mercredi 12 novembre 2014

Balades dans la Cité de la nuit — I

Times Square était un monde que j’étais certain d’avoir recherché de mon propre gré — je n’avais pas cédé à l’appel de ce monde. Et à cause de cette certitude, sa séduction, pour moi, était beaucoup plus forte.
Je m’y jetais à corps perdu.
La hargne de l’été s’était abattue sur New York avec la violence d’une bête pantelante. L’implacable chaleur des nuits succède aux après-midi torrides. Les trains grinçant dans le purgatoire des tunnels du métro (comprimant férocement la chaleur, tandis que parfois, dans les voitures cahotantes, un groupe de gosses noirs, pleins d’à-propos, dansent au rythme tropical des bongoes) vomissent les foules — venues de partout — à la station de Times Square… Des visages en sueur encombrent les rues.
Le racolage transi d’hiver devient maintenant le racolage facile d’été.
Dès les premiers beaux jours, la police new-yorkaise pressent l’imminent regain d’activité de la rue, et pendant quelque temps, les journaux sont pleins de comptes rendus de rafles : ARRESTATIONS D’INDÉSIRABLES. Les flics nettoient Times Square. Mais à mesure que l’été avance et que la chaleur se fait plus étouffante, les flics se calment, comme si eux aussi s’enlisaient dans la chaleur. Alors ils se contentaient d’arpenter les rues en vous répétant de circuler, circuler.
On finit toujours par se retrouver au même endroit.
En ce qui me concerne, le schéma qui devait guider ma vie dans les rues se dessinait déjà avec netteté.
Ce n’était jamais moi qui parlais le premier. Je me postais aux endroits de retape et attendais d’être accosté — tandis qu’autour de moi, je voyais des escouades d’autres jeunes types aborder avec agressivité ceux qui manifestement attendaient.
 
John Rechy : Cité de la nuit — 1965
(Trad. Maurice Rambaud)

Débaucher

Débaucher, v. a. Congédier, renvoyer.
Il a été débauché, on l'a remercié, on l'a renvoyé de l'atelier.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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mardi 11 novembre 2014

Paradis pour tous
(et masque à gaz pour les autres)

Le pays de cocagne
 
Le jeune homme, les précédant, leur fait visiter le Paradis. Ils voient une terre très fertile en beaux bois et en prairies. Les prés, splendides et constamment en fleurs, y forment un jardin. Le fleurs sentent très bon, comme il convient à un endroit qu’habitent les saints, un lieu où les arbres et les fleurs font les délices de ceux qui les regardent, et où les fruits et les parfums sont d’une richesse inestimable. Ni ronces, ni chardons, ni orties n’y poussent à profusion ; il n’y a pas d’arbre ni d’herbe qui n’exhale une odeur suave. les arbres sont continuellement chargés de fruits et les fleurs toujours en pleine épanouissement, sans tenir compte de la saison qui ne change pas ; c’est toujours l’été, et le temps reste doux. les fruits sont toujours mûrs sur l’arbre, les fleurs produisent sans cesse leur semence ; les bois sont toujours remplis de gibier, et toutes les rivières d’excellents poissons. Il y a des rivières où coulent le lait. Cette abondance règne partout : les roselières exsudent le miel grâce à la rosée qui descend du ciel. il n’y a pas de montagne qui ne soit d’or, pas de grosse pierre qui ne vaille un trésor. Le soleil ne cesse d’y briller de tout son éclat, aucun vent, aucun souffle ne vient remuer le moindre cheveu, aucun nuage dans le ciel ne masque la lumière du soleil. l’habitant n’y souffrira aucun malheur, il ne connaîtra aucun orage, il sera à l’abri du chaud, du froid, de l’affliction, de la faim, de la soif, de la privation. Il aura tout ce qu’il souhaite, en abondance. Il est certain de ne jamais être privé de ce qu’il désire le plus ; il l’aura toujours à sa disposition. Absorbé par la contemplation de toute cette félicité, Brandan ne voit pas passer le temps ; il voudrait y rester encore longtemps. le guide le mena beaucoup plus loin encore, et lui fit voir bien d’autres choses : il lui décrivit en grands détails les délices dont jouira chacun. il gravit un tertre aussi haut qu’un cyprès, et Brandan le suit ; d’ici Brandan et ses moines ont des visions qu’ils ne parviennent pas à expliquer. Ils voient des anges et les entendent se réjouir de leur arrivée. Ils écoutent leurs grands chants mélodieux, mais en viennent à ne plus les supporter : les mortels ne sont pas de nature à comprendre ou à concevoir tant de gloire.
 
