
— Que diriez-vous, policeman, si je refusais de partir…
— Que diriez-vous, vous-même alors, si je vous arrêtais ?...

Page 237, chapitre 19 : Le policeman 416, in : Le pendu de Londres, par Pierre Souyestre & Marcel Allain – Fantômas 4/VII, éditions Robert Laffont, 1962 — Le volume que tient Mylène ci-dessus…

vendredi 15 septembre 2023

Une historiette de Béatrice

Le couple entre, avec un garçonnet et une fillette. Ils vaquent chacun à leurs lectures, quand le plus jeune des enfants fait tomber la BD qu'il épluchait.
« Ca y est, ça commence ! », le père,
« Et puis en plus pourquoi une BD ? Tu ne sais même pas lire! », la mère,
« Mais je regarde les images », l'enfant, tout penaud.

mercredi 13 septembre 2023

Lecture du Tenancier

— Ma chère Éléonore lui dis-je, la folie et la vanité ont bien des traits de ressemblance et souvent les mêmes effets; il y a des hommes assez fous pour se priver de la vie, il y en a eu d’assez vains et d’assez fous à la fois pour imaginer que les plaisirs, ces causes et ces liens de la vie, étaient des maux. Il leur a paru beau de séparer l’homme de l’homme et de le réduire à la classe des êtres insensibles. Plus un système est absurde et plus il semble divin à des yeux fanatiques; mais ce système de destruction des plaisirs est aussi insensé que le projet de vivre sans respirer l’air qui nous environne ou qu’il le serait de défendre à un corps sonore de résonner quand il reçoit des vibrations. L’auteur de notre être nous a donné des besoins à satisfaire, notre conservation en dépend, il a attaché des plaisirs à remplir nos besoins; s’il trouvait mauvais que nos cœurs se livrassent à ces plaisirs nécessaires, il voudrait en même temps que nous fussions et que nous ne fussions pas; il renverserait les lois de notre existence, il condamnerait dans nos désirs des flammes qu’il a lui-même allumées. Aussi voyons-nous que les idées contraires, empruntées du stoïcisme, ont très peu cours. Nous avons toujours les mêmes organes et les mêmes passions, le monde n’a point changé; preuve certaine qu’il ne devait point changer. Ce qu’il y a de plus remarquable, c’est que les défenseurs de ces chimères morales sont inutiles et même à charge de la société : fourbes, avares, méchants, vindicatifs, mille fois plus imparfaits que ceux dont ils font des censures amères; et pour comble d’imposture, en fait de plaisirs de tous les genres et de raffinements étudiés, ils démentent en secret leurs opinions fastueuses par une pratique constamment opposée.

Guillard de Servigné : Les Sonnettes, ou les mémoires de Monsieur le Marquis d*** (1749)