lundi 19 février 2024

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 27


Rikki Ducornet
Pierre Laurendeau

Mandrake
Les Fruits
de Ruben

Angers — Éditions Deleatur, 1997
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques exégètes



Le Tenancier : Beau livre que cette évocation de la mandragore, écrite et illustrée par Rikki Ducornet et suivie d’une notice rédigée semble-t-il par vos soins, cher éditeur. On y retrouve les illustrations de l’artiste, sensuelles, en même temps qu’un récit en anglais. Le texte non traduit est paraphrasé par la notice dont on se demande (méfiance induite par la collection) si le contenu n’en serait pas enjolivé. Comment s’est produite votre rencontre avec cette poétesse mystérieuse ?
 
Pierre Laurendeau : Cher Tenancier, tu as raison : le doute est toujours de saison lorsqu’il s’agit de Pierre Laurendeau, faussaire avéré, fabricant ou éditeur de supercheries en tous genres.
La rencontre avec Rikki Ducornet (et son compagnon de l’époque, Guy) se fit par l’intermédiaire de Jacques Abeille, bien qu’ils habitassent alors – on était au début des années 80 – tout près de chez moi : d’Angers au Puy-Notre-Dame – où Rikki et Guy avaient posé leurs valises au début des années 70 –, il y a seulement trois quarts d’heure de route. J’avais entendu parler d’eux par un ami libraire (« Il y a un couple franco-américain apparenté au surréalisme qui s’est installé dans le Saumurois, tu devrais les rencontrer »), mais c’est la publication, à l’enseigne de Deleatur, des Little Dirties for Rikki, une mini-enveloppe renfermant des variations dessinées de Jacques Abeille sur le thème de la chaussure et dédiées à Rikki) qui fut l’occasion d’une rencontre lors d’un séjour de Jacques et de sa petite famille à Angers. Nous fûmes tout de suite conquis, Agnès et moi, par cette femme au charme troublant, un peu magicienne, et à l’accent délicieux. Le courant passa également avec Guy, qui était devenu potier après une carrière universitaire en Amérique du Nord. Ils s’étaient installés dans le val de Loire – suivant en cela d’autres surréalistes – à la suite de la publication d’un album pour enfants qui avait été un succès en Amérique. Ils envisageaient de poursuivre cette activité avec des éditeurs français. Ils avaient notamment contacté Bayard, pour des aventures d’un charmant petit ours. Bayard déclina l’offre, puis publia, avec le succès qu’on connaît, la série des « Petit Ours brun »… dont le personnage ressemble étrangement à celui de Guy et Rikki… Curieuse coïncidence ! Ils comprirent assez vite que l’édition jeunesse, en France, fonctionnait sur d’autres critères que ceux des éditeurs outre-Atlantique.
Nous nous vîmes souvent. Même après la naissance de notre fils Olivier, que Rikki adopta.
Peu de temps après notre rencontre, Rikki publia en Angleterre un premier roman, The Stain, toujours inédit en français. Les publications s’enchaînèrent pour elle, avec un succès grandissant outre-Atlantique ; elle fut invitée par plusieurs universités, notamment à Denver, où elle finit par s’installer avec Jonathan Cohen, un psychiatre.
Rikki n’a pas eu de chance avec les lecteurs – et lectrices – français : son univers contrevient aux codes de la littérature nord-américaine telle qu’établis par le Comité de Vigilance des Bonnes Littératures, qui fait la loi sur ce que l’on doit lire. Guy, son premier compagnon, avait entrepris de traduire ses romans, d’abord comme exercice passionné, puis dans l’espoir qu’un éditeur français se déciderait plus facilement au vu du travail de traduction déjà fait. Rikki avait un agent chargé des ventes à l’international, mais les éditeurs restaient muets (il semble que son agent n’ait pas non plus montré un grand enthousiasme à la défendre). J’avais relu, à leur demande à tous les deux, la traduction – magnifique – d’Entering Fire, un roman monde, comme on dit aujourd’hui, se déroulant entre la France de l’Occupation, l’Amazonie et la côte est des États-Unis. J’étais très enthousiaste ! (Et le suis toujours…) Devant le peu d’empressement de la clique germanopratine, je décidai de le publier chez Deleatur, qui venait d’entrer chez l’infernal duo Ulysse-Distique. J’en vendis tout de même 200 exemplaires, ce qui pour Deleatur était presque un best-selleur, mais loin de couvrir les frais ! Un ami américain, vivant à Angers, m’avait conseillé d’envoyer le livre au jury du prix Maurice-Coindreau, qui couronne des traductions de l’américain. Je lui fis part de mon scepticisme sur les prix littéraires et les connivences connues des jurys avec les groupes éditoriaux. « Non, je t’assure, c’est un prix très sérieux. D’ailleurs, il n’est pas remis chaque année. » Je me laissai convaincre et adressai l’ouvrage au jury. Le hasard fit que la remise du prix se faisait cette année-là à Angers. Je ne pus y assister, étant à Paris pour des raisons professionnelles, mais Agnès, ma femme, et Guy y allèrent. Le jury se prononça pour une écrivaine américaine (enfin la traduction de son roman) en précisant : « On a eu du mal à se mettre d’accord… » Grosse déception pour Guy Ducornet, d’autant que le prix était doté. Puis, avant de passer aux petits fours, le porte-parole du jury ajouta : « Ah ! nous avons aussi décidé à l’unanimité d’une mention spéciale pour le roman de Rikki Ducornet, Les Feux de l’Orchidée, magnifiquement traduit par Guy Ducornet. » Et tous d’opiner : ‘Oui oui, superbe traduction ! »
Les mauvais esprits, j’en connais, se diront : « Je vous l’avais dit ! Connivence et compagnie ! » C’était bien cela… Pendant les petits fours, Guy eut l’occasion de converser avec l’universitaire porte-parole du jury (c’était tous des universitaires grand teint) et lui demanda par politesse sur quel sujet il travaillait. L’universitaire parisien (facteur aggravant) lui répondit, avec un rien de condescendance dans la voix : « Ma thèse porte sur un écrivain noir peu connu en France, qui a écrit un roman sur l’invisibilité des Noirs américains, Ralph Ellison… » Guy lui répond : « Ralph ? Je le connais bien, c’est un ami… Nous avons enseigné dans la même université, Amherst College. » Son vis-à-vis faillit s’étrangler avec ses petits-fours : le plouc provincial qu’ils avaient dédaigneusement écarté parce qu’inconnu au sérail se révélait autrement plus capé qu’eux, mais de l’autre côté de l’Atlantique. De plus, il pouvait saboter sa carrière (ce qui n’était évidemment pas dans les intentions de Guy) !
C’est la seule expérience de Deleatur avec l’engeance des prix littéraires. J’étais surtout triste pour Guy, qui vivait chichement.
En avril 1997, je rendis visite à Ramón Alejandro (que j’avais présenté à Rikki à Paris, et dont je repris un tableau pour illustrer la couverture des Feux de l’Orchidée) – voir numéro 22 – et prolongeai mon périple américain par un séjour à Denver chez Rikki et Jonathan, son nouveau compagnon. C’est à cette occasion que je lui proposai cette expérience à deux voix sur les « fruits » de Ruben – traduction volontairement fausse pour « mandragore ». Rikki écrivit un court texte, aussi raffiné qu’érudit sur le sujet – la mandragore l’a toujours fascinée –, que je complétai par une étude tout aussi inventée que vraisemblable.
 