Benedeit – Le voyage de Saint-Brandan
(Texte et traduction de Ian Short)

Chapelain

Chapelain, s. m. Celui des ouvriers qui tient les copies de chapelle. (B. Vinçard.) Inusité depuis que la chapelle n'existe plus.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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lundi 10 novembre 2014

Presse clandestine

Avant Internet, il y avait les catalogues. Ce qui était vrai pour les 3 Suisses l'était également pour les libraires de tout poil, du libraire d’ancien le plus huppé au pourvoyeur de ballots pornographiques. Tout le monde rédigeait, annotait, collationnait, amendait, fichait, etc.
Voici, en gros comment cela se déroulait avant les ordinateurs :
Le premier stade du catalogue, c’est la fiche. Et là, point de norme propre au bibliothécaire, chacun faisait comme bon lui semblait. Mais ces fiches avaient un minimum de points communs : Auteur, titre, sous titre, date et lieu d’édition, description physique, commentaire, référence bibliographique lorsqu’il y avait lieu, etc. A ce stade, il y avait déjà une indication de prix, lequel serait éventuellement révisé pendant la rédaction de la liste. A l’évidence, on travaillait avec ces fiches pour des commodités de tri mais également comme trace d’une vente passée. Ainsi, le libraire en faisant des fiches, forgeait également sa propre bibliographie et ses cotes.
Ensuite, le libraire se mettait devant sa machine à écrire et commençait à transcrire le contenu de ses fiches dûment triées.
Après, cela partait chez l’imprimeur…
C’est tout ?
J’ai d’autres souvenirs.
Liés à ma propre expérience, cela va de soi, dans une librairie, qui éditait des catalogues.
Précisons que cela se passait au milieu des années 80...
Le fameux catalogue était donc tapé — par une machine mécanique, s’il vous plaît — mais pas sur une feuille de papier. Cela ressemblait plutôt à des stencils qui étaient utilisés sur des duplicateurs à alcool. C’étaient, en quelque sorte des matrices pour offset de bureau. Ainsi, nanti de cette matrice, je descendais dans le sous-sol frais de la librairie, au milieu des éditions originales et m’attelais à ce méchant cube vert sapin et orange qu’était l’offset de bureau. Il fallait fixer cette matrice sur le cylindre, faire un tour avec celui-ci à l’aide de la manivelle, retirer la feuille de papier glacé qui la protégeait, remettre un coup de manivelle en engageant une feuille format 21 X 27 cm. — Eh oui, ce n’est pas une erreur de ma part. Il ne s’agissait pas de format A4… — Une fois la première impression faite, il suffisait de pousser l’interrupteur électrique et veiller à alimenter la machine en papier. Opération qui se renouvelait autant qu’il y avait de pages au catalogue. Le tirage était approximativement de 450 exemplaires et avait une quarantaine de pages.
Venait, une fois l’ensemble tiré, le tri des feuilles pour constituer le catalogue, utiliser toute la surface du sous-sol et tourner dedans en classant les feuilles… j’en ai encore le tournis. Il ne fallait pas oublier la couverture, imprimée, elle, en véritable offset et portant la mention : "Vente à prix marqués" et puis les écussons du SLAM (Syndicat de la Librairie Ancienne et Moderne), etc.
Ensuite, il fallait constituer des paquets d’une trentaine de catalogues et les enfermer dans une presse à main, en grecquer ce qui allait être le dos à l’aide d’un vieux coupe-papier, le recouvrir de colle plastique et attendre que ça sèche. Alors, armé d’un couteau de cuisine, je séparais chaque catalogue en tranchant les dos un par un, tel un boucher impitoyable.
Ensuite, venait l’affranchissement. Seule concession à la modernité, une machine à affranchir permettait de reposer les papilles surmenées par l’atmosphère sèche du sous-sol. Seulement, il fallait alimenter la machine à la main, point de tapis roulant ou autre alimentation automatique, vous rêvez, vous… J’avais donc établi un système un peu ergonomique, à base de boîte en carton et de siège autour de la table où se tenait la machine. De plus, il était nécessaire d’affranchir avant de mettre les catalogues car cette machine refusait les plis trop épais. Ensuite venait « l’ensachage », la fermeture des enveloppes, leur « liassage » et leur « portage » jusqu’à la Poste dans mes petits bras musclés… Près de 14 000 feuilles de papier partaient ainsi dans la nature, l’univers entier et ses abords immédiats.
Deux ou trois jours après, le téléphone n’arrêtait pas de sonner. Mais ceci est une autre histoire, comme disait Rudyard, que je vous conterai dans un article prochain.
J’ai le regret de signaler que le progrès fit rage dans cette librairie au début des années 90. Tout d’abord, l’on passa du format 21 X 27 au format A4. C’était le début de la fin. Après ce fut l’acquisition d’une IBM à boule qui procura une frappe plus régulière et donc un catalogue un peu plus lisible. Puis, ce fut l’abandon de l’offset de bureau et des heures passionnantes passées dans le sous-sol à lire tout en surveillant la machine. Celle-ci partit dans l’antre des éditions Fornax, où il m’est arrivé de croiser sa présence sournoise. Le catalogue contracta un format A5 et la seule chose qui le différencia de ses congénère fut la couverture verte…
La librairie ferma vers 2000, avant le saut fatal vers les ordinateurs de type 286, voire 386 ce qui eût permis d’envisager des catalogues avec des mises en pages sophistiquées. Si cela avait continué, je sens que – la révolution étant en marche – nous aurions été, à l’heure actuelle, à la veille d’acquérir notre premier ordinateur doté de Windows 3.1
Nous l’avons échappé belle !
Je ne peux même pas vous montrer ces catalogues. Bêtement, je n’en ai pas gardé un seul ! J’en ai une belle quantité, mais point ceux-là.
Alors, à l’occasion, si vous retrouvez des catalogues (21 X 27, de préférence !) de la Librairie Delatte. Ne le jetez pas, siouplaît !
Pensez à moi.
Je suis un nostalgique.