*
 
Last but not least, les éditeurs qui prirent la suite de Deleatur pour la publication des romans de Rikki n’eurent guère plus d’écho que moi, malgré des moyens autrement plus efficaces que moi, que ce soit Le Serpent à Plumes ou Joëlle Losfeld.
Je viens de faire traduire, par Catherine Vasseur – spécialiste des textes impossibles, en castillan du xviie siècle ou en anglais contemporain – Trafik, le dernier roman de Rikki, que j’ai découvert chez elle, lors d’un séjour à Port-Townsend, près de Seattle, où elle réside. Sorte de dystopie cocasse où une humanoïde dialogue avec un robot sur la mystérieuse planète Terre, réduite en cendres… Avis aux éditeurs, la traduction est disponible !

vendredi 16 février 2024

Traduttore Traditore



Allez zou, les publications de 2024 démarrent par une collaboration à une entreprise amusante cornaquée par Pierre Laurendeau dans sa collection L’Ange du Bizarre aux éditions Ginkgo. Plutôt que de se perdre dans une explication, présentons le deuxième plat de couverture qui vous dévoilera le nécessaire et même plus.



On trouvera au sommaire : Jacques Adit, Alphonse Allais, Jean-Marie Audignon, Sandrine Blais-Deschênes, Patrick Boman, Marine Bourafa, Sylvain Erdepoinzé, Roger Lahu, Pierre Laurendeau, Jean-Louis Lejonc, Yves Letort, Jean-Paul Plaintive, Pauline Rey, Catherine Vasseur, Gilles Verdet et Alain Zalmanski.

jeudi 15 février 2024

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 26


Patrick Boman

Crawford
l'Incorrigible

Angers — Éditions Deleatur, 1997
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques voyageurs intépides



Le Tenancier : Reproduisons l’exergue de la nouvelle de Patrick Boman, traduit de manière fort peu synthétique par Albert Savine dans l’exemplaire que nous possédons :
« Or l’Inde est, par-dessus tout, le pays où il ne faut pas prendre les choses trop au sérieux, sauf quand il s’agit du soleil de midi.
Un travail exagéré, une énergie trop grande tuent un homme aussi sûrement que les excès du vice ou ceux de la boisson. » (Rudyard Kipling : Lancé à l’aventure, in : Simples contes des collines).
Dès le début de ce conte anglo-indien, l’on s’attend à se retrouver à Simla et à croiser madame Hauksbee dans le témoignage d’un correcteur de presse du Daily Peigham, au sujet d’un certain Crawford. Patrick Boman se livre à un bel exercice de style et à un pastiche tout à fait maîtrisé (avec un poème « à la manière de » dedans). Ici, chez le Tenancier, on adore Patrick Boman…
 
Pierre Laurendeau : J’ai déjà narré (voir A Naïve Romance, numéro 19) comment j’ai rencontré Patrick Boman, qui deviendra un des piliers de Deleatur, puis de Sous la Cape.
Crawford l’Incorrigible fut d’abord publié, en 1985, dans la Petite Bibliothèque de littérature portative qui était animée par Agnès Jehier, mon épouse. Collection qui accueillit Un Cas de lucidité de Jacques Abeille – repris également dans les Minilivres (voir le numéro 23) –, puis deux nouvelles de Bettencourt…
Patrick est un fin connaisseur de l’Inde – il maîtrise le sanscrit, si j’en crois une rare confidence sur son passage aux Langues-O. Son récit Retour en Inde, paru en 2011 chez Arlea, témoigne de sa nostalgie à retrouver un pays qu’il ne comprend plus guère, vingt ans (ou plus) après ses premiers séjours. Je le vis peu de temps après son « retour » ; il me confia : « Pour une fois que je prenais une chambre avec balcon à Bénarès, ça donnait sur un bûcher funéraire ! »
En 2000, je venais de créer chez Ginkgo la collection Biloba – un temps coanimée par Christian Laucou. J’avais demandé à Patrick, alors sous contrat avec Le Serpent à plumes, un roman très particulier, lié à mon aventure universitaire : j’assurais alors un TD en fac d’histoire à Angers (les universitaires n’ont jamais compris le contenu de mon enseignement) lié à un cours sur l’histoire du livre – que j’assurais également. Pour le TD, je proposais aux étudiants – dont certains sont devenus des amis, avec lesquels je continue d’être en relation – de se mettre en petits groupes autour d’un projet éditorial. Je me souviens de la panique en début d’année : « Mais qu’est-ce qu’on doit faire ? » « Ce que vous voulez… En revanche, j’exige que le résultat soit professionnel. » « Argggg… » Puis, au fil du temps, les groupes se prenaient au jeu, parfois au point de négliger leurs cours ex cathedra, ce que l’on me reprocha, ainsi que mes notations trop élevées selon les critères en cours (sans jeu de mots), notations qui correspondaient à la réelle implication des étudiants dans les projets. L’un de ces groupes avait inventé un personnage trouble, Piotr Terikchenaltev (je me demande bien où ils étaient allés pêcher le nom de ce personnage !) dont ils avaient reconstitué la biographie d’une manière assez amusante. Pour rendre crédible le personnage, et épaissir leur « devoir », j’avais proposé de demander à des amis écrivains de témoigner de leur rencontre avec ce Piotr. Patrick fut un des premiers à répondre – il avait croisé fugacement ce demi-escroc un peu raté, ce qu’il raconta avec son humour en demi-teinte, pour le plus grand plaisir des étudiants. Un ou deux ans plus tard, il m’annonça que mes étudiants s’étaient trompés sur toute la ligne et qu’il avait écrit la véritable histoire de ce Piotr sous le titre La Méthode Piotr. Ce fut donc le premier livre de Biloba, fort joliment illustré par Pascal Jousselin. Le problème : Tania Capron, du Serpent, avait flashé sur Piotr ; mais elle accepta de se défausser à mon profit, par amitié, et sous condition que Patrick lui écrive un « vrai » polar pour le Serpent noir. Ce fut le début de la série des Peabody, dont le personnage central, un inspecteur de la police des Indes, très mal noté par ses supérieurs pour préférer se mêler au bas peuple plutôt que de fréquenter l’élite coloniale, résout des enquêtes aussi tordues que jubilatoires. Il y aura sept livres, plus un recueil de nouvelles (les deux derniers publiés Sous la Cape), qui connurent un beau succès, notamment par la description pleine de saveurs (et d’odeurs !) de l’Inde au tournant du xxe siècle, travaillée par les soubresauts d’un empire sur le déclin et les velléités d’indépendance du pays sous son joug.
Crawford se situe, bien sûr, dans ce registre de l’arrogance des colonisateurs – qu’il paiera chèrement !

mercredi 14 février 2024

Une historiette de Béatrice

— Dix-huit euros, s'il vous plaît monsieur.
— Vous me le faites à 15 ? Vous avez vu la pliure ici ? Et bon, l'état général…
— Le prix de dix-huit euros tient compte de ces défauts, monsieur.
 …
— Et voici 2 euros qui font vingt, merci monsieur.
— Vous êtes sûre que c'est une vraie pièce ? Elle est bizarre, je préfèrerais une autre pièce.

mercredi 7 février 2024

Abba les cadences infernales

Puisque des commentateurs du présent blogue font de la pub pour Joe Dassin et que, entre nous, c’est pas très standing, parce que d’autre part le Tenancier se voit obliger d’observer une courte pause et enfin reconnaissant le caractère dérisoire de toute activité humaine, surtout pour ce qui concerne le titrage des billets ici et même chez les confrères, le même a décidé de vous infliger un titre tartignole, gâchant ainsi une précieuse carte d’immunité, mais carpe diem, après tout, bordeyl, et puis il faut reconnaître que les thuriféraires de JD ont commencé — on est donc en légitime défense, quoi..

mardi 6 février 2024

Une historiette de Béatrice

Le minet qui me demande « où est le coin érotisme », et à la vue des livres, me dit « Ah mais non, je cherche des magazines ». Alors tu t'es trompé d'adresse, ducon.

vendredi 2 février 2024

Rien ! Rien ! Rien !