Ce billet est paru en juillet 2008 sur le blog Feuilles d'automne.

Une historiette de Béatrice

— « Houlala, tu as vu tous ces livres ?
— Ben oui papa, on est dans une librairie. »
 
Cette historiette a été publiée pour la première fois en octobre 2011 sur le blog Feuilles d'automne

Aller en Galilée

Aller en Galilée, v. Remanier, remettre en galée. M. Ch. Sauvestre, qui, lui aussi, est un ancien typo devenu journaliste, nous signale cette expression pittoresque: « Aller en Galilée, dit-il, c'est faire des remaniements qui nécessitent le transport d'une page ou d'une portion de page du marbre, où elle était en forme, dans la galée, sur la casse. Aller en Germanie n'est rien, comparativement au guignon d'aller en Galilée. » Galilée est évidemment une corruption plaisante de galée.

Eugène Boutmy — Dictionnaire de l'argot des typographes, 1883

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dimanche 9 novembre 2014

Petit hommage à Daniel Boulanger

Momo :
Et Fido, on dirait un nom de chien…
Fido :
Fido, ça veut dire « Fidèle ».
Ernest :
Pas mal le coup du lait. Mais avoue qu’on a eu la deuxième manche !
Momo :
Mais moi à ta place, j’aurais pas laissé la porte ouverte. D’ailleurs, mon père disait toujours : « Quand t’entends sonner à la porte, dis-toi que c’est l’assassin, comme ça si c’est qu’un voleur, tu seras content ».
Ernest :
Tu travailles bien à l’école ?
Fido :
Comme ça…
Momo :
En quoi t’es le plus fort ?
Fido :
Sciences naturelles.
Ernest :
Moi j’étais fort en rien du tout. Le travail, ça me donne la migraine. Je paye pour les pères et les grands-pères qu’ont travaillé avant moi, toutes ces génération laborieuses…
 

François Truffaut : Tirez sur le pianiste — (1960)

Zéphir

Zéphir : « L'infanterie lègère d'Afrique, dont les hommes sont généralement désignés sous le non de zéphyrs. » (Gandon.)

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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De la friture sur la ligne éditoriale

On se découvre toujours une joie mauvaise quand on s’aperçoit que l’on est débordé en talent pour ce qui est du courroux et du sarcasme, quand cela porte sur la même personne et pour la même cause. A propos de l’affaire de l’article sur l’ouvrage d’Eddie Breuil consacré à l’attribution des Illuminations, on vous avait fait part il y a quelques temps de nos réserves sur l’honnêteté de la critique livrée dans Libération. Le Préfet maritime, animateur de l’Alamblog exécute ce même critique avec une verve et une justesse que votre Tenancier est bien incapable d’égaler. Il vous convie donc à ce moment de plaisir en vous dirigeant vers ce billet.
Rendez-vous .
Par ailleurs, on vous recommande une nouvelle fois de vous rendre sur le blog de Grégory Haleux pour dauber ensemble les excès de l’exégèse rimbaldienne, les psychanalystes semblant détenir un record assez inégalé en la matière.
Cliquez donc ici.