C’est une sottise que d’écrire des romans pour gagner sa vie. Je vous assure. C’est étrange. L’irréalité de la chose donne l’impression de pénétrer dans votre vie réelle, de vous entrer dans les os, de faire battre l’illusion dans les artères à chaque pulsation du cœur. La volonté se fait esclave des hallucinations, ne réagit qu’ à des élans fantomatiques, est au service de la seule imagination. État étrange, aventure éprouvante, cette sorte de brûlante ordalie par l’insincérité. Et on la traverse avec une exaltation aussi fausse que tout le reste. On la traverse et on n’a rien à montrer au bout du compte. Rien ! Rien ! Rien !
Joseph Conrad : Lettre à E.L. Sanders, 12 octobre 1899
Citée par Sylvère Monod dans la préface de Œuvres, dans la Pléiade.

jeudi 1 février 2024

Graines de Chouïa

Allons bon, me voici en panne provisoire de mes échanges avec Pierre Laurendeau au sujet de sa collection des Minilivres. « Qu’à cela ne tienne, mon p’tit Tenancier, nous avons de la ressource », clame mon alter ego ! Ainsi, signalons à votre sagacité bibliomane la continuation de la collection Samizdat par le même éditeur avec une quarantaine de titres publiés. Le petit dernier par Patrick Boutin joue sur les mots ou quelques à-peu-près devraient réjouir les commentateurs du présent blogue.
On se tient prêt par ici à commencer une série de commentaires autour de la collection Samizdat dès que s’achèvera celle sur les Minilivres… 

 


Patrick Boutin : Graines de Chouïa — Club Samizdat, hébergée par Deleatur (2024)

mercredi 31 janvier 2024

Paf, dans ma bibliothèque !

Pour 1 € on peut se procurer quatre exemplaires de la Série noire à la recyclerie de ma ville. On trouve toujours des choses intéressantes dans le lot. Ainsi, tout une quantité de Westlake m’est passée sous le nez, au profit d’un ami. Tant mieux pour lui. Comme je l’indiquais il y a peu, j’éprouve une légère lassitude à l’égard de celui-là (de Westlake, hein) et j’en possède de toute façon assez pour me contenter d’une exhumation…
Les trois ouvrages acquis dernièrement (pas réussi à trouver un quatrième qui m’intéresse, désolé) se révèlent assez disparates.

 

D’abord, Elmore Leonard reste l’un des auteurs de polars dont on connaît l’œuvre malgré tout sans pour autant l’avoir lu pour la bonne raison qu’énormément de ses romans ont été tournés au cinéma ou pour la téloche. Valdez est arrivé appartient à la série des westerns, et ne me dites pas que vous ignorez la contribution de Leonard au genre ! Il suffit de citer 3 h 10 pour Yuma (1957, Delmer Daves) pour éclairer votre lanterne. Rentré à la maison, je me suis aperçu que je possédais déjà ce volume. Je vais les comparer, garder le plus « mint », comme disent les disquaires et offrir le retoqué (mais en bon état) à quelqu’un qui aime ces petits romans nerveux.

 

Je demeure dubitatif au sujet de Vautrin, avec cette histoire de colleurs d’affiches voyous. Tout à coup, le style me semble suranné après avoir sondé les premières pages. Nous allons nous y remettre sérieusement sous peu, une fois que l’a priori se sera un peu dissipé.


Votre Tenancier éprouve une jouissance coupable à lire de temps à autre des espionnages du temps de la Guerre froide. Les aventures de Sam Durrell, agent de la CIA d’origine cajun répond à tous les clichés du genre et même plus si affinité puisque, crapahutant dans une république arabe au cours d’un de ces romans, on se croirait transplanté dans un film des années 30. Reste une phrase prémonitoire (je vous la retrouverai un jour), qui préfigurait le 11 septembre. Edward S. Aarons produisait très régulièrement ces espionnages standards qu’on lit avec une nostalgie amusée à cause de l’impérialisme occidental et son machisme. À noter que les titres originaux comportaient « assignment » à chaque volume. Assignment Tokyo et sa traduction, Virus-party, se complètent assez pour annoncer la couleur de l’histoire. Votre Tenancier possède une vingtaine de bouquins d’Aarons. Votre Tenancier assume sa perversion.

 

Ce Hillerman manquait à ma bibliothèque. Moi, j’aime, même si je trouve les enquêtes parfois inconsistantes, voire soporifiques selon mon humeur. En définitive, je pense lire les polars comme si c’était une mauvaise manie et j’ai tort, bien sûr. Se plonger dans Hillerman, c’est comme retrouver des vieux chaussons confortables ou rêver devant un catalogue de voyagiste. Je suis dur ? Dans ma bouche, c’est plutôt un compliment, concernant Jim Chee et consorts…

 

Voici un livre terrible. J’avoue avoir hésité à le prendre. Je sais d’avance ce que je vais y rencontrer et je me doute que ce sera pire que ce à quoi je m’attends. Les photos de l’encart central, habituel dans cette collection, sont malaisantes. Ai-je à en dire plus ? Je vous reproduis ci-dessous le résumé, ce qui vaut mieux que toute considération de ma part.


Elmore Leonard : Valdez est arrivé — Gallimard, Série noire (1979)

Jean Vautrin : À bulletins rouges — Gallimard, Série noire (1973)
Edward S. Aarons : Virus-party — Gallimard, Série noire espionnage (1972)
Tony Hillerman : Un homme est tombé — Rivages/noir (2000)
Patrick Declerck : Les naufragés, Avec les clochards de Paris — Plon, Terre humaine (2002)

lundi 29 janvier 2024

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 25


A. Thevet

La cosmographie
universelle
Livre vintdeuzieme,

Angers — Éditions Deleatur, 1996
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques voyageurs



Le Tenancier : Dans cette collection, on aime bien les géographies imaginaires ou ancienne, les fous littéraires et, en définitive, les aberrations de toutes sortes, mâtinées ici de considérations gastronomiques, puisqu’on voit des cannibales saler leurs victimes. Évidemment, on sent que l’éditeur a développé une sensibilité envers les textes de traverse
 
Pierre Laurendeau : Comme j’ai eu l’occasion de le mentionner pour le numéro 24 (Hérodote), ces deux minilivres ont été concoctés à l’occasion d’une présentation des trésors de la Bibliothèque municipale d’Angers.
André Thevet (1516-1592) fut explorateur ; il accompagna notamment l’expédition française au Brésil de 1555, à l’occasion de laquelle fut édifiée une colonie de « la France antarctique », qui dura cinq ans et se termina par la destruction du fort Coligny par la flotte portugaise. Le récit que Thevet fit de son voyage, s’il souffre d’approximations, est considéré comme fondateur de l’ethnologie.
Je ne me souviens plus si l’exemplaire de la bibliothèque d’Angers est l’édition originale de 1557 ou la réédition par Plantin de 1558.
Toujours à propos du livre de Thevet, selon Frank Lestringant qui préface son choix de passages (éd. La Découverte, 1983), le libraire Maurice de la Porte qui publia la première édition se fit aider par un « bachelier », Mathurin Héret, pour mettre de l’ordre dans les notes de Thevet et les rédiger. Il semble que le pauvre bachelier fut un peu oublié au moment de la publication – ce dernier intenta un procès à l’auteur et à l’éditeur « pour usurpation de labeur ». Il obtint gain de cause et fut dédommagé de son travail par vingt écus d’or, mais ne put apposer son nom en tant que coauteur en tête d’ouvrage, comme il le réclamait. C’est le premier cas connu, il me semble, de revendication par un « nègre » (on dit maintenant « auteur associé ») d’apparaître au grand jour.

samedi 27 janvier 2024

Une historiette de Béatrice

Après m'avoir demandé un livre sur Alice Bailey, un dictionnaire des racines des langues indo-européennes, une biographie de François 1er de Toscane, un livre sur un peintre espagnol contemporain qui ne signe pas ses œuvres, il me lance:
« Bon j'arrête, car je sens qu'il faut que je vous demande un Tintin et Milou pour que vous me répondiez favorablement. »
Devant témoin, heureusement (on ne me croirait pas).

jeudi 25 janvier 2024

Fake news, mon cul !

Parmi les mots anglo-saxons à la mode, Fake News tient bien la rampe depuis plusieurs années dans les médias qui, l’on s’en aperçoit de plus en plus, se casse de moins en moins le tronc pour livrer une traduction du terme. Le Comité d’enrichissement de la langue française (sic !) propose le mot-valise « infox » qui fleure bon son montage technocratique à l’usage des « communicants ». Quant à nous, nous préférons encore cette vieille catin de langue française, enfin celle qui n'a nul besoin d'être « enrichie » :
CANARD : Fausse nouvelle, récit mensonger inséré dans un journal. — « Nous appelons un canard, répondit Hector, un fait qui a l’air vrai, mais qu’on invente pour relever les Faits-Paris quand ils sont pâles. » (Balzac.) — « Ces sortes de machines de guerre sont d’un emploi journalier à la Bourse, et on les a, par euphémisme, nommés canards. » (Mornand.) — Une anecdote du tome Ier du Dictionnaire de l’Industrie (Paris, Lacombe, 1776), semble nous livrer l’origine de ce mot :
 