Yankee

Yankee : Américain. — « Parbleu ! tous les yankees s'appellent Atkins, s'écria M. Jules. » (Du Boisgobey.)

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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samedi 8 novembre 2014

Une historiette de George

Lundi 3 novembre, 20h15, je remballe l'étalage après avoir attendu vainement depuis trois quarts d'heure que la pluie s'arrête.
Normalement ça prend une dizaine de minutes mais quand il pleut c'est plus long car il faut retirer en douceur les boîtes pleines de livres de sous les bâches, les diriger aussitôt à la verticale, les rentrer dans la boutique, etc., en espérant que le vent n'envole pas tout le tralala.
Là, j'en suis à mon deuxième voyage (19, en tout), la pluie glacée ruisselle toujours autant sur les bâches et s'est immiscée dans mon encolure, coule sur mes cheveux et le long de mon dos alors que je porte des lourdes charges à chaque main, un couple arrive, le type m'apostrophe :
« Bonsoir. Dites, combien ça peut valoir, un livre de prières de 1838 ? »
Moi, avec cette eau glacée qui me ruisselle derrière le cou et ces deux gros poids dans les mains, j'ai pas franchement envie de le réjouir, ce pauvre connard qui ne fait attention à rien d'autre qu'à du fric possible pour lui, j'ai même pas envie de lui dire que ça dépend de la reliure, de l'état du livre, etc.
Nan. Je lui réponds juste : « Pas grand-chose, Monsieur. »
Et eux, dépités, « Ah bon… », et de se barrer, et moi de finir de remballer, avec cette eau glacée qui continue de dégouliner atrocement…
Bordel, Un livre de prières ?! Ils n'ont même pas capté qu'ici comme chez Sade on vomit toutes les religions ?
Nan, évidemment.

X

X : Secret. — En mathématiques, X représente l'inconnu. — « On cherche l'X du cœur. » (Texier)

X : Calcul. — « Depuis l'année 40, le fort en X est en proportion constante. » (Les Institutions de Paris.)

X (Tête à) : Tête organisée pour le calcul. — Calembour sur la formule qu'on prononce théta X, employée en mathématiques. — « L'ancien est évidemment une tête à X. » (La Bédollière.)

X : Polytechnicien. — Allusion aux connaissances mathématiques exigées pour entrer à l'école.

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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Dans lequel on montre une collection complète

Si une collection a été à l’origine de la redécouverte de Verne auprès du grand public, c’est bien Le Livre de Poche Jules Verne. En quarante-deux volumes, la plus grande partie des Voyages extraordinaires était présentée à un format et un prix abordable. Toute une génération pour laquelle le fameux cartonnage Hetzel était inaccessible put enfin découvrir les textes et les illustrations originales, fort heureusement reproduites, et sous les couvertures élaborées par Pierre Faucheux. La publication de cette série à l’intérieur du Livre de Poche se fera dans une courte période, de 1966 à 1970, certains titres connurent de multiples rééditions et quelques variantes. On regrette que l’intégrale ne fût pas publiée. Sans doute la publication sur une période aussi courte avait un peu lassé le lectorat. Mais il est vrai que les habitudes de l’édition n’étaient pas celles qui avaient cours à l’heure actuelle et que les ouvrages publiés supportaient fort bien l’attente dans les entrepôts des éditeurs et dans les rayons des librairies. Ainsi, l’on pouvait augurer que cette collection allait perdurer aussi bien chez les libraires que dans l’imaginaire des amateurs de Verne. On se contentera ici de présenter les couvertures de Pierre Faucheux, plus favorable à l’imaginaire vernien, selon nous, que les actuelles couvertures de rééditions qui tiennent plutôt de la boîte à bonbons.