On lit, dans la Gazette d’agriculture, un procédé singulier pour prendre les canards sauvages. On fait bouillir un gland de chêne, gros et long, dans une décoction de séné et de jalap ; on l’attache par le milieu à une ficelle mince, mais forte ; on jette le gland à l’eau. Celui qui tient le bout de la ficelle doit être caché. Le gland avalé purge le canard qui le rend aussitôt ; un autre canard survient, avale ce même gland, le rend de même ; un troisième, un quatrième, un cinquième s’enfilent de la même manière.
On rapporte à ce sujet l’histoire d’un huissier, dans le Perche, qui laissa enfiler vingt canards ; ces canards, en s’envolant, enlevèrent l’huissier. La corde se rompit, et le chasseur eut la cuisse cassée.
Ceux qui ont inventé cette histoire auraient pu la terminer par une heureuse apothéose, au lieu de la terminer par un denoûment aussi tragique.

 
La grossièreté de cette histoire, comme dit notre citation, — l’aura fait prendre comme type des contes de gazette, et canard sera resté pour qualifier le genre entier. On trouve « donner des canards : tromper » dans le dictionnaire d’Hautel (1805).
Lorédan Larchey : Dictionnaire historique d’argot (1881)
 
Mais se priver de la mémoire des mots fait sans doute, également, partie d’un « projet »…

mardi 23 janvier 2024

Une époque extraordinaire

Il est entendu de ce côté-ci du clavier que je m’interdis de délivrer des anathèmes envers les littérateurs réactionnaires ou mêmes fascistes qui occupent de plus en plus le devant de la scène. Il est vrai par ailleurs que l’exposition d’un Céline, par exemple, attire moins de mouches à merde et qu’il devient nécessaire de moderniser la saloperie avec des auteurs bien élevés et si possible adoubés par des médias prompts à la gamelle. Les temps se révèlent extraordinaires, sans doute parce que je n’ai pas assez vécu, à contempler les petites lâchetés, les intérêts bien compris et les compromissions également en cours dans la « République » des lettres et de la poésie, comme il s’en produisit il n’y a pas si longtemps. Certains ont choisi l’indifférence, la réclament même, se retournant contre ceux qui réagissent, maladroitement, certes, à l’envahissement d’une pensée réactionnaire à tous les étages de la vie culturelle. On a lu également quelques contre-feux éloquents, accusant les signataires d’une tribune contre un des charlatans des lettres, de « wokisme », « d’écrivaillons » quand on n’avait pas recours à des insultes franches. À cela, l’on ne s’étonnerait pas de la provenance (Le Figaro à joué son rôle où on l’attendait) si cela ne venait pas de gens qui bâtissent une réputation d’intransigeance… lorsque cela ne leur coûte pas un rond — à moins que cela les compromette — ou bien parce qu’ils redoutent de s’être trompés, d’avoir pris un léopard pour une panthère et d’avoir méconnu Les navigations d’Ulysse de Victor Bérard, bref d’avoir cru à la copie plutôt qu’à l’original. À moins que ceux-là rêvent de participer à la « gamelle » qui paraît bien fournie, et achalandée par les faucons et les Oui-oui. On observe cela de loin, sans étonnement. On s’en doutait, puisque déjà certains rayons de librairies semblent des compilations de propos de bistrots ou de mises à jour des conneries de la Nouvelle-Droite, quand il ne s’agit pas de « recyclage » pur et simple d’idées rances et de textes « bancables ». On a vu tout cela et l’on s’en passe. Mais après tout, la culture envisagée comme une « industrie » démontre son aptitude au recyclage et par destination ne peut se mêler des opinions, excepté lorsque le vent tourne et qu’il s’agit des dernières soldes avant liquidation du prêt-à-penser précédent. Oui, les temps sont extraordinaires, mais loin d’être merveilleux…

Paf, dans ma bibliothèque !

Les fêtes sont passées par là chez votre Tenancier et il n’a pas reçu trop de cadeaux. D’ailleurs, que pourrait-on lui offrir d’autre qu’un supplément de jouissance de l’existence ? Reste le besoin impérieux de posséder des livres, qui fait partie de ce plaisir du cumul. Périrai-je un jour de la chute d’une bibliothèque sur mes pauvres endosses, de la même manière qu’un astronome serait touché par une météorite ou bien une météorologue par la foudre ? La fulguration, quelle étrangeté : cela ressemble de l’extérieur au sentiment, atténué bien sûr, de la découverte d’un nouveau texte. Imaginons-nous partir en quête de l’éclair avec une baguette de coudrier ! Fort heureusement, on en clamse peu. Une histoire amusante serait à rédiger, qui conterait l’exception, une lecture fatale à cause du ravissement ou de l’étonnement. Tu lis… et boum, tu meurs. Cela a bien dû arriver. En tout cas, cela pourrait se produire avec ce petit bouquin sur le poison, amusant et dont la lisibilité laisse à désirer, typo trop brillante sur un fond qui neutralise le contraste, mais qu’importe, le poison se mérite, l’effort est requis et nous possédons tous quelques ennemis, n’est-ce pas ? Mais ces recettes se révèlent-elles fatales ? Le Tenancier n’a pas essayé pour le moment. Constatons que sa lecture n’en deviendrait pas mortelle, mais peut-être sa mise en application…


L’art de la sieste reste un domaine encore étranger à votre serviteur, mais cela importe peu, après tout, puisque le fond de l’ouvrage de Thierry Paquot semble l’emploi de notre temps. Citons : « La sieste fonctionne ici comme une métaphore, elle acquiert un autre sens et ne désigne plus seulement l’acte de s’endormir ou de somnoler, au midi de la journée, mais la capacité à maîtriser son emploi du temps, à ne pas le brader en le soumettant aux temps imposés par “la” société. »
« Vous avez donc lu l’ouvrage, Tenancier ? » Eh bien, même pas ! Je suis tombé sur ce passage au hasard au moment précis où j’en avais besoin, signe éloquent que ce livre me parle. Mystique, le Tenancier ? Et puis quoi, encore ? Le phénomène survient de temps en temps, sans doute à cause du hasard ou d’un inconscient qui travaille pour soi et qui se dit « Voyons, la citation ad hoc doit bien se trouver à cet endroit du livre. » Parfois, ça marche, la preuve…


Vive l’Anarchie, c’est entendu… Cela reste un réconfort au milieu de la vaste maladie mentale qui règne à l’heure actuelle et qui veut nous embrigader, nous scruter, interférer sur notre vie, nous faire croire, etc. Ce volume de Jean Grave m’a été offert par un ami de passage qui s’interroge sur le fondement de la pensée anarchiste et qui s’est acheté quelques ouvrages sur le sujet. On espère qu’il accédera ensuite à quelques penseurs plus modernes que ceux qui étaient proposés dans la librairie où nous nous trouvions. En effet, l’anarchisme reste un concept contemporain et révolutionnaire, malgré les bistrotiers qui s’en réclament, je ne sais quel « comique » ou autres et qui sont autant de petites merdes fascistes, et je reste poli. L’anarchie rassure des gens comme moi qui s’enchantent de la découverte d’un étranger dans son semblable. Merci, mon cher, pour ce cadeau. Vous voyez, j’en ai reçu un, de cadeau ! Mais là, ce n’était pas en raison des circonstances religieuses, sociétales ou autres, mais au nom de l’amitié, qui est, après tout, une composante de l’anarchie. Je vous rassure : on y trouve aussi des sales cons pas amicaux. C’est normal, c’est humain. En tout cas, ce ne sont pas des fascistes, c’est déjà ça.


Nous allons lire la Paquot en premier, en nous demandant s’il fournira un remède à ce temps qui nous manque tant face à l’accumulation de lectures ici et là.

Victor Coutard : Le poison, dix façons de le préparer — Éditions de l'Épure (2023)
Thierry Paquot : L'art de la sieste — Zulma (2002)
Jean Grave : La société mourante et l'anarchie, préface d'Octave Mirbeau — Lux éditeur (2023)

lundi 22 janvier 2024

Une émule de Vrain-Lucas

Votre Tenancier a été libraire à son compte pendant un certain temps. Il recevait parfois de drôles de messages :

" Bonjour M.Le Directeur, Je voudrais, par ce message, vous informer que je dispose de quelques collections de lettres et d'autographs qui font partie intégrale de ce que nous appelons 'les reliques' du passée. Mon souhait est de les soumettre à la vente.Est-ce que vous en seriez interressés. Dans le cas contraire, est-ce que vous pouvez m'indiquer le canal nécéssaire pour couler ce produit ? esperant de vous relire . ****.
Thèmes
Quelques reliques du Passée.
Livres
• Auteur : Jean DéARC, Titre : Lettre de J'EAN D'ARC, aux habitants de la Ville de REIMS-16 Mars1430.
• Auteur : HENRI 4, Titre : Une lettre de HENRI 4.
• Auteur : CORNEILLE , Titre : Lettre de CORNEILLE à COLBERT.
• Auteur : NAPOLEON, Titre : Un COCIDELLE au TASTAMENT de NAPOLEON I er
• Auteur : LOUIS 16 ., Titre : La derniére lettre de LOUIS 16.
• Auteur : ROBESPIERRE, Titre : La derniére Signature de ROBESPIERRE
• Auteur : Jean BART, Titre : Un Glorieux Rapport de Jean BART .
• Auteur : CLEMANCEAU, Titre : retour d'une visite au Front, 9 Jan.1914.
Details de l'utilisateur
Operateur Economique ., *** Nicodeme
Lomé -Togo, 12 BP 192 , Lome, TOGO "

Sans doute sans le savoir, cet honorable correspondant togolais marchait sur les brisées de Denis Vrain-Lucas

NB

Par manque de temps, votre Tenancier a interrompu momentanément son dialogue autour des Minilivres avec Pierre Laurendeau qui se déroulait les lundis et les jeudis. On va y revenir rapidement...

samedi 20 janvier 2024

Paf, dans ma bibliothèque !