2025
Le tour du monde en 80 jours
2026
De la Terre à la Lune
2027
Robur le Conquérant
2028
Cinq semaines en ballon
2029
Voyage au centre de la Terre
2030
Le tribulations d'un chinois en Chine
2031
Le château des Carpathes
2032
Les 500 millions de la Bégum
2033
Vingt mille lieues sous les mers
2034
Michel Strogoff
2035
Autour de la Lune
2036
Les enfants du capitaine Grant
Tome I
2037
Les enfants du capitaine Grant
Tome II
2038
L'île mystérieuse
Tome I
2039
L'île mystérieuse
Tome II
2040
Les aventures du capitaine Hatteras
2041
Un capitaine de quinze ans
2042
Le docteur Ox
2043
L'Étoile du Sud
2044
Les Indes noires
2045
Mathias Sandorf
Tome I
2046
Nord contre Sud
2047
La Jangada
2048
Le pays des fourrures
2049
Deux ans de vacances
2050
Face au drapeau
2051
Kéraban le têtu
2052
Hier et Demain
2053
La chasse au météore
2054
Hector Servadac
2055
Mistress Branican
2056
Le Sphinx des glaces
2057
La maison à vapeur
2058
Le Chancellor
2059
L'école des Robinsons
2060
Le Rayon vert
2061
Un drame en Livonie
2063
Un ville flottante
2064
Maître du monde
2065
Le phare du bout du monde
2066
Mathias Sandorf
2068
L'archipel en feu

On reportera le lecteur, amateur des délices des variantes au petit site réalisé par un amateur : ici.

Walk-over

Walk-over : « Littéralement promenade dessus. L'acte de parcourir la piste seul, faute de concurrents. » (Parent.) Angl. Argot de courses.

Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d'argot, 9e édition, 1881

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vendredi 7 novembre 2014

Où le Tenancier évoque Verne et ses éventuelles obsèques

Or donc, votre Tenancier fut verniste. Qu’on s’entende : il l’est toujours mais il fut une époque ou le fait était officiel et estampillé. Il en possède encore la preuve par devers lui sous la forme d’un petit bristol à en-tête de la Société Jules Verne, avec la signature et le coup de tampon. Nous ne nous livrerons pas à la narration de toutes les turpitudes auxquelles se livra votre serviteur sous l’égide de cette vénérable association afin de ne pas alimenter les folliculaires et les éventuels voisins sociopathes. Nous sommes comme ça, nous avons notre jardin secret. Il n’empêche qu’il l’a été et que ce le sera de toute éternité. Hors le fait que cela vous fait une belle jambe, il demeure que toute publication qui passe à sa portée concernant ce Jules-là lui fait plaisir. Je vous dis cela parce que Noël approche et on ne sait jamais trop comment faire plaisir, hein.
Dans cette logique verniste — adjectif qui s’applique aux amateurs, vernien caractérisant la production de l’auteur — il fallait bien que votre Tenancier ouvre le dernier numéro du Magazine du Bibliophile puisqu’il était question de notre auteur. Un entretien avec Antoine Fleury, libraire à Chartres ainsi qu’un article assez bien fourni sur Hetzel ont su l’intéresser. Un reportage complète d’ailleurs ce petit dossier, et porte sur Olivier Maupin, restaurateur de reliures et également de cartonnages…
Si votre Tenancier perdure dans son amour — qui s’accomplit avec grâce parce que de façon perverse — pour l’auteur du Chancellor ou du Tour du monde en 80 jour, il est à noter que ces ébats s’accomplissent généralement dans des ouvrages de format ordinaire et non dans les cartonnages polychromes publiés par Hetzel. Ainsi, aucun grand in-octavo n’orne ce coin de sa bibliothèque. Ce choix est délibéré : la scène primitive, si l’on peut dire, s’étant déroulé dans les replis du Livre de Poche, le Tenancier a décidé qu’il se fera incinérer en compagnie de la collection complète (augmentée des 10/18). Qu’on se le dise.
Néanmoins et puisque nous avons fricoté avec la bibliophilie pendant quelques années, il était intéressant de revenir au propos d’Antoine Fleury sur les cartonnages et il faut bien dire que son contenu a la vertu de remettre cette fièvre des cartonnages Hetzel en perspective. D’une façon assez synthétique il retrace les principales séries complètes évoques les variantes et remet les pendule à l’heure sur le sujet, car il est encore besoin de le faire. En effet, il existe toujours nombre de personnes s’imaginant receler des trésors sous la forme d’un in-octavo tout pourri dans un recoin. Ce n’est presque jamais le cas lorsque cet ouvrage est mis dans les mains d’un libraire pour expertise. Il n’est pas rare, d’ailleurs, que ce même libraire donnant une estimation se voit considéré comme un escroc espérant se faire une marge sur le dos du pôvre vendeur. Or, il se trouve que ces ouvrages sont dûment cotés et que, si l’on a les outils adéquat et les bons descriptifs il est peu probable que l’on se trompe.
Autrement, je ne vais tout de même pas vous tenir par la main pour vous décrire tout le dossier, alors débrouillez-vous pour le lire.