Quelle mouche m’a donc piqué pour que je m’empare de ces trois titres de Jacques Perret dans leur livrée de bibliothèque ? Sans doute celle qui ouvre le recueil des Histoires sous le vent, jeu de société qui m’a amusé lorsque je le découvris en même temps que les œuvres dudit. La mouche fut reprise dans un film avec Fernandel. Ne m'en demandez pas le titre. J’ai cédé à l’envie de toucher ces volumes qui fleurent encore l’habillage ancien avec ses renforts de cartonnage, la toile, les deux plats et le dos contrecollés sur celle-ci. Les références dactylographiées figurent sur deux d’entre eux, au verso de l’achevé d’imprimer. Les trois livres ont reçu également le tamponnage erratique au fil des pages, sur les gardes et le titre. On les a rognés. Ce sont des météores échappés du début des années 1960, à en juger leur date d’impression, souillés de la marque infamante de la modernité : le code-barre sur le premier plat. Cet ajout tardif sous une rustine transparente pourra être retiré sans dommage. Mais alors quel intérêt présentent ces artefacts venus du lointain des pratiques bibliothécaires, du temps où les métiers du livre ne se figeaient pas devant les écrans ? Eh bien, si je possède deux de ses titres, je trouve agréable de les relire dans un tel format, que l’on qualifierait d’in-12, sous réserve de vérifications (et j’ai la flemme de le faire en examinant les signatures et de me livrer à des calculs et parce que j’ai perdu la main, il faut bien le dire). Malgré le papier un peu jauni, la typo reste nette, et le format ne fatiguera pas le poignet, contrairement aux compilations boursouflées auquelles d’ailleurs Jacques Perret échappe, privilège de passer sous les radars de la mode… Ce coup de Lune, à prélever ces livres « sortis des collections », se paye déjà. Ils encombrent des rayonnages apoplectiques et choquent mon esprit de très modeste bibliophile. Mettons cela, alors, sur le compte d’un hommage aux bibliothèques et à l’amorce d’une songerie au sujet des précédents lecteurs de ces livres-là.
Ah oui, au fait : Jacques Perret, c’est drôle et bien écrit.
Merci de votre attention.

Jacques Perret : L'oiseau rare — Gallimard (1959) | Les biffins de Gonesse — Gallimard (1961) | Histoires sous le vent — Gallimard (1961)

vendredi 19 janvier 2024

Une historiette de Béatrice

Et comment dire à cet attendrissant grand-père que le vieux journal trouvé dans son grenier, soigneusement dépoussiéré et « transporté précautionneusement à travers toute la ville, et je n'en ai pris qu'un, vous imaginez si j'avais pris le lot et que je m'étais fait dépouiller de ces trésors »... Comment lui dire que, justement, son journal n'est pas le joyau de la couronne ?

jeudi 18 janvier 2024

Bibliographie commentée des Minilivres aux éditions Deleatur — 24

 
Hérodote

Histoires
Livre deuxiesme,
intitulé
Euterpe

Angers — Éditions Deleatur, 1996
Plaquette 7,5 X 10,5 cm, 16 pages, dos agrafé, couverture à rabats, pas de mention de tirage
Achevé d'imprimer en octobre 1995 sur les presses de Deleatur pour le compte de quelques amateurs



Le Tenancier : Alors, là, je sèche! Si je me souviens bien, Euterpe est la muse de la musique, or ce «reportage» d’Hérodote, dans un coq-à-l’âne qui nous fait passer de la reproduction des poissons, à une substance contre les mouches jusqu’à la navigation sur le Nil, il n’est pas question de cela!
Je relève le même éclectisme dans les Minilivres que dans les productions de GLM, au sujet des auteurs embarqués et d’un titre à l’autre. L’éditeur musarde!
 
Pierre Laurendeau : Ouh la, Tenancier ! quelle miche te pouque ? Certes, je te le concède, Euterpe est bien la muse musicienne, mais je n’ai pas inventé le titre du Livre II des Histoires d’Hérodote (j’ai même vérifié sur l’exemplaire des Belles-Lettres).
Ce minilivre, comme le suivant, consacré à Thevet, fut édité à l’occasion d’une exposition d’ouvrages anciens du fonds de la Bibliothèque municipale d’Angers – un des plus riches de France, grâce au fameux roi René, prince insouciant mais cultivé ; ce qui lui vaut de posséder un des rares exemplaires du Psautier de Mayence, un des tout premiers livres imprimés, et le premier à faire figurer un achevé d’imprimer avec l’année, 1457. Ouvrage que j’ai eu l’honneur de tenir entre mes mains tremblantes d’émotion !
Comme je le précise en note, « le texte imprimé dans le présent opuscule est extrait de Hérodote, Histoires mises en françois par P. du Ryer (Paris, Augustin Courbé, 1658) ».
Ce minilivre ainsi que celui de Thevet étaient mis à la disposition des visiteurs – je crois me souvenir que je les imprimais sur place…